— A —Je suis prête à parier qu'être coincé avec Hayden Reed dans un ascenseur est le rêve ultime de la moitié des créatures aux longues jambes de New York, mais pour moi cela vire plutôt au cauchemar. Il me rend mon téléphone et se retourne pour s'appuyer de nouveau fermement aux parois, à la différence près qu'il y colle son front également cette fois-ci. Ses mains encadrent sa tête en prenant possession de l'espace et à leur crispation je me demande si le fait d'être enfermé le met mal à l'aise.
— Êtes-vous claustrophobe ?
— Qu'allez-vous chercher ? s'agace-t-il en gardant la même position.
— Votre humeur est massacrante et vous êtes encore plus tendu qu'un arc.
La cabine est bien trop petite pour qu'il feigne de ne pas m'avoir entendu et malgré tout il ne se donne pas la peine de me répondre.
— Ce n'est pas un drame de vous montrer vulnérable, vous savez.
Il éloigne assez sa tête pour que nos regards se retrouvent dans le miroir. Le bleu de ses yeux est si profond qu'il me laisse sans voix. Je n'ai pourtant aucune idée de ce qu'il peut bien penser en ce moment.
— Vulnérable ?
— Vous avez le droit d'avoir peur.
C'est un comble ! Je suis très mal placée pour donner ce genre de conseils à quelqu'un.
— Peur ? répète-t-il en se retournant.
— Descendez-vous d'une famille de perroquets, Monsieur Reed ?
— Non. Quant à vous descendez-vous d'une famille de...
— Vous devriez vous arrêter là, je l'interromps.
— J'avais cru vous avoir demandé de ne pas me couper la parole de la sorte.
Je vois bien que quelque chose ne va pas et qu'il fait son maximum pour ne rien laisser paraître, mais il est hors de question qu'il passe ses nerfs sur moi. Je le lui fais donc comprendre.
— C'est vrai. Cela dit, vous vous apprêtiez à dire quelque chose de mesquin et soyons honnêtes, je vous aurais rendu la pareille au centuple et cela n'aurait eu que pour effet d'exacerber encore plus votre irritation.
— Parce que, vous croyez sincèrement pouvoir vous mesurer à moi, Mademoiselle Carter ?
— Oh, vous donnez de nouveau dans le Mademoiselle Carter ?
— Vous donnez bien dans le Monsieur Reed continuellement, non ?
— C'est une marque de déférence comme une autre.
— De déférence ? Laissez-moi rire. Le dédain coule dans chacun des mots que vous employez avec moi en temps normal.
— À qui la faute ?
— À vous, Angelina. À vous.
— C'était une question rhétorique.
Il se pince l'arête du nez et soupire si fort que je ne pense pas qu'il reste assez d'air dans ses poumons pour faire fonctionner son corps normalement. J'ai une effroyable envie de ricaner, comme bien souvent en sa présence. En même temps, la probabilité pour que cela nous arrive était presque nulle. Sur quatre ascenseurs, il a fallu que nous montions dans celui-ci. Il braque sur moi un regard noir, mais je ne me dégonfle pas pour autant et je lui fais fièrement face. L'espace paraît se rétrécir à vue d'œil et cette sensation empire quand il se rapproche de moi.
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BALLERINA
RomanceAngelina Carter et Hayden Reed n'ont en apparence rien en commun, si ce n'est une détermination farouche à réaliser leurs rêves. Alors qu'elle ne vit que pour le ballet et qu'elle s'y abandonne corps et âme, il n'a de considération que pour l'empir...