-Avec moi?, répétais-je en sentant mes mains se couvrir de sueur. Que se passe-t-il?
-Rien de très grave, ne t'en fais pas, assura-t-il en tirant une chaise. Installes-toi.
J'obtempérais en ressassant silencieusement les dernières semaines écoulées. Je ne me souvenais d'aucun incident, d'aucun raté. Lorsque j'avais dû prendre en charge le maquillage des Jackson, tout s'était déroulé sans anicroche. Nous avions même échangé quelques plaisanteries au sujet de nos couleurs de peau: "une peau de porcelaine qui sait maquiller nos peaux noires, c'est à n'y rien comprendre!" avait argué Jackie tandis que je camouflais ses cernes en souriant. Ma proximité avec chacun d'entre eux avait-elle été une erreur professionnelle? Approcher de si près de si grandes personnalités commençait-il à me monter à la tête?
Le regard de Michael restait fixé sur moi, il posa son menton dans sa main en plissant les yeux. Sa main libre tenait toujours ses lunettes de soleil, et lorsqu'il me vit observer ses doigts, il les replia inconsciemment autour de la branche de ses lunettes.
-A quoi penses-tu?, interrogea-t-il songeur.
-Je me demande ce que j'ai pu faire comme erreur, avouai-je sans bien comprendre ma franchise. Les semaines qui s'en viennent me sont peut-être monté un peu trop vite à la tête.
Il haussa les sourcils, l'air stupéfait.
-Comme erreur?, répéta-t-il en reculant légèrement la tête. Tu crois que je suis venu te remonter les bretelles?
-Ce n'est pas le cas?, interrogeais-je en sentant un poids s'envoler de mes épaules et un soulagement glacial couler dans ma cage thoracique.
-Bien sûr que non!, s'écria-t-il, Tu fais du très bon travail!
Il me scruta de nouveau, comme s'il cherchait à lire quelque-chose dans mes yeux. Il poussa ensuite un long soupir qui fit s'envoler mes cheveux. Il sentait étrangement bon, un mélange de cannelle et de menthe qui me fit cligner des yeux. Michael s'enfonça dans son siège en me jetant un regard ennuyé.
-Je suis si effrayant?, demanda-t-il d'une voix plus douce.
-Un peu, avouais-je en maudissant une fois de plus mon honnêteté. Vous avez une stature impressionnante.
-Ne me vouvoies pas, soupira-t-il de nouveau. Et n'aies crainte, si je voulais te renvoyer, j'aurais plus ce genre de tête.
Il fronça les sourcils en s'approchant de moi, la bouche en avant, et posa ses poings sur ses hanches en claquant du talon contre le sol. Surprise, je me reculai brusquement en lâchant un rire amusé. Il avait beau être Monsieur Michael Jackson, il n'en restait pas moins qu'un jeune homme de vingt-deux ans- avec un fort penchant pour les bêtises. Vaincue, je secouais la tête.
-D'accord, dis-je avec un sourire, je vous crois.
-Je te crois, corrigea-t-il en roulant des yeux agacé. Et puis en cas d'erreur fatale, poursuivit-il songeur, je discute immédiatement avec la personne pour lui expliquer son renvoi. Histoire d'avoir au moins vécu une expérience enrichissante. En somme, je ne compte pas me mettre qui que ce soit à dos, ce n'est pas mon genre.
Je hochais la tête. Il resta silencieux quelques secondes, les yeux perdus dans ses pensées, puis il posa de nouveau ses iris brunes sur moi.
-Bon, dit-il, je t'ai fait venir en avance pour te parler d'un sujet qui m'ennuie un peu mais dont je dois discuter avec toi. Après tout, tu es ma maquilleuse, et tu es la seule à traiter d'aussi près avec ...
Il eut un geste évasif, englobant toute sa personne. Je hochais une nouvelle fois la tête sans trop comprendre où il voulait en venir, et mon air concentré lui arracha un nouveau rire aigu.
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The make up artist
RomanceOllie Dangton caresse du doigt un rêve d'enfant: exceller dans le monde du maquillage professionnel. Parvenue à finir ses études, son diplôme entre les mains, elle rêve d'un début de carrière marquant, quelque-chose qui la marquerait à jamais, et se...