• CHAPITRE VINGT-TROIS •

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— H —

Je dois fournir un effort considérable pour me contenir et ne pas réduire son visage en bouilli. Ce connard de première crache dédaigneusement du sang sur mes chaussures avant de s'en aller, une main fermement agrippée à son nez. Quel petit fils de... La respiration saccadée de la ballerine me ramène à elle. Je ne peux pas laisser la colère prendre le contrôle dans un moment pareil alors qu'elle semble à deux doigts de s'évanouir.

— Angelina, je l'interpelle aussi calmement que ma voix me le permet.

— Tout va bien, lâche-t-elle rapidement.

Non, ça ne va absolument pas ! Comment une telle chose a-t-elle pu se produire ? Que se serait-il passé si je n'étais pas intervenu à temps ? Mon sang s'enflamme dans mes veines à cette pensée. Stephen et le service de sécurité entier ne feront plus partie des effectifs dès demain matin ! Tous des putains d'incapables ! Ses doigts glissent sur sa lèvre fendue et elle retient de justesse un gémissement. Non... cela ne va décidément pas.

— Viens.

— Ça va, je vous dis ! fulmine-t-elle en essuyant le filet de sang sur son menton avec le dos de sa main.

— Peut-être, mais je préfère tout de même jeter un coup d'œil à ta blessure.

— Quoi ? Vous craignez que j'ajoute cet événement à la longue liste des choses pour lesquelles je devrais finalement intenter un procès ? 

Je ne sais pas si elle est sérieuse ou non, mais sa réponse me donne envie de ricaner.

— Je crains surtout que cela te laisse une vilaine marque sur le visage ou pire encore que cela s'infecte.

Un soupire de résignation s'échappe de ses lèvres tandis que je lui emboîte le pas. Mon cœur bat si fort que j'ai l'impression que n'importe qui dans le club pourrait l'entendre malgré la musique. Ma colère est si glaciale que j'en frissonne. Le monstre quant à lui n'est pas du tout content d'avoir été mis de côté et il me le fait savoir en tambourinant tel un forcené contre mon crâne. Je lui laisserai tout le loisir de s'exprimer une fois que j'aurai terminé de gérer ça avec le sang-froid dont un patron doit faire preuve dans ce type de situation. Nous arrivons devant le bureau de Stephen et j'entre sans même frapper. La simple vue de cet écervelé ravive ma colère. Je règlerai son cas plus tard.

— Dehors ! j'aboie plus que je ne parle.

Surpris, il cligne plusieurs fois des yeux sans trop savoir qui de nous deux regarder.

— Bonsoir, Monsieur Reed.

— Je ne me répèterai pas.

Une pure incompréhension déforme ses traits, mais je ne compte pas lui donner d'explications pour le moment. Il devrait vite déguerpir d'ici avant de servir d'exutoire au monstre. Je suis tellement à bout de patience que je serais capable de lui envoyer mon poing dans la figure simplement parce qu'il respire. Lorsqu'il quitte la pièce, j'expire enfin tout l'air que j'ai dans les poumons.

— Je dois y retourner, lâche-t-elle de but en blanc.

— Pardon ?

— Écoutez, je suis fatiguée. Je veux juste terminer cette soirée et rentrer chez moi.

Je pianote rapidement sur la tablette du bureau avant de reporter mon attention sur elle.

— Tu ne regagneras pas ton poste ce soir.

— Ce n'est pas à vous de choisir ! se révolte-t-elle.

— Eh bien, figure-toi que si. Je sais que tu penses que les barrières entre nous sont floues, mais elles ne le sont pas. Étant le patron de ton employeur, je suis donc également ton patron pour rappel. Si je décide que tu n'iras pas travailler, alors tu n'iras pas travailler, point final.

BALLERINAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant