Chapitre 2

662 19 28
                                    

J'observais le visage de Michael, folle d'angoisse. Il avait paru si doux et drôle depuis son entrée dans la loge, il paraissait maintenant bien plus âgé et dur. Ses yeux bruns plantés dans les miens ne cillaient pas, ses sourcils noirs froncés à l'extrême et son air furieux m'empêchèrent de répondre quoi que ce soit. Muette, j'attendis que quelqu'un m'annonce mon renvoi, et je songeai avec peine aux années de labeur à l'école d'artistes maquilleurs parties en fumée si vite. Mais brusquement, Michael se redressa et croisa les bras, une lueur malicieuse au fond des yeux.

-Il va falloir effectuer la première dépense du staff dès le premier jour, dit-il à l'un de ses gardes du corps.

-Hein?, lâchais-je complètement perdue.

Il eut un demi sourire, ses sourcils revinrent à leur place initiale, et un petit rire lui échappa. Il secoua la tête, agitant ses frisottis dans tous les sens.

-Ma maquilleuse ne peut pas rester sans matériel, dit-il sous les rires de Janet et du reste du cast. Mais il faudra vous méfier des taxi pressés, ajouta-t-il en prenant une moue pensive, on m'a déjà fait de très mauvais retours, et certains y laissent parfois des plumes.

Il eut l'air pensif, la main sur le menton, et Janet l'observa attentivement. Joe, qui se tenait en retrait depuis plusieurs minutes, l'observait puis me lançait des regards furieux, passant de son fils à moi-même dans un manège inlassable. J'étais manifestement la seule à n'y rien comprendre.

-Mais alors ..., marmottais-je timidement.

Michael m'observa, je croisais de nouveau les pieds sous ma chaise.

-Je ne suis pas renvoyée?, demandais-je d'une voix éraillée.

Il écarquilla légèrement les yeux, et ses sourcils s'envolèrent dans une expression effarée. Je ne compris pas pourquoi il semblait si surpris, il s'agissait tout de même de l'un des artistes les plus adulés du moment aux prémices de sa carrière solo. Constituer une équipe dont les membres perdent leur matériel alors qu'ils n'avaient même pas encore commencé à travailler...

-Je devrais la renvoyer alors?, interrogea-t-il en souriant pour de bon et en se penchant vers Janet.

-Bien sûr que non, répondit-elle en fronçant le nez sous son sourire complice. C'est la seule qui ne m'ait pas envoyée paître pour ma blague sur les pizzas.

-La blague sur les pizzas?, répéta Michael surpris. Janet qu'est-ce que tu as fait pendant mon absence à ces pauvres gens?

-Des bêtises comme à son habitude, coupa Joseph en me lançant un regard glacial. Veillez à ce que ça ne se reproduise plus.

-Tout ira bien, lança Michael sans le regarder. Nous règlerons ces détails là par la suite de toute façon.

Michael lissa la liste des membres du staff contre la table basse puis il se redressa en appelant quelqu'un d'autre.

La matinée passa à une vitesse folle, nous apprîmes ainsi que Michael avait commencé l'enregistrement de son nouvel album en parallèle des sessions qu'il enregistrait avec le reste de la famille pour Triumph. Nous serions donc amenés à traiter avec eux assez régulièrement, pour les conférences de presse et les sorties officielle. En tant que maquilleuse, j'étais sollicitée pour chacun des membres de la famille, que ce soit pour les apparences live, mais aussi pour les sorties officielles et les cérémonies de récompenses. J'avais des images plein la tête, je m'imaginais déjà maquiller Michael dans les coulisses des Grammy Awards, entourée d'autres troupes affairées autour des plus grandes stars du moment. Autour de moi, personne ne pipait mot, et je compris que nous avions à peu près tous le même scénario en tête. Les costumiers, les assistants, les médecins, les coach ou les coiffeurs: chacun devait déjà s'imaginer le genre de vie à cent à l'heure que nous étions sur le point de commencer... Et pour ma part, j'étais à des années lumières de ce qui m'attendait réellement.

The make up artistOù les histoires vivent. Découvrez maintenant