The Blueprint Neighborhood {SKZ}

1.5

- T H E  O N E  T H A T  I 
D E S I R E -

Félix pensait, il pensait beaucoup. Trop sans doute. Enroulé dans son drap fin qui lui tenait pourtant bien trop chaud, il fixait son regard sur l'extérieur, là où vivait son principal problème à savoir,

Son voisin d'en face.

Ses yeux se fermèrent quelques secondes avant de s'ouvrir à nouveau. Cette fois, ce fut son poignet qui retint son attention, là où le morceau de tissu taché de la veille était toujours noué. Le tissu autrefois d'un blanc parfait était à présent couvert de terre, d'alcool et de sang. C'était un petit détail mais Félix avait été touché par son geste, sûrement un peu trop. Comme avec toutes les petites attentions que Seo Changbin lui accordait et cela depuis déjà six
ans.

Car voilà, le problème de Félix était le suivant, il était fou. Fou d'amour pour la personne la moins accessible de son entourage. Ah ça, il était passé par bien des phases après la naissance de ces sentiments. D'abord il avait nié toute forme d'attirance pour le plus vieux, pensant simplement qu'il s'agissant d'un petit surplus d'affection mal placé. Pourtant, le temps passant n'avait rien arrangé à sa situation et son affect n'avait fait que s'approfondir.

A présent, Il était coincé. Coincé dans une situation bien trop complexe. Avoir des sentiments pour le meilleur ami de son frère était quelque chose de bien alambiqué et la règle du " loin des yeux, loin du cœur " ne pouvait pas s'appliquer pour Félix. En effet, malgré ses efforts pour placer une distance raisonnable entre Changbin et lui, le résultat ne s'était jamais trouvé concluant. Tout simplement parce qu'il ne se trouvait jamais très loin et qu'apercevoir le garçon de vos rêves en caleçon dans votre cuisine à peine le soleil levé n'aide pas vraiment à tirer un trait dessus.

Alors, ne sachant plus quoi faire et les idées lui manquant, Félix ne faisait plus rien. Il se laissait porter, incapable d'imaginer la moindre issue positive à cette histoire.

Félix aurait bien pu en parler à son grand frère, lui expliquer la nature de ses sentiments mais dans ce cas de figure, il n'imaginait pas Changbin finir ailleurs qu'à la morgue. Étrangement ce n'était pas ce qu'il souhaitait. Tout avouer à Chan n'était pas une option et cela pour une raison bien simple, Chan chérissait Félix comme son trésor le plus précieux. 

Le blondinet ne pouvait réellement pas reprocher à son frère de lui accorder de l'intérêt. Cependant celui-ci était TRÈS réticent à l'idée de le voir s'amouracher de qui que ce soit. Chan voulait le bonheur de Félix, évidement, mais s'il pouvait se trouver à distance des bras d'un autre garçon, ça l'arrangeait fortement. Jusque là, ça n'avait pas vraiment dérangé Félix qui avait fini par renoncer au désir d'entretenir une relation comme celles qu'il adulait dans ses séries préférées. Pourtant, quelque chose, un léger détail avait réveillé la flamme qui n'avait, au fond, jamais cessé de s'agiter au fond de lui.

L'espoir.

En effet, l'une des principales raisons du ''comment Félix était jusqu'ici parvenu à vivre en paix avec ses sentiments'' était la fatalité à laquelle ceux-ci s'accrochaient. Parce qu'il avait toujours su, toujours cru qu'ils ne resteraient qu'un fantasme à jamais sans suite. Le blondinet en avait été persuadé si longtemps, Changbin ne l'avait jamais perçu de cette manière. Il le voyait encore et toujours comme le gamin de dix ans qui, à l'époque, parvenait à peine à aligner trois phrases et qui dansait en caleçon sur sa pelouse dès les premiers jours de l'été. Pire encore, il était le petit frère de Chan, son meilleur ami, le garçon le plus sous protection du quartier. Félix n'avait aucune chance. Ça, il se l'était répété un million de fois.

Et pourtant, il s'était bien produit quelque chose. Quelque chose qui avait bouleversé toutes ses certitudes et qui le hantait depuis.

Ce petit détail avait eut à lui seul, le pouvoir de retourner toute une situation et depuis, même si la majorité de ses questions restaient sans réponse, quelque chose poussait Félix à ne pas abandonner. A juste se laisser porter. Depuis, c'est ce qu'il faisait.

Il y avait bien une personne qui était au courant des sentiments de Félix envers Changbin, même personne qui connaissait aussi la couleur de son premier cartable et son implication dans la mort du chien de la vieille madame Kang du bout de la rue. Jisung savait tout de Félix et vice-versa. Ils partageaient ce genre d'amitié ou le mot ''secret''n'existait pas. La meilleure source de réconfort en cas de lourd chagrin, une relation d'une loyauté sans faille. Ils partageaient le plus précieux des trésors, la confiance.

« Félix! »

Le blondinet se redressa immédiatement, camouflant sa main bandée sous ses draps bleus pâles. Réflexe maladroit, comme si ses pensées qu'il savait indécentes pouvaient être soudainement entendues de tous. En tout cas, Chan n'en remarqua rien. Il s'appuya simplement contre le cadran de sa porte, son large sourire aux lèvres.

« Ouais? »

« Les parents vont en ville, je les accompagne, tu veux venir? »

Félix luttait pour s'empêcher de laisser échapper un regard à l'extérieur, où Changbin était toujours occupé à tondre sa pelouse. Ses doigts se mouvèrent doucement contre le tissu qui entourait sa paume et un timide sourire s'installa sur sa figure, qu'il essayait de réprimer en mordillant ses lèvres.

« J'ai un truc à faire, allez-y sans moi... »

Le plus grand des australien se contenta d'acquiescer, quittant la pièce aussi rapidement qu'il était arrivé. Félix laissa un soupire s'envoler, soupire que lui-même ne pensait pas avoir retenu tout ce temps. Il tira son drap au-dessus de sa tête, couvrant complètement celle-ci comme à l'époque où Jisung et lui s'amusaient à construire des cabanes dans leurs lits. Ses prunelles douces se posèrent sur le bandana de son ami qui lui servait de bandage et la niaiserie de son expression en aurait certainement exaspéré plus d'un. Il observait ce pauvre bout de chiffon mal fichu comme le plus précieux des trésors. Bien sûr n'importe qui l'aurait trouvé ridicule mais peu importait, Félix était bien trop enivré par ce qu'il ressentait pour s'en rendre compte.

Oui, il avait bien mieux à faire.