Chapitre 5

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Durant presque un mois, personne ne put approcher Michael. Nous n'eûmes de ses nouvelles qu'à travers la presse, et grâce à Rogers et Kaitlin, ses agents les plus proches. Grâce à eux, nous eûmes bien plus de détails sur ce qui s'était réellement passé ce jour là, une version totalement différente des absurdités que la presse déversait quotidiennement: lors des répétitions, alors qu'il montrait un mouvement à ses frères, Michael avait en effet oublié qu'il se trouvait sur une scène surélevée, et non sur un sol plat. Il était donc bien tombé la tête la première sur le sol de l'arène dans laquelle il était censé chanter le surlendemain, et son visage en avait pris un sacré coup.

-Son nez est cassé, avait expliqué Kaitlin en repoussant une mèche d'un noir de jais qui retombait dans ses yeux fatigués. Il souhaite évidemment que les médecins l'aident à arranger ça, mais aussi à le rétrécir légèrement. Ca à rendu fou de rage Joseph, ils se disputent constamment, et sa mère passe son temps à rappeler à son père que Michael à besoin de repos. Mais, vous connaissez Monsieur Jackson...

Pour le connaître, je commençais à le connaître, oui.

Michael m'avait souvent confié qu'il n'appréciait pas son apparence. Pis, il se dégoûtait la majeure partie du temps. Lorsque je le maquillais, je tentais de le rassurer et de lui montrer ce que chaque personne voyait de lui lorsqu'elle le croisait: un jeune homme afro-américain au visage lumineux et au regard profond, je le trouvais très beau et je tentais de lui faire comprendre au mieux, mais Michael restait obstiné et buté -un trait de sa personnalité vraiment dominant, complètement ignoré des tabloïds. Savoir qu'il souhaitait modifier son apparence m'avait donc très peu étonné, il en allait de même pour le reste de l'équipe.

Un soir, fin Novembre, je reçus un coup de téléphone. J'étais chez moi, dans mon studio, peaufinant le maquillage type choisi pour une parade new yorkaise, un chili mijotant dans une marmite. La sonnerie du téléphone me fit sursauter si violemment que les paillettes roses du pot que je tenais dans la main s'étalèrent absolument partout et s'engouffrèrent dans mes cheveux qui passèrent du blond au rose bonbon à mon grand désarroi. Avec un soupir las, je décrochais le combiné que je collais à mon oreille en passant une main dans mes boucles.

-Allô?, maugréais-je le regard vide.

-Ollie?, répondit une petite voix. Je ne te dérange pas?

-Michael?!

J'en lâchais le téléphone, complètement sonnée, puis le rattrapais à la volée, m'entortillant dans le fil à spirale. Je n'avais jamais été contactée par Michael directement mais par ses agents, ou quelques rares fois par Joseph Jackson, mais jamais par lui même. Entendre sa voix dans le combiné me fit l'effet d'une gifle, et mon cœur cogna contre mes côtes, me provoquant un drôle de vertige. Je me pressais contre le mur en portant le téléphone contre mon oreille.

-Désolée, m'excusai-je platement, le téléphone m'a échappé.

-Je ne te dérange vraiment pas?, interrogea-t-il avec un sourire dans la voix.

-Non, non ne vous en faites pas, je finissais un projet annexe, et...

-Vous?, répéta-t-il.

-Ne t'en fais pas, corrigeais-je avec un rire idiot. Désolée, je suis ailleurs.

-On ne s'est pas vus depuis un moment, dit-il d'une voix lointaine, c'était à s'en douter.

Il marqua un temps de pause et j'entendis la friture sur la ligne combler son silence, la tête bouillonnante de milles idées plus dingues les unes que les autres. Pourquoi Michael Jackson m'appelait à vingt et une heure après cinq semaines de silence total? Et pourquoi le faire directement chez moi? Il y eut soudain un soupir entrecoupé par le réseau incertain.

The make up artistOù les histoires vivent. Découvrez maintenant