MASTERS OF THE MAN

LXX

Le pilote du Labrador récupéra les autres membres de l'équipe sur diverses plages délimitant Oak Island de l'océan en furie. Même les éléments naturels se déchaînaient, comme s'ils guettaient les moindres faits et gestes de l'escouade.

Une fois tous hissés à bord de l'hélicoptère vrombissant, la satisfaction d'une extraction vers de meilleurs cieux laissa place à la plus grande des stupéfactions. La découverte d'un cadavre dans la carlingue marqua les esprits.

L'un des agents spéciaux se proposa instinctivement pour aider King à insérer le corps de Johanna Kaufman dans une housse mortuaire. Le chef d'escadrille avait pensé à tout ou presque, même à revenir avec une nouvelle victime. A cette intention, il avait emporté dans les bagages des housses spécialement conçues pour isoler le corps contaminé du reste des passagers. Une fois que la dépouille de la jeune femme fut contenue dans ce sac blanc et stérile, on l'installa à l'arrière de l'appareil. Puis, dans le plus grand silence, chacun reprit sa place. Seuls les ronronnements du moteur et les vibrations émises par le mouvement circulaire des pales marquèrent un chant funèbre qui les accompagna jusque sur le continent.

King regarda par l'un des hublots, réfléchissant une dernière fois à toute cette histoire. Quatre jours venaient de s'écouler. Quatre jours à rechercher l'archéologue et à comprendre ce qui se jouait en catimini dans les hautes sphères du pouvoir terrestre et céleste. Son enquête l'avait conduit, malgré lui, sur les traces des Ingénieurs, de l'Arche d'Alliance, et du trésor des Templiers. A son grand désarroi il dut reconnaître que son enquête était vaine car bien qu'il ait acquis des connaissances et un savoir ancestral, il était arrivé trop tard.

Pouvais-je la sauver ? Se demanda t-il avec regret.

Le fait d'avoir failli à sa mission creusa une plaie dans sa poitrine. Non seulement, il n'avait pas pu éviter l'exposition de Kaufman et son décès, mais en plus, il n'avait pas réussi à empêcher que l'engin contenant un minerai d'une grande dangerosité, si secrètement convoité, ne soit dérobé. Une boule se forma dans sa gorge à la pensée de toutes ces vies dévastées et des milliers d'autres en sursis.

Que vont-ils faire de cette arme ? Ce minerai radioactif, et instable de surcroît, semant la mort tout autour de lui, sera t-il utilisé à mauvais escient ? Ou bien puis-je espérer que des hommes de Dieu, descendant de la lignée des Templiers, soient les possesseurs de ce monstre atomique ?

L'esprit embué, King scrutait l'horizon.

Plus bas, la mer était déchaînée.

Pourtant, un marin courageux avait sorti son chalutier et bravé les intempéries en quête d'une bonne pêche. A moins qu'il ne soit pas là pour les poissons.

Quel marin sortirait par ce temps la veille de Noël ? Pensa t-il. Et le sillon formé par l'écume que dégage l'hélice de son moteur, déclarant un cercle autour de l'île, serait-il un signe ? Pourquoi naviguer si près des côtes ? Serait-ce, lui aussi, un observateur ?

Pouvez-vous entrer en contact avec le bateau qui se trouve au-dessous ? Réclama t-il au pilote.Oui, si j'arrive à capter sa radio. Mais pourquoi ?Demandez-lui de couper son moteur et d'immobiliser son navire.Et après !Après. Vous allez me larguer sur le pont.Quoi ! Par ce temps ? C'est de la folie.Faites ce que je vous dis.

Effectivement, c'était une pure folie, presqu'un suicide. Mais King décida de suivre son instinct. Ce même instinct qui l'avait conduit à poursuivre la piste de Kaufman plutôt que n'importe quelle autre. Et puis, il était convaincu que ce marin, vraisemblablement un gars du coin, était là pour inspecter les alentours de l'île. Peut-être savait-il des choses. Peut-être avait-il été témoin d'exercices suspects.