C'en était fini de nos moments en privé. Michael avait été si surpris de voir La Toya débarquer en plein milieu de la grange qu'il n'avait pas su quoi répondre à ses sœurs, et il s'était arrangé pour que nous passions l'intégralité de la journée accompagnés.
Il avait tenu sa promesse en me trouvant une petite maison agréable à dix minutes de la sienne, sans tralalas, et bénéficiant d'un système de sécurité à la pointe. Le fait que la maison des Jackson soit si proche empêchait n'importe-quelle intrusion de paparazzis dans le périmètre, une véritable chance.En revanche, je ne vis plus Michael que pour ses rendez-vous et ses projets. Ni plus, ni moins. Je ne lui en voulais pas tant que cela, je le connaissais assez bien pour savoir qu'il paniquait parce-qu'il ne savait pas comment gérer la situation. Et puisqu'il avait d'autres chats à fouetter, je ne lui en tenais pas rigueur. En effet, depuis le tournage de Captain Eo, une nouvelle rumeur désagréable circulait sur son compte: "Michael Jackson dort dans un caisson à oxygène." S'ajoutait à cette psychose le monde dans lequel il vivait: le fait qu'il ait un lama et un serpent, qu'il ait Elizabeth Taylor comme meilleure amie, et qu'il se faisait régulièrement opérer le nez pour -d'après les médias- "ressembler à une femme".
Un mois après l'incident à Encino, Michael tint à ce que je vienne le maquiller pour une entrevue avec un journaliste. Je fus donc escortée jusqu'à une maison de campagne reculée où devait se dérouler l'interview, et ce fût Quincy qui m'accueillit, l'air passablement agacé.
-Je suis vraiment désolé Ollie, mais le rendez-vous vient d'être annulé, dit-il après m'avoir embrassée.
-Ah bon?, m'étonnai-je. Mais pourquoi?
-Prince m'a recontacté après notre troisième entrevue, lança Michael du canapé dans lequel il était assis. Je lui avais proposé un duo et je lui ai envoyé les paroles par la suite.
-Et...?, risquai-je en ayant bien peur de déjà connaître la suite.
-Il a refusé, lâcha Michael. Je suis fou de rage, le contexte de la chanson était tiré d'une histoire vraie, le clip devait s'en inspirer, et tout tombe à l'eau.
Quincy eut une moue contrariée, et je ne pus que l'imiter. Avec ce troisième album solo, Michael tenait à repousser les limites qu'avait bâti Thriller. Le problème, c'était que mentalement, le jeune homme avait à subir la pression de plus en plus constante des médias qui se retournaient dorénavant contre lui, il n'avait plus du tout de liberté, et ses exigences étaient bien plus pointues puisqu'il s'agissait à présent de surpasser un album déjà devenu légendaire. Et surpasser une légende...
-Bon, ça suffit, dis-je en croisant les bras. On arrête de jouer au bébé.
Michael et Quincy me lancèrent un regard perdu. Le producteur de Michael s'était assis dans un fauteuil, son chandail de laine et son pantalon gris lui conférant des airs de grand père sévère lorsqu'il m'observa par-dessus ses lunettes, un bloc de feuilles tendu entre ses mains. Quand à Michael, ses cheveux dorénavant bien plus longs et dépourvus de laque frisottaient en un mont de boucles sur son crâne et retombaient en mèches douces jusqu'à ses épaules. Il portait une chemise rouge vif et un pantalon noir en toile qui contrastait avec le rouge pétant de ses chaussettes. Il fronça les sourcils et ses doigts attrapèrent le chapeau noir qui reposait sur son genou.
-Que veux-tu dire par là?, questionna-t-il.
-Je veux dire par là que je te connais par coeur, soupirais-je. Tu as sûrement déjà écrit deux cents-quinze... non aller, deux-cents trente chansons que tu as compilées sur une cassette, et tu vas me faire croire que pour une seule de ces chansons, tu te mets dans tous tes états et tu annules une interview?
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The make up artist
RomanceOllie Dangton caresse du doigt un rêve d'enfant: exceller dans le monde du maquillage professionnel. Parvenue à finir ses études, son diplôme entre les mains, elle rêve d'un début de carrière marquant, quelque-chose qui la marquerait à jamais, et se...