XXXVIII

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22 Décembre. 20H11.

Le Single Malt. Bar irlandais.

Salt Lake City.




Le binôme de super flics, constitué de Perlmann et Bensousan, entra dans ce vieux pub irlandais dont les vapeurs de breuvage empestaient jusqu'au coin de la rue. L'enseigne était plutôt vieillotte et ne présageait rien de bon. Dans quel bourbier risquaient-ils de se retrouver ? Mais pour protéger l'anonymat et la sécurité de l'indic de Perlmann, ils avaient préféré le rencontrer dans un lieu à l'écart de leur territoire de chasse. Au moins, là, personne ne risquerait d'y reconnaître des agents du FBI, encore moins deux flics affûtés et expérimentés tels que ces deux-là. Pour l'occasion, ils avaient opté pour une tenue moins réglementaire, ayant échangé la cravate et le costume pour un ensemble plus décontracté et sportif.

Dans leurs tenues civiles et décontractés, ils passaient inaperçus. Il franchirent le pas de la porte d'entrée et se firent happer par un nuage de fumée et les braillements des occupants qui entretenaient des discours politiques animés par une alcoolisation excessive. Ils traversèrent la salle, longeant le bar en zinc où le patron, un homme de forte corpulence avec une barbe à la ZZ-TOP et une chemisette en tartan mal ajustée à son imposant physique, transpirait à grosses gouttes. Il s'empressait de servir d'impressionnantes chopes de bière.

Les deux hommes se frayèrent un chemin parmi tous ces ivrognes et se réfugièrent autour d'une table à l'écart, dans un coin de la pièce, près d'une porte dérobée qui donnait vraisemblablement accès à la rue de derrière. Ils attendirent l'arrivée du compère, prêt à les lancer sur une nouvelle piste.

Au bout de quelques minutes, un individu à la démarche peu assurée fit irruption dans le bar. Jeans, rangers, un sweat trop large dont la capuche lui enveloppait le visage, une veste de treillis, l'homme traversa la salle tout en lançant de rapides coups d'oeil ici et là à la recherche de quelqu'un.

Perlmann le reconnut et lui fit signe. Ils se saluèrent et s'installèrent autour de la minuscule table ronde. Le flic présenta son collègue, ce qui rassura l'indic sur les intentions des deux hommes. Se trouvant dans un endroit inconnu de ses contacts, à plusieurs pâtés de maisons de son quartier, entouré d'un duo d'agents fédéraux, il se sentait rassuré.

Une serveuse se présenta pour prendre leur commande. Ce fut bref et précis, ils n'étaient pas là pour se délecter d'un breuvage particulier, aussi ils commandèrent le standard des lieux ; trois bière brunes. Puis, la conversation sérieuse démarra.

Alors ! C'est quoi cette histoire ?Quoi ! Tu m'a dis que si j'avais des infos, il fallait que je t'appelle. C'est ce que j'ai fais.Me prends pas pour un con, cela la fout mal devant mon collègue.

Perlmann semblait énervé. Il ne mâchait pas ses mots, alors qu'habituellement, il était plutôt à l'écoute et dans la discussion. Mais là, Bensousan reconnut celui qu'il était lorsqu'il s'acharnait sur un suspect lors d'un interrogatoire. Il lâchait les chevaux, comme ils avaient pour habitude de dire dans leur jargon du boulot. Pourquoi son instinct sanguin prenait le dessus aussi rapidement ? Dans quel but se braquait-il contre son informateur, au risque de perdre ses services ?

Je ne comprends pas ce que tu me dis, dit l'individu en ne cachant pas son angoisse. Est-ce que je t'ai déjà déçu ?Ne m'embrouille pas. Toi, cela ne te choque pas que des gars venus de nulle part s'imposent dans le coin en laissant véhiculer des infos de cette importance ?Moi je te rapporte ce que j'entends dans la rue, rien de plus.Et qui raconte cela ? Et de quoi est-il véritablement question ?Je traînais l'autre nuit sur les docks lorsque [...]Tu traînais ! Comme cela, sans raison, tu te baladais un soir sur les docks.Ben ouais ! Tu sais ce que c'est. J'étais là-bas pour un pote et [...]Arrête tes conneries et balance tes infos.O.K ! Comme je disais, j'ai vu un groupe de mecs en costards cravates qui discutaient grave. Je me suis approché sans faire de bruit et j'ai écouté ce qu'ils se disaient. C'est là que je les ai entendus parler d'un chargement qui était arrivé sur le territoire il y a quelques jours. Il était également question qu'ils puissent acheter des armes automatiques et une sorte de bombe. Ils avaient l'air très excités par cette vente. Juste après leur entretien, je me suis barré et je t'ai appelé.Pourquoi avoir surveillé ces types en particulier ?Quoi ! T'es sourd, je viens de te dire que c'était des mecs en costards, genre cadre supérieurs d'une grosse entreprise, au milieu de la nuit, sur des docks crasseux. Ils avaient l'air super louches ces types. Et puis, ils avaient des caisses avec des plaques fédérales.Des plaques fédérales ? Reprit Bensousan.Ouais ! Comme celles qui sont agrafées sur votre bagnole.D'accord, dit Perlmann, ils n'avaient rien à faire là. Mais toi. Que faisais-tu là-bas, dans la nuit ?Je me baladais.Les docks sont à dix bornes de chez toi. Alors qu'est-ce que tu foutais là-bas ?

MASTERS OF THE MANOù les histoires vivent. Découvrez maintenant