Chapitre 43: Désespoirs

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Camille

D'abord un petit bruit, puis un couinement plus proche. Je ne sais pas si mes yeux sont ouverts ou fermés tant il fait sombre. Une douceur anormale caresse ma cheville. Surprise, je crie en lançant un coup de pied dans le vide. Il y a bien des rats dans ma cellule. Incontrôlables, mes dents claquent de froid, de peur. Une ombre se dessine sur ma droite formant des spectres. Je peine à faire la mise au point sur cette apparition. Des fantômes dansent devant moi. J'évite de les toucher persuadée que si je les frôle, je me perdrai pour toujours dans l'obscurité . 

Enfin, les barreaux se forment sous l'effet de la lumière qui s'approche. Mathilde ouvre la porte. Elle m'éblouit sadiquement le visage avec le halo de sa torche. Tout en ricanant, elle me jette une couverture que je m'empresse de prendre. 

— C'est le dernier cadeau que je t'offre, m'informe-t-elle. Je ne supporte plus de t'entendre grelotter.

Elle allume plusieurs bougies. Les plafonds sont bas et recouverts de toiles d'araignées. Les murs suintent d'humidité. Je replie mes jambes contre mon torse. J'ai besoin de trouver un peu de chaleur dans cet environnement hostile. Ses petits yeux noirs de hyène me guettent. Sa lèvre se replie et forme un sourire asymétrique, diabolique. Elle attend que sa proie flanche. Son silence pesant est encore plus menaçant que cet endroit de désolation. Cachée sous la couverture, ma main se porte à mon pendentif mais je ne l'ai plus. Ma réaction ne passe pas inaperçue auprès de mon bourreau.

— Où est-il ? dis-je affolée.

— Ah ! Notre Rose daigne enfin me parler.

— Où as-tu mis mon collier ? répété-je.

— Ton porte-bonheur ne te sera pas utile ici.

Son visage, à l'opposé du mien, rayonne d'une joie victorieuse. Elle ne sait pas l'importance de ce collier. Elle a juste voulu me voler un bijou auquel je tiens. Pathétique ! J'espère qu'elle ne l'a pas trop éloigné de moi ou pire, brisé.

Une première contraction traverse mon corps. Je ferme les yeux et garde mon calme. Le bébé doit ressentir ma nervosité, ma peur, ma frayeur. Je dois le rassurer. Mon absence a dû déjà actionner le plan Castel. Ils vont me retrouver. En attendant, je dois rester la plus détendue possible. Le stress est dangereux pour mon enfant. Je contrôle ma respiration et quand je me sens prête, j'ouvre à nouveau les yeux.

— Combien de temps penses-tu que cela devrait durer ?

La question de Mathilde m'interpelle. Dois-je choisir la durée de ma détention ?

— Ton accouchement. Combien de temps va-t-il durer ? s'énerve-t-elle.

— Je ne vois pas en quoi cela te concerne.

— En tant que ta sage-femme, jolie fleur, cela me concerne tout à fait.

— Aurais-tu changé de métier ? ironisé-je.

Elle s'installe sur l'unique chaise et me toise.

— Comment a-t-il réagi quand tu le lui as appris ? me demande -t-elle en posant ses coudes sur ses genoux.

— Qui ?

— Mon père. Comment le grand Aron a réagi quand il a su que tu attendais l'enfant prodige de son fils chéri ?

Je fronce les sourcils. Elle passe du coq à l'âne comme si elle peinait à tenir une conversation cohérente. Serait-elle sous médocs ?

Sa voix hargneuse et son regard de prédatrice ne laissent aucun doute sur la haine profonde qu'elle nous voue à Gaby et à moi. Je ne m'abaisse pas à répondre à ma geôlière. Je la laisse à ses interrogations malsaines. Mais face à mon mutisme, elle crie plus fort sa question, faisant fuir les bêtes qui s'approchaient sournoisement de nous. Elle vise mon ventre avec son arme ne laissant aucun doute sur ses intentions.

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