Tome 2 | Chapitre 20: Cri de désespoir

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Layana

Croyant que mon cœur a cessé de battre, je tente de me concentrer sur la recherche de ses battements. Pour autant, je suis incapable d'arracher mes iris au noisette des siens. Les mêmes tâches de rousseurs que les miennes ornent le dessus de son nez, me rappelant douloureusement notre lien de parenté.

Cette femme ne fait plus partie de ma vie depuis tellement, tellement longtemps que la voir en face de moi me broie de l'intérieur.

« Ava a trouvé le moyen de quitter l'hôpital. »

Les paroles d'Adrian tournent en boucle dans ma tête en cet instant. Je déteste le fait d'avoir été aussi crédule en pendant qu'elle avait oublié mon existence.

Je priais pour qu'elle oublie jusqu'à mon prénom.

Mais elle se tient devant moi, ses cheveux du même châtain que les miens relevés en un parfait chignon et ses yeux étirés par un maquillage lumineux. Son apparence ne transmet pas les années qu'elle a passé en hôpital psychiatrique.

Ça ne m'étonne même pas.

Elle a toujours tenu à cacher les problèmes sous une apparence irréprochable, même après son viol. Et c'est ce qu'elle attendait de moi. Elle voulait que je fasse comme s'il ne m'était rien arrivé, ce que j'étais incapable de faire.

Au bout de quelques secondes, le soulagement m'envahit lorsque je ressens à nouveau les lents battements de mon cœur. Mais je n'entends soudainement plus qu'eux en sentant des frissons d'angoisse me parcourir.

Ava m'a tellement brisée, bien plus que n'importe qui d'autre.

Elle était celle qui voulait me forcer à tuer l'homme que j'aimais, celle qui m'a tiré dessus. J'aurais beau essayé de tout remettre sur Caleb, je sais qu'Ava est en grande partie responsable. C'est de sa faute à elle si j'ai eu un pneumothorax.

Aucune de nous ne laisse sa langue se délier, nous restons face à face. Et je remarque qu'un apaisement immonde marque ses traits.

Du haut de ses quarante-trois ans, elle pose sur moi son regard rempli de compassion et d'amour. Un regard qui me donne soudainement la nausée.

— Ma puce... Qu'est-ce que tu as à la jambe ?

Je la dévisage sans même pouvoir répondre à cette femme qui s'est introduite chez moi, comme si elle avait tous les droits. Je ne sais même pas comment elle a pu deviner que je souffre alors que je n'ai pas bougé d'un centimètre depuis le début.

Sûrement l'instinct maternel.

Attendez, comment elle vient de m'appeler là ?

— Ne m'appelle plus jamais comme ça, tu n'en es pas digne, craché-je, méprisante.

Un éclat de tristesse passe dans ses yeux, transformant son expression en moue boudeuse. Elle tente de faire un pas vers moi mais je l'arrête d'un geste en attrapant mon arme qui était posée sur un meuble.

Et je la vise.

— Ose, Ava, ose juste faire un pas de plus.

Son corps entier s'arrête et ses yeux s'écarquillent comme si elle n'y croyait pas. Moi-même, je me sens fébrile à l'idée de pointer une arme sur ma propre mère. Je ne suis pas comme elle, je ne pourrais pas lui tourner le dos et lui tirer dessus. Parce que la haine que je ressens est concurrencée par l'amour et l'admiration que je lui portais, avant.

Dans une lenteur affolante, j'abaisse le cran de sûreté en priant pour que ma main ne tremble pas. Mais ma génitrice effectue un pas dans ma direction.

Suffering | Tome 1 & 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant