-Qu'est-ce que ça fait de passer de maquilleuse de Michael Jackson à associée de Jean-Paul Gaultier?
La journaliste aux cheveux blonds et aux lèvres peintes en rouge me tendit son micro à bout bleu, un air jovial sur son visage rendu mât par le soleil -à moins qu'elle n'ait fréquenté des salons d'UV en prévision du gala de la soirée. Autour d'elle, les flash des photographes crépitaient dans tous les sens, leur autorisation de fouler le tapis rouge était une véritable aubaine, car ils avaient devant eux les deux personnes les plus recherchées de la planète lors de ces dix dernières années. La main posée contre le bas de mon dos ondula légèrement contre ma robe à sequins de couleur chaire, les doigts de Michael dessinèrent de petits ronds lentement, signe que je pouvais répondre sans me soucier du sens que prendraient mes paroles. Mon sourire s'élargit lorsque je répondis avec aplomb.
-Ce sont deux univers tout à fait différents, déclarai-je sous le regard attentif des journalistes, mais l'attention portée à chaque détail reste la même. La seule chose qui diffère, c'est que j'en quitte un pour passer le reste de la nuit avec l'autre. Mais je ne vous préciserais pas lequel.
Le groupe qui me faisait face éclata d'un rire enjoué, et j'entendis Michael s'esclaffer près de moi. Ses yeux dissimulés derrière ses lunettes de soleil noires, il agitait doucement la tête sous son petit rictus amusé, et les mèches qui pendaient contre ses joues se mirent à gigoter en rythme. Il avait passé sa chemise de satin rouge, ses cheveux étaient attachés en une demi queue de cheval aux boucles absolument magnifiques, et le pantalon noir à boucles dont le côté des jambes était traversé d'une épaisse bande de couleur rouge m'avait valu des coups d'oeil taquins de sa part lorsque je l'avais scruté d'un oeil intéressé. Au loin, je vis Pamela et Andy nous gratifier de sourires éclatants, des badges du staff passés autour de leur cou, prêts à nous réceptionner en coulisses. Nous nous dirigeâmes vers eux d'un pas trop lent selon moi mais d'usage sur un tapis rouge scruté par le monde entier, et lorsque nous fûmes enfin parvenus dans l'ombre du couloir menant aux loges, Pamela se pencha en avant pour attraper mes mains et me tirer vers elle en bondissant de joie.
-Alors là! Alors là! Alors là!, explosa-t-elle d'une voix suraiguë.
Ses longs cheveux roux aussi frisés que ceux de Michael avaient été arrangés en un chignon élégant par Andy, et elle portait un ensemble de costume à épaulettes entièrement fait de soie verte. Notre ami coiffeur était pour sa part entièrement habillé de cuire blanc, et un t-shirt marinière rouge et blanc barrait sa poitrine. Il scruta Pamela d'un regard las, et il fit tournoyer son index contre sa tempe avec un regard en biais pour Michael.
-Elle répète la même chose en boucle depuis qu'on est arrivés, dit-il. Mes oreilles sifflent.
-Toi, la ferme, espèce de rabat-joie, grommela Pamela en tendant la main pour lui frapper l'épaule.
-Elle m'a rendu à moitié sourd d'ailleurs, poursuivit Andy comme si de rien n'était. Je crois qu'elle me parle, mais je ne l'entends pas.
-A ta place, j'éviterais de l'énerver, rit Michael. Elle m'a donné plus de bleus en dix ans que je ne saurais m'en faire dans dix vies différentes.
-J'espère que tu plaisantes, raillai-je. Tu es celui qu'elle frappe le moins. J'ai encore la marque de brûlure qu'elle m'a faite avec le fer à repasser!
-Dites ce que vous voulez, je m'en fiche, sourit Pamela en m'entourant de ses bras. Je suis au paradis, je veux mourir ici.
Andy lâcha un nouveau soupir douloureux qui nous fit tous éclater de rire -Pamela comprise. Nous avions tenu à les faire venir pour le dernier défilé de la semaine, le plus important de tous, ils étaient nos meilleurs amis et je tenais absolument à ce qu'ils soient présents. Ils avaient donc apporté leur contribution à la préparation de Michael ainsi qu'à la mienne, et j'avais revêtit l'une des robes de gala de la collection de Pamela, et Andy s'était chargé de transformer ma crinière ébouriffée en une véritable mer de boucles dorées. J'avais toujours une idée précise en tête, l'officialisation de la date du mariage n'en était que la première étape. J'avais immédiatement observé les changements dans l'attitude de Michael: il avait littéralement bondi de sa chaise en me hurlant qu'il était d'accord, et nous avions prévu de planifier le mariage pour le mois de Décembre, le temps de nous laisser le soin de tout organiser au mieux, et Michael tenait à ce que le mariage ait lieu le mois de mon anniversaire, ce que je n'avais pas refusé: sa proposition m'avait trop touchée. Depuis ce soir là, Michael semblait planer sur un nuage, il me suivait volontiers sur les défilés, ne prêtait plus du tout attention aux ragots de la presse, et il affichait constamment un sourire éblouissant qui lui donnait cet air d'enfant heureux que j'aimais tant.
VOUS LISEZ
The make up artist
RomanceOllie Dangton caresse du doigt un rêve d'enfant: exceller dans le monde du maquillage professionnel. Parvenue à finir ses études, son diplôme entre les mains, elle rêve d'un début de carrière marquant, quelque-chose qui la marquerait à jamais, et se...