Chapitre 21- Détruits (2/2)

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Gabriel

Rien d'exceptionnel ! Je suis loin d'être d'accord avec elle mais sans me laisser le temps de lui répondre, elle met un peignoir et sort. Même si elle est menue, que ses formes sont discrètes, le corps de Sasha me donne des tonnes d'idées. Elle n'est pas arrivée à éteindre mes envies, mais bien à les attiser.

Si je souhaite atteindre mon nouvel objectif, il serait judicieux de quitter ma forme d'homme de Cro-Magnon.

Devant le miroir et malgré une bonne douche, je constate les dégâts : une barbe mal taillée et des cheveux qui font de l'ombre à ceux de mon frère. Mon ventre, mes bras, mes pectoraux, tous sont devenus flasques. Y a du boulot mec, avant qu'elle ne tombe dans ton lit ! Si j'étais une femme, je passerais mon chemin en me voyant et ce sans aucun regret.

À mon retour dans le salon, un comité m'attend. Un coiffeur me fait signe de m'installer et à peine assis, le barbier s'active sur mon visage. La manucure, c'est pour elle. Cette femme ne perd jamais son temps. Je la reconnais bien. Elle est au téléphone et échange en français avec son interlocuteur tout en tendant sa main déjà impeccable à l'esthéticienne. Un chasseur entre et lui apporte son nouvel ensemble. Elle le remercie et m'interpelle enfin.

- Je vous ai mis un engagement de confidentialité sur la table. Merci de me le signer.

- Encore des ordres.

- J'adore vous donner des ordres, Gabriel.

Elle me sourit et, après avoir validé le travail de l'experte sur ses ongles maintenant recouverts de vernis noir, me tend un stylo. Sans lire un mot, je signe.

- Vous n'avez toujours pas appris de vos erreurs, Monsieur Keys.

Monsieur Keys ! Mais où est passé son « Gabriel » de tout à l'heure ? Pourquoi remet-elle de la distance entre nous ?

Mon cœur s'emballe, ma respiration s'accélère. Fébrilement, je lis le document mais je n'y vois rien d'anormal. Je me suis engagé à ne pas divulguer les informations que l'employeur de Sasha va me fournir. J'ai signé maintes fois ce genre de documents par le passé. Celui-ci ne diffère en rien des autres.

Elle éclate de rire quand, enfin, je comprends sa blague de très mauvais goût.

- Je ne vous ferai jamais ça, Gabriel.

Bon sang ! Pourquoi je ne peux pas m'empêcher de la croire ?

🌹

Raphaël

Le vent souffle dans mes boucles qui, maintenant, me caressent les épaules. Depuis mon départ, la mer est devenue mon unique compagne, changeante parfois, apaisante souvent. Je maîtrise enfin le catamaran après avoir connu des moments difficiles comme si le bateau lui-même avait voulu m'empêcher de m'éloigner d'elle.

Je reste très peu de temps à quai, juste le minimum pour m'approvisionner de choses que la nature ne peut m'offrir. Mon corps n'a jamais été aussi bronzé, halé par des heures de navigation. Il s'est sculpté grâce aux nombreuses chasses sous-marines. La plongée m'apaise et mon esprit semble serein dans cet univers de faux silence. Après des années de bruit urbain et de musiques trafiquées, c'est le son pur de la nature, nature indomptée et merveilleuse qui m'attire. J'ai appris le créole, le champ des mouettes, le roulement des vagues.

Lors d'un mouillage, James, le majordome fidèle de la maison Keys, était venu me rejoindre et m'avait rapporté ma guitare, dernier cadeau de ma mère et compagne de tous mes voyages. Pendant une semaine, nous avions navigué ensemble comme de vieux loups de mer, comme deux amis. J'avais cuisiné des langoustes sous l'œil ébahi du vieil homme. Il n'avait jamais été servi par un de ses employeurs de toute sa vie et surtout, il connaissait mon niveau en cuisine.

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