Brusquement, elle douta. Sa confiance en elle et en ses propres besoins restait fragile. Aras était si gentil avec elle... Elle lui devait bien ça... Emménager avec lui ne pouvait pas être si terrible, si ? Même si sauter ce pas aussi vite la terrifiait. Après tout, elle avait failli tant de fois à prendre soin d'elle. Et lui n'avait jamais aucun doute sur ce qui était bon pour eux. L'idée de faire ce qu'il lui disait en mettant de côté ses propres besoins ne lui plaisait pas et lui laissait un drôle de goût amer. Mais elle le lui devait bien...
Ses ongles se crispèrent sur son poignet, s'enfonçant douloureusement dans sa chaire. La douleur lui fit prendre conscience de ce qu'elle faisait et elle cessa immédiatement. Ses émotions pouvaient être gérées autrement, elle le savait. Et Aras ne devait pas voir ça. C'est sa réaction glaciale qui l'avait plongée dans cette pulsion. Elle prit une grande inspiration qui la calma peu à peu. Elle avait résisté. C'était une victoire pour elle. Son premier réflexe aurait été d'en informer avec fierté Aras mais après un regard sur lui, toujours dos à elle, elle renonça.
Lorsque l'avion se posa, Aras n'avait toujours pas prononcé un seul mot. En voyant qu'elle avait froid, il lui avait posée une veste sur le dos avec une douceur infinie, mais aucun regard ni aucune parole. Son attitude plongeait Rosa dans la perplexité.
Il la conduisit jusqu'à sa voiture, conduite à l'aéroport par on ne sait qui. Comme à son habitude, il lui ouvrit la portière galamment puis se plaça à la place du conducteur.
Le début du trajet se fit dans un silence pesant. Aras avait une mine attristée, marquée par ses sourcils froncés. Il semblait plongé dans une profonde réflexion.
- Aras ?
Il ne l'entendit pas. La jeune femme de racla la gorge et réitéra son appel.
- Aras ! dit-elle un peu plus fort mais bien moins sûre d'elle que dix secondes avant.
Elle détestait cette impression de devoir le prendre avec des pincettes. Jamais il ne lui avait fait subir ce genre d'attitude.
- Mmm ? sembla-t-il brusquement revenir à lui.
- Où allons-nous ?
Il poussa un long soupir résigné.
- Chez moi. Attend avant de t'insurger ! anticipa-t-il la réaction de Rosa qui ouvrait déjà la bouche pour dire ce qu'elle en pensait en lui posant un doigt sur les lèvres. C'est juste le temps de te trouver un nouvel appartement.
- Ooh c'est pas vrai, tu es d'accord ! s'écria-t-elle toute excitée.
Aras sourit en voyant son enthousiasme. Elle se jeta à son cou, lui arrachant un petit rire, avant qu'elle ne s'éloigne pour le laisser conduire. La lumière qui brillait dans ses yeux et son magnifique sourire le convainquit qu'il prenait la bonne décision.
- Mais...
- Il y a un mais ? fronça-t-elle les sourcils.
- Il y en a même plusieurs, renchérit-il. Ton appartement ne sera pas à plus de cinq minutes en voiture, je visiterai les logements avec toi et je veux connaître ton proprio, on continuera à prendre tous nos repas ensemble, tu m'appelles immédiatement en cas de cauchemars ou n'importe quoi qui ne va pas...
On continue !
- Je te le promets, tout va bien se passer. Aie confiance en moi s'il-te-plaît, le rassura Rosa.
Aras esquissa un léger sourire, toujours plein d'appréhension. Lorsqu'ils arrivèrent devant sa maison, des nuages noirs obscurcissaient le ciel et de grosses gouttes commençaient à tomber. Il lança les clés à Rosa pour qu'elle aille ouvrir la maison pendant qu'il prenait les valises dans le coffre. Ils arrivèrent malgré tout trempés jusqu'aux os dans le hall.
- Je commence déjà à regretter l'Australie et sa chaleur... maugréa Aras.
La jeune femme arriva avec des serviettes chaudes trouvées dans la salle de bain. Elle se hissa sur la pointe des pieds pour essuyer ses mèches de cheveux dégoulinantes.
- Mais on a la tête pleine de beaux souvenirs, répondit Rosa avec un sourire.
Aras lui répondit par un sourire, happé par son charme. Elle ignorait ce qu'il lui arrivait, mais elle avait une terrible envie de le toucher. Une envie similaire à celle ressentie en pleine mer de Tasman.
L'homme, à chacun de ses gestes, s'étonnait de la douceur qu'elle pouvait y mettre. Elle se décidait enfin à lui montrer son autre facette, celle où elle baissait entièrement sa garde. Ces moments lui étaient si doux... Il la vit approcher lentement son visage du sien, son regard alternant entre ses yeux à lui et sa bouche. Elle hésitait. Aras n'osait faire aucun mouvement, de crainte de lui faire peur et de réfréner son audace. Il sentit sa respiration s'accélérer, troublé par sa proximité et sa beauté. Son envie d'elle grandissait de seconde en seconde, à la vitesse de l'éclair. Et le désir de Rosa montait également en flèche. Mais il se retiendrait. Si mener les choses la rassurait, il le lui accordait de bonne grâce. L'idée de l'effrayer lui était insupportable.
Finalement, elle posa ses lèvres sur les siennes en fermant les yeux. C'était des sensations qu'elle avait oubliées. Rosa était persuadée que ça lui rappellerait de mauvais souvenirs, souvenirs de sa période où elle s'enfonçait peu à peu dans l'anorexie. Mais tout allait bien. Elle se sentait parfaitement bien.
Elle rouvrit les yeux en sentant les mains de l'homme se glisser dans sa nuque pour accentuer leur baiser. Au prix d'un gros effort, elle s'efforça de se détendre à nouveau. Il ne faisait rien de mal, et elle souhaitait être touchée ainsi, tenta-t-elle de se convaincre. La différence, c'est que ses gestes n'étaient pas brusques. Pas de violence, rien de déplacé. Au contraire, ils étaient empreints de toute la douceur du monde. Elle n'y était pas habituée. La jeune femme se perdit dans leur baiser, au milieu d'une bulle douce comme du coton.
Elle s'y habituerait, c'était certain... Même plus vite qu'elle ne l'aurait pensé.
Les gouttes d'eau de leurs cheveux glissaient et se mêlaient à leurs cils. Il la souleva du sol tandis qu'elle s'accrochait autour de son cou, et basculèrent sur le canapé. Leurs gestes devenaient fébriles tandis qu'ils se découvraient chacun.
Soudain, un brusque sursaut la secoua. Il venait de passer sa main sous son pull en lui effleurant le ventre. Sentant son malaise, il cessa immédiatement son geste en cherchant son regard. La frayeur qu'il y lut le remplit d'inquiétude. Avait-il été trop loin ?

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Effervescence
RomanceCe qu'elle cherchait, c'était blesser. Mais qui se cache réellement sous cette apparence superficielle et méprisable ? Qui se cache sous cette barrière infranchissable ? A la sortie de l'hôpital psychiatrique où Rosa est internée pour anorexie, la...