• CHAPITRE QUARANTE HUIT •

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— A —

Après avoir quitté l'appartement de Monsieur bleu acier, je rentre directement chez moi, épuisée. Tout ce dont j'ai envie, c'est de me jeter dans mon lit et dormir quelques heures pour récupérer. Cependant, les garçons ont d'autres plans et me le font savoir dès que je franchis la porte. Ils me proposent de passer l'après-midi à regarder des films ensemble. Malgré la fatigue, leur programme est alléchant, je capitule facilement et vais chercher ma couette et mon oreiller pour me lover sur le canapé près d'eux.

Nous sommes avachis les uns contre les autres depuis près d'une heure, quand Alec brise soudainement le silence d'un ton faussement désinvolte :

— Angy, au train où tu découches je vais pouvoir récupérer ta chambre

— Je te demande pardon ? je rétorque sur la défensive.

— C'était une blague Angy. Tu as perdu ton sens de l'humour ou quoi ?

Il se lève pour aller chercher une bouteille de vin, tandis qu'Evan m'observe d'un air énigmatique. J'ai l'impression qu'il tente de percer mes pensées. Je me demande si Alec cherche à semer le trouble ou si je suis devenue paranoïaque depuis notre conversation précédente.

— Angy, est-ce que tu as déjà songé à ce que tu ferais si tu n'étais pas acceptée à la Juilliard ?

Je suis prise de court par la question d'Evan et je me mets à réfléchir. Jusqu'à présent, je n'avais jamais envisagé l'option d'un échec. Même lorsque j'ai chuté, je ne me suis pas posé cette question.

— Aucune idée, je lui réponds alors honnêtement.

Alec revient, j'attrape un verre et je le bois d'une traite. Au regard que les garçons échangent, je comprends que je l'ai terminé bien trop vite à leur goût. Le générique de fin démarre et je m'en sers un autre que je finis tout aussi rapidement. Je leur souhaite une bonne soirée et prétexte que je n'ai pas faim avant d'aller m'effondrer sur mon lit. Il n'est que dix-neuf heures, mais si je ne m'endors pas tôt, je ne réussirai jamais à survivre jusqu'à la fin de la semaine.

***

Je me redresse dans mon lit, les yeux fixés sur l'écran de mon téléphone. J'ai l'impression que le temps s'est arrêté et que je suis en train de vivre un rêve éveillé. Je suis admise à la Juilliard School! J'ai envie de pleurer de joie et de hurler ma victoire à la face du monde entier. Je suis admise à la Juilliard School! Je répète ces mots comme pour me convaincre, comme pour être sûre que ce n'est pas un mirage. Je suis tellement heureuse que je pourrais m'évanouir. Je sais que ce n'est que le début de l'aventure et qu'il me reste encore beaucoup à faire, à apprendre et à surmonter, mais je suis prête à relever le défi. Je dois annoncer la nouvelle! Je me donne une petite claque pour sortir de ma torpeur, puis j'attrape mon téléphone et compose à toute vitesse le numéro de Kris. Elle décroche aussitôt et je lui hurle ma victoire à l'oreille. Elle crie de joie à son tour, c'est une victoire pour moi, mais aussi pour elle. Evan entre en trombe dans ma chambre, l'air inquiet, mais en voyant mon sourire béat, il comprend immédiatement ce qui se passe. Sans un mot, il s'approche de moi et m'enveloppe dans ses bras. Son étreinte est si forte que je sens mon cœur battre à l'unisson avec le sien.

— Angy, souffle-t-il à moitié endormi. Je suis tellement heureux pour toi.

Et sans prévenir, ses lèvres se posent sur les miennes dans un baiser léger et rapide. Il a la décence de reculer immédiatement, conscient de son geste.

— Oh merde, murmure-t-il, décontenancé.

Je suis tout aussi surprise que lui. J'entends Kris en fond sonore, mais je suis incapable de me concentrer sur sa voix. Nous nous fixons en silence, lorsqu'un raclement de gorge nous ramène à la réalité. Sans réfléchir, je raccroche au nez de Kris, encore sous le choc.

BALLERINAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant