Chapitre 46 : Culture

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Layana

Deux jours nous séparent seulement de la soirée de Pâque, je n'ai pas revu Caleb depuis la fois où nous nous sommes parlés devant mon casier. Le manque a un goût amer dans mon estomac, j'ai envie de l'appeler à chaque minute.

Mais le dégoût de mon corps me ronge de l'intérieur. Pendant les dernières semaines, je faisais semblant d'aller bien, comme si rien ne m'était arrivée. J'étais dans un déni constant, je ne peux plus faire ainsi.

Après les pénétrations de Marc, j'ai eu mal pendant des jours et des jours. Mais j'agissais comme si je n'étais pas déchirée. Je riais et souriais avec mes amies, je sortais et m'amusais. Pourtant, lorsque l'obscurité recouvrait tout au plus tard de la nuit, je tremblais de façon incontrôlable en voulant littéralement m'arracher la peau.

_ Ralentie Laya, je n'arrive pas à te suivre, halète Mia derrière moi.

Mais je suis incapable de m'arrêter de courir. J'ai envie de ressentir de la douleur autre part qu'à proximité de mon cœur. Et, actuellement, celle dans mes jambes me ferait presque m'évanouir. Depuis trois heures, je cours sans relâche. Avant ça, je ne me serais jamais crue capable de faire autant d'efforts physiques en si peu de temps.

Alors que je courais au parc, Mia a croisé mon chemin, elle m'a naturellement suivie.

J'accélère encore, voulant me fondre dans l'air pour qu'il puisse porter le poids de mes peines. Mes jambes finissent par me lâcher, tout comme le reste de mon corps. Mes genoux heurtent violemment le sol, égratignant ma peau en même temps. Mes sanglots explosent dans ma gorge dès l'instant où ses bras s'enroulent autour de mes épaules pour me rapprocher d'elle

_Tu vas y arriver, je te le promets, murmure-t-elle dans mon cou.

_Je ne sais plus quoi faire pour aller bien...

_Il n'y a rien à faire, Layana, tu es forte. Tu arriveras à te réapproprier ton corps.

Ma vision se floute devant les formules écrites à répétition sur mes feuilles de révision, elles me font soudainement mal au crâne. Mais nos examens blancs se déroulent dans deux jours à peine, alors je tente de réviser le plus efficacement possible, consciente que je n'ai pas consacré énormément de temps aux études ces derniers temps.

Je me suis reconcentrée en me rappelant pourquoi je fais ces efforts. Je n'ai jamais eu l'intention de travailler pour Paul toute ma vie. Mon vrai objectif est la médecine, peut-être même me spécialiserai-je en pédiatrie. Travailler dans le monde de l'illégal ne m'a pas attirée une seule fois avant tout ça. Et si je suis entrée dans le gang de Paul, c'était pour une question de vengeance.

À l'époque, j'avais aussi besoin d'argent afin de quitter la maison de mes parents, refusant de passer encore des années entre deux psychopathes. De plus, je refusais de demander quoi que ce soit à l'un d'eux. Maintenant, j'ai hâte de finir le lycée pour enfin partir.

Puis, je me rappelle que les appels de ma mère se font très fréquents en ce moment, à seulement quelques semaines du jour qu'elle attend le plus. J'imagine qu'elle cherche à vérifier si je suis prête, et j'esquive le sujet à chaque discussion.

_Layana ?

Tout mon corps se tend lorsque je tourne lentement la tête vers celle qui m'a interpellée. Sa seule voix a réussi à ranimer toute la colère qui m'habitait il y a quelques mois à peine. Mais c'est aussi celle qui a tenté de me prévenir quant aux projets de Marc.

Mon regard s'arrête sur ses cheveux bruns, attachés dans son éternelle queue de cheval. J'observe un instant son visage tandis que ses yeux rougissent à vue d'œil. Je déglutis violemment avant de pouvoir prononcer le moindre mot.

Suffering | Tome 1 & 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant