Chapitre 36-Soirée au château (1/2)

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Mathilde

— Oh, ma pauvre. Quelle enfant ingrate ! Tu as passé une soirée horrible, m'exclamé-je en feignant la compassion.

Au bout de la ligne, la mère de Camille ne cesse de geindre et j'ai du mal à garder mon calme. Elle me soule. Cette femme est le reflet de ma génitrice. J'ai presque de la peine pour cette garce. Je dis bien presque, car Camille demeure ma pire ennemie.

Ces gens ont tout et trouvent encore des griefs à la vie. Pauvre chou ! Son père la rejetait car elle n'avait pas l'instinct maternel. Pourtant, aujourd'hui, elle vit à ses crochets.

Le mien ne m'adresse plus la parole depuis qu'il a vu mes aveux filmés par cette foutue DSH. Cette pensée nourrit ma colère. Mon sang bouillonne dans mes veines. Non contente de me voler mon idée et donc mon entreprise, elle prend aussi ma place auprès des Keys. Michelle, ma demi-sœur,  a eu au moins le tact de mourir jeune et sans être aide. Cette blondinette ne me rendra pas la chose aussi aisée. Au centre, j'ai raté son frère. Malgré tout, la partie continue à tourner en ma faveur La belle a enfin quitté son bunker parisien. La partie peut reprendre.

Lors de ma rencontre avec sa mère, Céleste, j'ai eu du mal à freiner mon ressenti. Sa ressemblance physique avec sa fille, jusqu'à sa voix, est choquante et a mis ma volonté à l'épreuve. Je n'avais guère d'autre choix que de m'en faire une amie alors que je voulais lui tordre le cou. Une sorte de vengeance par procuration.

De tous les Delalande, Céleste était la plus simple à aborder. Victor, le grand-père, ne quitte son domaine que pour aller chasser avec ses chiens. Boss, son Fila Brasilero, ne le quitte pas. Cela m'a dissuadée de l'approcher. Même avec un fusil de chasse, je ne suis pas sûre de pouvoir viser le clébard. Avec ma chance, je me tirerais dessus. De plus, Victor n'est pas un petit vieux facile à amadouer. Il faut du temps et je n'en ai plus trop. Mes finances commencent à souffrir. Mon père a refusé de combler les faillites des entreprises pourries que Camille m'a refilé. L'argent l'étouffe mais il refuse de m'aider. Il me punit alors qu'il est l'unique coupable de ma vie de merde. Il ne m'a jamais aimée. Je demandais juste un peu d'affection, d'arrêter de vivre dans l'ombre de ses prodigieux enfants.

Si Camille avait su tenir sa langue, il aurait été beaucoup plus conciliant. Mais, non contente de me voler mon héritage, elle a tout déballé à mon père.

La voix de Céleste bourdonne dans mes oreillettes. Mes doigts libres appliquent du vernis rouge à mes orteils. Je prévois toujours quelque chose à faire quand elle m'appelle. Ses conversations futiles durent des heures. Depuis l'accident, et sous les ordres de son père, Céleste ne peut plus sortir et s'amuser. Les paparazzis effraient le papy. Il s'imagine les gros titres peu valorisants pour sa famille :

« Céleste Delalande-Saint Honoré danse pendant que son fils se bat contre la mort. »

De toute sa vie, elle n'a jamais travaillé. C'est à peine si elle est allée à l'école. Les paillettes l'attirent plus que les chiffres. Son seul atout est sa beauté. Jolie poupée, elle assiste à tous les événements importants du groupe DSH. En contrepartie, elle bénéfice des avantages financiers de son illustre famille. Cela me semble pathétique. Elle, elle s'en amuse. Une femme d'un autre temps !

Nous nous sommes rencontrées à un vernissage au profit des accidentés de la route où j'ai déboursé une fortune que je n'avais pas. Le destin est moqueur. Il a fallu un beau chèque pour que Céleste daigne me parler. Obligée de me remercier, elle m'a tendu une main molle. Elle ressemblait tant à ma mère que je savais parfaitement quoi dire, quoi faire pour éveiller son intérêt. Nous sommes reparties ensemble de la soirée. Depuis, je suis devenue son amie, sa confidente. C'est tellement rafraichissant pour elle d'être avec une jeune.

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