Chapitre 13: Nuit fauve

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Raphaël

Les vagues berçaient paisiblement le bateau. Une douce musique sortait des hauts parleurs. De temps en temps, j'observais le ponton. Viendra-elle ? Sera-elle accompagnée ? Je leur avais donné rendez-vous à dix-neuf heures. La fête aurait lieu sur une île louée par un pseudo acteur. Nous aurions pu y aller en hélicoptère, mais en informant Gabriel de cette possibilité, j'aurais pris le risque qu'il nous accompagne.

Je sentis sa présence avant même de la voir. Une déesse aurait eu moins de grâce qu'elle. Ne me quittant pas des yeux, elle avançait d'un pas chaloupé. Sa combinaison pantalon blanche était une véritable provocation avec ce décolleté descendant jusqu'à sa taille, dévoilant la naissance de ses seins et son nombril parfait. Ses cheveux relevés en chignon, où de jolies mèches descendaient en cascade, encadraient son visage angélique. À chaque apparition, elle me faisait encore plus chavirer. Jamais je n'aurais cru cela possible.

Elle était belle. Personne ne pouvait le nier mais j'étais certain que ce n'était pas cela qui expliquait cette attirance brutale. Face à elle, je me faisais l'effet d'une bête incapable de retenir mes instincts animaux, d'une brute face à tant de perfection. Le doute n'avait jamais été mon compagnon et pourtant, une question me taraudait : suis-je capable d'attirer une telle sirène, de la garder dans mes filets ? Je me noyais dans ses yeux, incapable de garder le cap de la raison, tel un bateau à la dérive dans la tempête causée par cette nymphe. Je naviguais sans boussole, conscient du danger mais incapable d'arrêter ma course, attiré par ce diamant.

Retirant ses tropéziennes, ma belle-sœur se hissa sur le bateau d'un geste souple, se tenant parfaitement sur ses appuis, envahissant mon dernier refuge. Camille dominait de maîtrise comme la première fois où je l'avais vue sur la piste de danse. Ce soir, elle était différente, tout en étant elle. Me mordant la lippe inférieure pour me retenir de l'embrasser, excité par cette assurance faite femme, je tentai de me concentrer sur autre chose que le joli ourlet de ses lèvres et l'invitation de ses seins à être caressés. Sa poitrine était parfaite pour mes mains agiles de musicien. Je rêvais de faire chanter ma sirène. Je devenais fou, cinglé en sa présence. À chaque apparition, elle était plus sexy, plus bandante.

- Est-ce qu'un jour tu m'as dit la vérité ? Pourquoi ai-je l'impression que tu sais aussi bien naviguer que danser la bachata ? lui demandai-je d'une voix rauque.

Avec un sourire de prédatrice, elle s'approcha de moi et sans me laisser le temps de lui poser d'autres questions, ma tentatrice me frôla et se dirigea vers le cockpit. Elle s'installa devant le volant, s'autoproclamant capitaine de notre équipage. Elle fit un grand geste vers le domaine, saluant Gabriel au loin. Lui, je ne l'avais pas repéré. Malgré la distance, je pouvais voir qu'il nous observait, immobile. Fin joueur, je le saluai à mon tour.

- Où sont tes amis ? questionna-t-elle en démarrant les moteurs, après avoir vérifié que toutes les voiles étaient bien repliées.

- Je ne suis plus si sûr que cela de vouloir t'amener à eux, petite menteuse. Je te trouve beaucoup trop sexy quand tu manœuvres.

- Tu n'as pas peur d'être cabané (1).

- Mais tu l'as déjà fait. 

Ma déclaration la fit sourire. Mais elle n'épilogua pas, me laissant à mes doutes, et se concentra pour manœuvrer le passage en haute mer. Étais-je le seul à ressentir toute cette électricité entre nous ? Peut-être que oui mais elle était venue. Me considérait-elle comme un beau-frère à mieux connaître, un ami depuis que j'avais vu son tatouage scarifié ou ... plus ?

Obéissant à sa nouvelle maîtresse, le bateau s'éloigna de la propriété et glissa sur l'eau calme. Camille dirigeait le catamaran sans difficulté sous mon regard autant étonné que fier. Ma sirène était un marin expérimenté. Je lui présentai notre feuille de route et lui indiquai un point d'ancrage. Elle maîtrisait le vocabulaire maritime et suivit mes instructions à la lettre. Elle m'avoua qu'elle possédait le permis hauturier. Ses compétences me confirmaient qu'elle ne me mentait pas. Elle était décidément parfaite. Sans sortir ses crocs, cette fois-ci, elle accepta ma veste, et je ne pus m'empêcher de l'admirer quand elle retroussa les manches pour la mettre à sa taille. Elle paraissait si fragile dans mes vêtements trop grands, et si forte quand ses yeux émeraudes se posèrent sur moi avec cette assurance qui ne la quittait presque jamais. Elle avait rehaussé son regard vert lumineux d'un trait d''eyeliner noir qui la rendait encore plus magnétique. Hélas, nous arrivions, et je regrettais que notre destination fût si proche.

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