Chapitre 11: Punition

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Camille

Brusquement, je tournai la tête à m'en faire mal aux cervicales.

— Je ne sais pas à quoi vous jouer mes tourterelliaux et ce n'est presque pas mes affairos.

Stan inventait de jolis mots. Le rhum commençait à chauffer et ses barrières étaient en train de se briser l'une après l'autre. Mes mains se crispaient sur mes cuisses attendant sa prochaine attaque, prête à tirer à boulet rouge sur mon adversaire.

— Je n'ai rien contre le fait que tu sois ma futuro belle-sœur mais il faudrait tenir au courant Gabrielio de votre coup de tonnerro. Parce que sinon, tu n'auras aucun des frérots. Rien du tout, je te dis. Pas le moindre frérot à l'horizon. Adieu, Madame Camillo Keys. »

Là, Stan ne m'amusait plus du tout malgré le rajout de tous ses jolis O dans ses phrases. Mes yeux le fusillaient mais ivre, il ne vit aucun des signes de ma tempête intérieure. Jamais personne n'avait osé me parler ainsi. Mais jamais aussi, je n'avais joué ce rôle auparavant. 

Alerté par mon changement d'attitude, Raphaël s'approcha de nous pour s'interposer. Il n'avait rien entendu mais ce n'était pas trop difficile de deviner la nature de notre échange. Je tentais de garder mon calme pour mon beau blond mais j'avais une furieuse envie de jeter son copain par dessus bord, et si les deux Stéfies pouvaient suivre, j'enverrais tout ce petit monde aux requins. Il devait bien y en avoir quelques-uns dans le coin, prêts à me rendre service. Raphaël capta mon regard et son calme se déversa dans mes veines.

— Nous sommes bientôt arrivés et tu me dois toujours une danse, dit-il pour détourner mon attention.

— Et toi, tu me dois une leçon, dis-je soudain apaisée par cette voix si sexy.

— Stan, peux-tu mettre le son ?

Levant son verre de rhum, son ami nous salua dans une révérence loupée. Titubant, il ordonna à Raoul de faire hurler la musico. Comme dans une corrida, Raphaël et moi nous nous jaugions. Je me rappelais parfaitement notre danse d'hier soir. J'attendais autant que je l'appréhendais cet instant où nos deux corps allaient se retrouver. Autour de nous, les notes latines raisonnèrent. Nos pas précis se répondaient, s'enchaînaient. Chacun étant le reflet de l'autre. Le rythme s'accélérait et nous nous rapprochions sans pour autant nous toucher. Qui céderait en premier ?

Faisant demi-tour, je m'appuyai contre son torse nu et musclé. Je le sentis lever les yeux au ciel afin de garder un semblant de contrôle. Mais si proche de lui, il ne pouvait pas me cacher ses intentions et je me mis à sourire, heureuse de l'effet que j'avais sur lui. Mes cheveux le caressaient, prolongeant l'enfer que je lui offrais. Sa peau caramel contre ma peau ivoire, il se laissait faire. 

Me prenant la main, il me retourna pour stopper son doux supplice. Les pas de la Bachata sensuels et envoûtants nous rapprochèrent enfin. Son sourire répondait au mien qui ne me quittait plus. Jamais loin l'un de l'autre, comment pouvait-on stopper une attraction pareille ? Devais-je me réjouir de l'avoir rencontré ou devais-je en avoir peur ? Cet instant avait un goût d'éternité mais le bonheur n'était jamais éternel. 

Dans les bras de mon fou, prisonnière de son regard, je perdais ma raison au moment où j'en avais le plus besoin. Je ne connaissais pas ce jeu. Mes émotions et sentiments avaient toujours pu être muselés. J'en avais fait ma marque de fabrique. C'était dans mes gênes. Et lui, sans remords, me mettait en échec. J'étais sans frein. Je voulais mordre toutes celles qui s'approchaient de lui, mettre à terre ceux qui s'opposaient à cette attraction, le garder auprès de moi comme mon trésor le plus précieux.

Nous dansions comme si nous étions seuls. Les musiques se succédèrent et nos souffles à défaut de nos lèvres, s'enlacèrent. Je restais contre lui, infatigable. Les mots étaient inutiles. Je vivais ce moment comme si demain n'existait pas, comme si plus rien n'existait. Un mensonge mais cela me faisait tellement de bien. Son visage était mon seul paysage, beau et effrayant.

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