Chapitre 20.

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Philesta, tout en suivant sa mère et Azaëlle jusqu'à un endroit pour les gens sans abris, qu'elles avaient trouvées en la cherchant, observait son amie.

La voir lui procurait une sensation étrange, un mélange de joie et de tristesse car Azaëlle était et resterait une pâle copie de Lorena.

Azaëlle ne pouvait en aucun cas remplacer Lorena et cette constatation lui faisait terriblement mal. En réalité, Philesta n'avait jamais aimé Azaëlle mais elle avait aimé Lorena à travers Azaëlle et Konstan.

Maintenant qu'elle avait connaissance de l'existence de Lorena, elle comprenait ce vide immense qu'elle ressentait à chaque fois qu'elle se trouvait avec ses amis. Il lui manquait celle qu'elle considérait comme une sœur, celle avec laquelle elle avait grandit et celle qui n'était désormais plus là.

Elle tourna le regard vers Althaia. Sa mère ne se souvenait pas de Lorena, ses souvenirs ayant également été modifiés. Cela lui faisait également mal car la jeune fille ne resterait gravée que dans ses pensées, si on pouvait parler de pensées étant donné le peu de souvenirs qu'elle avait d'elle, les autres, les plus importants ayant été effacées par l'IA.

Les trois femmes arrivèrent finalement à l'abris et entrèrent dedans. Azaëlle et Althaia sortirent des affaires qu'elles avaient caché dans un coin et commencèrent à préparer un maigre repas.

Philesta les regarda faire en silence. Elle ne pouvait pas leur parler de l'IA, de sa dangerosité, de « l'expérience » de peur de les mettre en danger et cela l'étouffait. Elle avait besoin d'extérioriser, de s'énerver avec elles contre l'IA de trouver des solutions peut-être irréalisables mais au moins elle sentirait concrètement qu'elle n'était plus seule, qu'elle ne serait plus jamais seule.

Azaëlle leva les yeux vers son amie et dit :

— Tout à l'heure en te cherchant, je suis allée dans un endroit avec de grands bâtiments lumineux comportant de gigantesques écrans et j'ai vu celle qui semblait être la dirigeante d'ici, parler. Je me suis arrêtée quelques instants pour écouter parce que j'étais fascinée et j'étais surprise parce que ce qu'elle disait était vraiment... révolutionnaire, il n'y a pas d'autres mots.

Philesta haussa les sourcils. Elle n'arrivait pas à cerner si ce que venait de dire son amie était un compliment pour l'IA ou une remarque. Elle répondit finalement à voix basse :

— Tu as vu que ce n'était pas une personne ? C'est une intelligence artificielle, une sorte de femme machine.

Azaëlle acquiesça en répondant :

— C'est incroyable à quel point la technologie est avancée ici.

Philesta fronça les sourcils. Son amie avait donc fait un compliment à l'IA tout à l'heure.

Elle se racla la gorge incapable de lancer des fleurs à l'IA mais dans l'incapacité d'en dire du mal de peur de mettre en danger sa mère et Azaëlle.

Elle changea donc complétement de sujet et lança faute d'idée :

— Ah d'ailleurs, je suis mariée !

Sa mère se redressa les yeux écarquillés et Azaëlle ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit.

Ce fut Althaia qui se ressaisit la première et qui s'écria :

— Qui est ton mari et où est-il ? Et pourquoi tu t'es mariée en si peu de temps ?

Philesta répondit après un instant de silence en se rappelant la façon dont s'était déroulé son mariage :

— C'était... un mariage forcé et « mon mari » est je ne sais où.

Azaëlle rétorqua :

— Tu n'as pas répondu à la question qui est-il ?

La jeune femme ne voulait pas répondre que c'était un Gratsans car elle attirerait l'antipathie de sa mère et Azaëlle pour Elyrian et cela ne lui plaisait pas.

Même s'il n'était son mari que sur le papier, elle ne voulait pas que ses proches le haïssent.

Cependant, elle ne pouvait pas non plus expliquer qu'il n'était pas un Gratsans et qu'il avait perdu la mémoire et que maintenant il l'avait retrouvé et faisait partie du monde moderne de peur que d'une façon ou d'une autre l'IA l'entende et que cela puisse porter préjudice à Elyrian.

Philesta répondit en riant :

— C'est quelqu'un de bien, c'est tout ce que vous devez savoir.

Plus elle y pensait et plus cela lui semblait logique qu'Elyrian était de son côté depuis le début. Il faisait forcément parti comme elle de « l'expérience » ce qui expliquerait le fait qu'il ait perdu la mémoire.

Cependant, comment l'avait-il retrouvée ? Pourrait-elle également y arriver elle aussi et retrouver sa vie d'avant ?

Soudain Philesta entendit une voix crier son nom. Une voix grave. Elle fronça les sourcils et se leva.

Azaëlle et sa mère se levèrent elles aussi et lui dirent de se cacher en attendant que la voix cesse de l'appeler.

La jeune femme avait mal à la tête et ce que lui disait son amie et sa mère lui déplaisait étrangement, elle avait envie d'aller vers la voix.

Cette voix elle la reconnaissait parfaitement, c'était la voix d'Elyrian.

Il l'appelait sans s'arrêter, de plus en plus fort.

Il fallait qu'elle sorte de l'abri pour le rejoindre. Azaëlle et sa mère se mirent devant la porte d'entrée et Althaia dit :

— C'est soit lui, soit nous, si tu le rejoins, tu ne nous verras plus jamais, nous disparaitrons de ta vie.

Philesta sentit ses yeux s'emplir de larmes et elle rétorqua :

— Mais qu'est-ce que vous racontez ?

Elle avait peur de comprendre, terriblement peur.

Elyrian continuait de l'appeler encore et encore et Azaëlle et sa mère la fixait avec un regard lourd de reproches.

Elle s'accroupit et posa sa tête dans ses mains en pleurant doucement.

Elle se leva finalement lentement et demanda à sa mère et son amie :

— Vous n'êtes pas réelles, n'est-ce pas ?

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