11. Etouffant

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Je n'avais servi à rien. Tout le cours durant, je m'étais contentée d'écouter et d'approuver la phrase d'un sourire. Mes camarades devaient regretter que je les ai choisis. Ils auraient préféré rester entre eux, comme moi, j'aurais voulu être avec mes amies. Si seulement je ne m'étais pas réveillée en retard... Je savais que je n'aurais pas dû m'allonger et fermer les yeux, que je finirai par m'endormir alors que je n'avais pas remis mon réveil, complètement déréglé à cause des absences de la semaine précédente.

Les deux heures de cours semblaient se doubler à chaque minute. Si je regardais l'horloge et y voyais la demie, quinze minutes après, l'horloge affichait dix minutes de moins. A tel point qu'à la sonnerie de la pause, je ne bougeai pas tout de suite, pensant que seule la première heure venait de s'achever. Mais à voir tout le monde se lever et récupérer leur sac, je les imitai.

Aussitôt, une masse me tomba dessus pour m'entourer de ses bras. Allissia me serrait si fort que j'en étouffais presque.

— Si on avait su que tu étais juste en retard, on se serait mis à trois pour que tu viennes avec nous, je t'assure !

Un sourire se dessina avec ses mots. Je n'en avais pas douté, mais le fait qu'elle le dise me touchait. Les filles étaient tellement adorables...

— Ça s'est bien passé avec ton groupe ? Tu avais l'air distraite, remarqua Séverilla.

L'espace d'un instant, je fus étonnée de savoir qu'elle avait jeté des coups d'œil dans ma direction. Mais je me rappelai qu'elle le faisait toujours lorsque nous ne travaillions pas ensemble. 

— T'as dormi avec des bouchons d'oreilles ou comment ça se passe ? T'es jamais en retard d'habitude ! lança Illyana.

— Non, j'avais oublié de régler mon réveil... 

— On t'as envoyé plein de messages. T'aurais pu nous appeler en chemin, ou même un "j'arrive". On pensait que t'étais... malade, ajouta Illyana, avec un regard entendu sur le dernier mot.

Je baissai les yeux, me pinçant les lèvres. Je me doutais qu'elles y penseraient... Et à présent qu'elles savaient pour les lettres, elles y repenseraient dès qu'il se passerait quelque chose d'anormal de mon côté.

Séverilla se racla la gorge et je la remerciai d'attirer l'attention sur elle.

— Enfin, ce qui est important, c'est que même si on a été séparé les deux premières heures, on va pouvoir rattraper ça avec les deux prochaines.

J'approuvai d'un sourire. Ce n'était qu'un travail pour un seul cours après tout, il n'y avait pas de quoi en faire tout un plat. Ce n'était pas noté et, même si mon groupe ne me voudrait plus jamais avec eux... Je ne trouvais pas de positif pour palier à cela, en fait.

Heureusement pour moi, les filles n'abordèrent pas le sujet des lettres, ni de leur enquête, pour parler de choses futiles, échanger des blagues... Mais une boule demeura dans mon ventre et mes mains tremblaient, bien que je ne saurais expliquer pourquoi. Je les fourrai dans mes poches afin que les filles ne remarquent rien. Et le simple fait que Séverilla ne l'ait pas vu suffisait à me détendre.

La sonnerie de la fin de la pause arriva et nous pûmes aller au foyer. Comme à chaque fois qu'Illyana passait l'heure d'étude avec nous, nous allâmes à la plus grande table. Bien que je ne comprenais pas pourquoi, mais elle préférait celle-ci, même si elle était seule, bien que cela n'arrivait jamais. Sauf qu'à cause de ce détail, d'autres personnes de la classe nous rejoignirent pour discuter avec Illyana. 

En à peine dix minutes, au moins la moitié de la classe se trouvaient avec nous, et nous dûmes sortir à cause du manque de place.

Habituellement, lorsqu'Illyana passait du temps avec d'autres personnes de la classe, Séverilla, Allissia et moi restions entre nous, pour mon plus grand plaisir, mais cette fois-ci, elles les avaient suivis. Je n'étais pas du tout à l'aise, mais je ne bronchais pas et souriais en écoutant la conversation. 

C'était intéressant de voir une quinzaine de personnes discuter ensemble sans se diviser en plusieurs groupes. Et un peu embêtant aussi... Mais je ne voulais pas non plus que la classe soit moins amie juste pour me faire plaisir. Je n'étais pas aussi égoïste... L'étais-je ? Je venais de penser que cela m'arrangerait... Alors que c'est super qu'autant de personnes s'entendent si bien. Je ne devrais pas m'interférer d'une quelconque façon qu'il soit. Si les filles voulaient converser avec d'autres personnes, ainsi soit-il, je les suivais et écoutais en silence.

Dis ainsi, cela ressemblait à un reproche... 

Et puis, leur discussion n'était pas ennuyeuse. Est-ce que je devrais essayer de participer ? Je n'étais pas sûre que quiconque remarquerais si je parlais. Je diviserais juste le groupe parce que mes amies me répondraient.

L'heure de manger finit par arriver et j'affirmais intérieurement que cela signifiait que le groupe se séparerait, comme d'habitude et que je mangerais avec Séverilla et Allissia. Sauf que nous restâmes ensemble. Ce fut difficile pour nous de trouver une table assez vide pour tous nous accueillir, et si une personne ne venait pas de quitter sa place, je me serais sûrement "sacrifiée" pour permettre aux autres de manger ensemble. Sacrifice que personne n'aurait remarqué, mais cela n'avait pas d'importance. Je voulais juste m'isoler un peu, tout ce monde m'oppressait, m'étouffait.

J'avalais rapidement mon plateau, toujours en souriant aux autres, bien que personne ne me regardait. Enfin, je préférais cela plutôt que de sentir tous les regards sur moi comme si j'étais un alien et ne pas savoir quoi dire ou comment réagir. 

Mais comme j'étais invisible, je pouvais me permettre de rêvasser, cela ferait passer le temps plus vite. Je décidai alors de faire ça et me détournai des autres, perdant mon sourire. Le simple fait d'être avec eux absorbait toute mon énergie.

— Gwen, vu que tu as fini, cela ne te dérange pas de venir avec moi, je voudrais voir certaines choses sur tes notes d'anglais, lança Séverilla. 

Je levai les yeux vers elle, perturbée, mais saisis l'occasion de retrouver un peu de calme. Même si je ne comprenais pas pourquoi mes notes à moi l'intéressaient. Elle était bilingue grâce à ses grands-parents avec qui elle parlait toujours anglais. Raison pour laquelle c'était moi qui comparais mes notes aux siennes pour compléter. 

Nous prîmes notre plateau et sortîmes du réfectoire après avoir adressé quelques mots aux autres.

Dehors, je posai mon sac sur un banc pour récupérer mon cahier d'anglais, mais Séverilla posa sa main sur la mienne pour m'arrêter. Je lui jetai un regard interrogateur.

— C'était juste une excuse pour sortir. On étouffe avec tant de monde, tu ne trouves pas ?

Son regard entendu m'indiquait qu'elle parlait surtout pour moi. Elle aussi n'était pas très bavarde avec les autres, mais elle ne s'ennuyait pas et aimait les analyser.

A la lettreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant