Chapitre 42

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PDV Jungkook

Je pose ma tête contre le mur en face de moi. Des images essayent de s'infiltrer. Je griffe l'arrière de ma nuque pour me concentrer sur la douleur et les faire disparaitre. Mes doigts sont retirés par une autre main et je dois avouer que le contact physique est la dernière chose que je veux et il me fait revivre de mauvais souvenirs. La voix de Taehyung est bien plus efficace comme distraction.

"- V: Bébé qu'est-ce qui ne va pas? J'enlève ses mains et repose les miennes contre mon torse. Son regard est inquiet et semble s'attrister à l'action.
- Rien, je vais bien. Je tente un sourire qui j'espère ressemble à l'authentique.
- V: Tu crois être convaincant?
- Et tu veux que je te dise quoi hein? Que mon passé me hante encore une fois et que je n'arrive pas à le gérer même après 12 ans! Que j'en ai marre d'être aussi faible et d'inquiéter les seules personnes qui n'ont rien demandé en échange de leur amour! Vas-y Taehyung. Dis-moi, qu'est-ce que tu veux! Il n'a rien fait mais c'est juste que tout ce surplus d'émotions me fait péter un câble, je n'arrive pas à gérer mes émotions et ça finit par se transformer en de la colère, de la rancune et des pleurs.
- V: Je veux comprendre pourquoi tu continues à te rabaisser? Pourquoi tu as quitté la table? Pourquoi tu te sens mal? Pourquoi tu essayes de me fuir lorsque je me rapproche de toi?
- Tu veux beaucoup de choses Taehyung mais pourquoi tu les veux?
- V: Parce que je déteste te voir triste, bouleversé ou terrifié. Parce que j'ai l'impression d'être inutile quand ça t'arrive. Parce que tu es tout simplement important pour moi. Parce que tu n'imagines même pas à quel point tu m'es précieux.
- Je suis juste...
- V: Un petit miracle qui est arrivé dans ma vie et qui m'a transformé en serviteur dévoué ? Je ne te savais pas aussi imbu de toi-même mais c'est exactement ce que je pensais. Je ris à travers mes pleurs parce qu'il est juste stupide.
- Tu fais toujours ça, essayer de me faire rire.
- V: Je veux entendre le son le plus merveilleux au monde, comment peux-tu m'en vouloir mon ange?
- Taetae. Je demande ses bras qu'il me donne sans aucune hésitation. Je pose ma tête sur son épaule, je m'accroche désespérément à ses vêtements, s'il part je m'effondre.
- V: Je n'irai nul part, pas quand je tiens la plus brillante des étoiles entre mes mains gourmandes."

C'est comme s'il lisait dans mes pensées, je serre moins fort, je continue à tenir sa chemise tout de même, je sais parfaitement qu'il ne partira pas. J'ai confiance en lui et il m'a montré qu'il ne ferait jamais rien contre moi. Je renifle dans un bruit assourdissant avant de porter mon cœur à découvert.

"- Je me sens en sécurité ici, ça n'a pas toujours été le cas et encore maintenant je me sens trop fragile pour me sentir capable de me soutenir seul. La solitude est devenue bien trop lourde à porter, et j'essaye de m'échapper de ce poids quand j'en ai l'occasion. J'étais toujours seule avec mes parents, même lorsqu'ils étaient présents avec moi, parce que j'avais l'impression d'être un petit caillou qui ne faisait le bonheur de personne sauf lorsqu'il réussissait. Mais je ne me suis jamais aussi sentie seul que dans les rues inconnues où j'ai couru pour sauver ma vie. Mes parents étaient morts, j'ai respecté leur dernier souhait. Je suis arrivé dans un monde chaotique, je pleurais et tout le monde s'en fichait. Les gens me regardaient sans me voir, voyaient ma détresse mais ne cherchaient pas à m'aider. Ils avaient une belle vie et il ne voulait pas s'accommoder de moi. À cette époque j'aurais tout donné pour qu'un héros vienne me sauver et que je puisse reprendre une vie normale. Mon rêve ne s'est jamais réalisé. Je n'ai pas arrêté de courir pour ma vie. Je ne savais pas comment ça marchait, comment me comporter, quels étaient les règles de ce nouveau monde. La vie m'a vite fait comprendre. L'argent, la perfidie et la violence en étaient les règles. J'ai dû voler pour manger, fuir pour échapper aux brutes et trouver un coin où je serais le seul à pouvoir y accéder. Je devais faire attention au moindre bruit, utiliser toutes mes leçons, traquer sans me faire repérer. Ça n'a duré que quelques mois mais c'était comme des années. J'étais comme une bête sauvage ou du moins j'ai dû essayer de leur ressembler. Je n'ai clairement pas assez retenu mes acquis. Je me suis fait avoir par un simple sourire, ça faisait tellement longtemps qu'on ne m'en avait pas fait un. C'était une vieille dame, elle avait l'air tellement gentille. Elle m'a tendu la main et je l'ai saisi. Elle m'a emmené chez elle, m'a nourri, m'a fait baigner et j'avais pu dormir confortablement et au chaud. Lorsque je me suis réveillé, j'étais dans une pièce avec d'autres personnes, tu les aurais vu. Ils avaient un corps qui respirait mais aucune vie n'émanait d'eux. J'ai pris peur, je ne savais pas où j'étais ni pourquoi. Des hommes emmenaient certains d'entre eux et ils ne revenaient pas. Au bout d'un moment ça a été mon tour, je me suis directement débattu mais j'étais tellement faible, chaque mouvement me demandait un effort surhumain. Mais j'ai quand même réussi à les battre, j'ai cherché une issue, je n'ai pas eu le temps de la trouver. Ça a été l'enfer après ça. L'homme qui m'a retrouvé était plus qu'en colère, il voulait me le faire payer alors il a enlevé mes vêtements. Je m'arrête, n'arrivant plus à parler sous la peur de révoquer cette partie de moi.
- V: Est-ce qu'il t'a? Je repleure, il sèche toutes les larmes qui coulent et me transmets de la chaleur avec toutes ses marques d'affection, des chuchotements réconfortants, des bisous et des caresses tendres. Je me remets à parler me ressentant assez fort pour le faire.
- Non, un autre est arrivé et l'a chassé avant qu'il ne puisse rentrer. Il a dit qu'il ne pourrait jamais payer la somme que je vaudrais. Sur le coup, je n'ais pas compris ce qu'il venait de dire. J'ai été emmené dans une autre pièce que la précédente. On m'a maquillé et habillé avec des vêtements qui n'étaient pas faits pour des enfants, trop sexuelles mais qui arrivaient à me rendre quand même mignon, comme un jolie trophé en chocolat qu'on aimerait garder pour le croquer. On m'a enfermé dans une cage comme un vulgaire animal, et j'ai vu toute une foule en face de moi. Leurs masques cachaient la moitié de leur visage mais pas assez pour cacher la laideur de leur regard. Je sentais que j'allais vomir parce que je me sentais tellement exposé et si mal à l'aise. Une sorte de présentateur a commencé à me décrire avec des termes horribles, me faisant passer pour un bel objet de luxe, plus rare que n'importe quelles pierres précieuses. Après sa présentation il a énuméré un chiffre avec plus de zéro que l'on pourrait se permettre, le public s'est emballé, chacun essayant d'acheter la pièce maîtresse mise aux enchères. J'ai nié l'évidence en cherchant ce qu'elle pourrait être mais il n'y avait que moi sur cette scène, j'ai pleuré à la réalité d'être la chose qui était à vendre et ça a fait monter le prix encore plus haut, comme s'ils se réjouissaient de me voir aussi misérables. J'ai été vendu. Apparemment j'ai été le lot le plus cher que les organisateurs avaient connu jusqu'ici. J'ai été vendu à un putain de cinquantenaire, et au vu de lorgnade salace quand il s'avançait pour me récupérer, je savais que ça allait mal se passer pour moi. Mais j'étais incapable de me défendre.
- V: Tu n'es pas obligé d'en dire plus mon amour je suis tellement fière de toi pour m'avoir raconté ton passé, ne te force pas à dire des choses que tu ne veux pas. Il renforce sa force opérée sur ma taille dans un élan protecteur et non possessif. Il me baigne de son aura douce et de son odeur qui me donne envie de rester comme ça pour toujours, en sécurité, où plus personne ne pourra me faire de mal. Les larmes s'échappent au ton qu'il emploie tellement aimant malgré la tristesse sous-jacente.
- Non je veux... J'ai besoin d'aller jusqu'au bout. Une petite goutte d'eau s'échappe et je ne laisse plus aucune trace de celle-ci en frottant mon visage contre ma manche. Il ne m'a rien fait jusqu'à ce que je prenne suffisamment de poids et que mon teint redevienne sain. Il a ajouté quelque chose dans ma boisson, j'avais les idées troubles et des vertiges. Après il m'a entraîné dans sa chambre, a arraché les vêtements qui ne laissaient rien au mystère, et m'a attaché à la tête du lit, je ne pouvais bouger ni les mains, ni les pieds, ni ma tête. Il a pris mon innocence ce soir-là, et tous les jours qui ont suivi, parfois plusieurs fois en une journée. Il m'a même vendu quelques heures à ses amis. Je ne pouvais que subir docilement chaque touche, chaque baiser sur mon corps auparavant vierge. Le seul répit que j'avais était quand je m'échappais, je pouvais respirer pendant quelques minutes avant qu'il ne me retrouve et me punisse à coup de ceinture, certaines fois à coup de clé à molette. Et je n'étais plus opérationnel pendant un temps bien trop court à mon avis. Je ne pouvais pas mourir, je m'en empêchais, j'avais tout perdu mais comme la boîte de Pandore il me restait l'espoir. Je voulais redevenir libre. À chaque occasion je fuyais de ma cage faite de malheur, de peur et de dégoût de moi. J'y suis resté deux ans, ma dernière tentative je m'en souviendrais toute ma vie. J'en ai eu assez de supporté ça, je savais qu'elle allait être la dernière, qu'elle échoue ou qu'elle réussisse. Les gardes qui m'ont retrouvé, je les ai tués. Je n'ai rien senti en le faisant, pas de tristesse, pas de satisfaction. Rien qu'un simple vide, je me suis acharné sur leur corps, pour ne qu'on puisse pas  reconnaître leur visage et que leur meurtre soit relié à moi. Je me suis retrouvé à vagabonder dans l'impasse où ils m'avaient retrouvé recouvert de sang de la tête aux pieds. J'ai croisé deux hommes, un petit au regard noir apathique et un autre gars immense aux cheveux blancs. Je pensais que c'était la fin, que je ne pourrai pas m'échapper alors j'ai mis le couteau sous ma gorge et leur ai demandé de partir. Je redeviens la même coquille vide de jadis, lorsque je n'étais qu'un enfant brisé qui nageait à contre-courant.
- V: C'était Yoongi et Namjoon ?
- Mes amis, mes sauveurs, mon destin. Ils m'ont emmené loin de ce cauchemar où j'étais réveillé et ont tout fait pour que je refasse ma vie et que je laisse toute cette merde derrière moi. 
- V: Je ne te laisserais plus rien t'arriver, je te le promets. Aussi longtemps que je vivrais, rien ne pourra t'atteindre. Alors que je me sens parfaitement bien, une contradiction s'opère; les souvenirs ressurgissent comme un raz-de-marée et m'emportent avec eux.
- Les images reviennent, fais-les partir.
- V: Comment?
- Embrasse-moi.
- V: Bébé tu n'es pas...
- Pas sain d'esprit, je ne suis pas alcoolisé, je ne suis pas déchiré et je suis consentant. Je ne vois pas ce qui te retient. À moins que tu ne le veuilles pas et je comprendrais vraiment, qui voudrait de..."

Prisonnier à plus d'un titreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant