Après une courte pause sur l'Aéroport International Stanfield d'Halifax, où les agents fédéraux troquèrent leur A319 pour un hélicoptère de transport bimoteur de type Labrador, mis à leur disposition par les gardes côtiers, ils prirent la direction d'Oak Island.
King ne savait pas du tout à quoi s'attendre là-bas. Au fur et mesure qu'ils approchaient du lieu, il constatait que les visages se crispaient. Une tension invisible se propageait au sein de cette nouvelle équipe, tel un halo reflétant une peur indescriptible.
Le son émis par les pales de l'appareil résonnait dans un vrombissement assourdissant. King dut crier ses dernières recommandations.
Restez aux abords de l'île. Ne vous exposez pas. Et vérifiez continuellement vos instruments.
Chaque équipier emportait avec lui un compteur Geiger, une boussole, et une montre, en plus du matériel de combat habituel.
Nous ne resterons pas plus d'une heure sur place. Le temps pour moi de déterminer les risques d'une probable et éminente explosion. Si cela s'avérait être le cas, une escouade d'experts viendrait s'occuper du traitement définitif de l'engin et de la zone de contamination. Je vous rappelle que nous sommes là uniquement comme observateurs. Maintenant, il est temps de s'équiper.
Les agents du Bureau de Washington enfilèrent, comme ils le purent, l'encombrante combinaison protectrice. Par binôme, ils insérèrent leurs jambes, puis firent passer le reste du corps avant que leurs bras ne trouvent leur place, puis d'un coup sec, ils introduisirent la tête dans la capsule. Alors que celui qui s'équipait réajustait son scaphandre, le second refermait la large fermeture éclair qui traversait le dos de son collègue d'une épaule à l'autre. Incarcérés dans cette silhouette plastifiée, il leur fallut quelques minutes pour s'habituer. Le vêtement ralentissait chaque mouvement et contribuait à accroître leurs efforts. Le souffle s'accélérait à l'intérieur du casque et tapissait la visière de buée.
Quelques blagues sur cette tenue incongrue permirent d'atténuer les tensions et d'étouffer l'atmosphère noircie par les craintes que chacun préférait garder pour soi.
Il faut que je sois rapide, vif et efficace, ne cessait de se répéter King. La réussite de cette mission ne dépend que de moi. Et il me faut protéger ces p'tits gars. Je sais où je vais, je ne tiens pas pour autant à les envoyer au casse-pipe.
Il se persuadait que tout allait bien se passer. Il lui fallait bien cacher ses angoisses et faire bonne figure, sans quoi, ses camarades d'arme auraient été désemparés.
C'est alors qu'une voix synthétisée s'infiltra dans leur casque audio.
Deux minutes, avertit le pilote.
Les derniers réglages se faisaient avec des gestes maladroits et imprécis. Tous savaient qu'ils seraient exposé malgré eux à de fortes doses de radiation. La mort rôderait au-dessus de leur tête tel un nuage malfaisant. Et la peur, qui s'immiscait peu à peu dans les esprits, prit une place prépondérante au sein du groupe.
King tenta de fracturer l'animosité qui régnait depuis peu. Il passa vérifier l'équipement de protection individuel de chacun des agents embarqués. Son sérieux, son efficacité et sa maîtrise eurent pour effet de mettre ces jeunes agents en confiance. S'il leur montrait qu'il contrôlait, en apparence, parfaitement la situation, les membres du groupe d'intervention s'imagineraient peut-être qu'il prendrait soin d'eux, soin de chacun d'entre eux.
Une minute, rappela le pilote.
Par les hublots de l'hélico, ils pouvaient apercevoir cette forêt de hauts chênes qui recouvrait quasiment l'intégralité de l'île. La neige était abondamment tombée durant la journée, recouvrant ces arbres centenaires d'un manteau cotonneux. Tout autour, la mer démontée offrait un spectacle remarquable. Le seul bémol qui assombrissait le tableau était l'état des plages. Tout le pourtour de ce petit morceau de terre était crevassé et vallonné, comme si on y avait creusé des tranchées. L'appareil fit deux tours au-dessus de l'île avant que le pilote ne décide d'un endroit approprié pour un largage. Une fois l'endroit isolé, le pilote engagea une descente rapide. L'appareil effleurait le sable, juste à quelques centimètres du sol. La porte latérale s'ouvrit et ils sortirent un par un. Puis, après que le dernier ait posé le pied sur le sol, un épais brouillard de poussière et de sable leur rappela la réalité de leur mission. L'appareil reprenait son envol. Pour des mesures de sécurité, le pilote maintenait le Labrador en stationnaire, et à bonne distance du lieu d'extraction. Les membres d'élite du bureau de Washington étaient livrés à eux-même, sous l'oeil aiguisé de l'agent King.
Comme ils avaient l'habitude de le répéter à l'entraînement depuis de nombreuses années, ils sécurisèrent les alentours.
Ils marchaient sur un sol meuble, trop mouvant pour que ce soit naturel. Il s'était passé quelque chose sur ces plages.
Ces parcelles de sable ont été délibérément remuées, constata King. Y aurait-il eu un récent tremblement de terre ? Ou bien un mouvement rocheux ? Ou encore l'élargissement d'une faille souterraine ?
L'instinct de l'agent King lui préconisa d'être sur ses gardes car cela ne prévalait rien de bon. Il alluma sa lampe torche et s'aventura dans les terres. Au bout de quelques dizaines de mètres, il arriva au seuil de cette épaisse forêt. L'intérieur semblait anormalement obscur et étrange. Il prit de longues respirations puis avertit les autres agents de son arrivée en lieu hostile.
Sécurisez la plage. Effectuez les prélèvements que je vous ai demandés et attendez. Si je ne suis pas revenu dans une heure, rappelez l'hélico et quittez cette île maudite.
MAUDITE.
Oak Island n'était pas qu'un caillou perdu en pleine mer. Et on n'y avait pas enfoui un pseudo trésor comme cela, par hasard. Il y avait bien une raison à tout cela. Les Templiers, s'ils avaient bel et bien camouflé l'Arche d'Alliance sur ce lopin de terre, avaient du s'approprier les lieux et deviner que personne ne viendrait troubler, ici, le repos d'un si grand secret.
Oak Island n'était pas qu'un caillou perdu en pleine mer. Il résidait, à la surface de l'île, une atmosphère terrifiante et exaltante. Comme un champ de force effrayant mais qui vous attirait inexorablement en son centre. King ressentit une émotion extraordinaire et physiologique qui se trouvait être contradictoire avec ce qu'exprimait son esprit. Son corps exaltait, se ressourçait, comme s'il venait d'absorber une forte dose d'adrénaline. Alors que la peur ne quittait plus ses pensées, son enveloppe charnelle se ravivait. Il s'inquiéta du taux de radioactivité. Son compteur Geiger ne le rassurait pas, lui indiquant son introduction dans la zone d'exposition critique.
Oak Island n'était pas qu'un caillou perdu en pleine mer. King s'imagina que les Templiers ne furent pas les seuls à s'aventurer sur ce roc parsemé d'arbres. Il avança même, dans son fond intérieur, que les créateurs, les dieux, ces Néfilim et ingénieurs célestes avaient pu, eux aussi, dans des temps lointains, fouler la terre de cette île. Une émotion rare s'empara de tout son être. Jamais, dans toute son existence, il n'avait été confronté à de telles sensations. Il eut l'absolue certitude qu'il était ici chez lui.
Cette brève réflexion s'estompa aussi rapidement qu'elle était apparue. Il ne lui fallut guère de temps pour se raisonner et réitérer ses ordres.
Ne venez pas ici. Ne vous aventurez pas au-delà des plages. Et si le danger est confirmé, évacuez les parages dans les plus brefs délais.
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MASTERS OF THE MAN
Mystery / ThrillerCar il n'y a rien de caché qui ne soit manifesté, ni rien de secret qui ne soit connu et ne vienne à la lumière.. Luc 8.17 .................................................. Depuis l'aube des temps et quelques soient les civilisations, les cultures...