Chapitre 58.

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Des vagues s'écrasaient contre le fragile bateau et le faisait tanguer dangereusement.

Philesta blême se tenait au rebord en plastique les dents serrés.

Elle leva le regard en frissonnant. Le ciel avait changé depuis la veille se couvrant d'un manteau grisâtre.

Elle regarda Elyrian qui se démenait pour rester dans la direction indiquée par la carte.

Arriveraient-ils à destination sans accidents ?

La jeune femme sourit légèrement. Il savait ce qu'il faisait et elle avait entièrement confiance en lui, rien ne leur arriverait...

Une vague plus violente que les autres déséquilibra brusquement le petit bateau de sauvetage et la main de Philesta agrippée au rebord glissa soudain.

Sans qu'elle n'ait le temps de réagir, elle vit le bateau disparaitre de sa vision et soudain tomba dans l'eau glacée.

La lumière du jour brillait de plus en plus faiblement à la surface de l'eau qu'elle voyait s'éloigner d'elle au fur et à mesure qu'elle s'enfonçait dans les profondeurs.

C'est alors qu'elle se souvint d'un détail qui n'en était pas un... elle ne savait pas nager...

Elle ouvrit la bouche pour crier. Des bulles s'échappèrent silencieusement.

Ses poumons brûlaient...

Des spasmes la secouèrent...

Elle devait inspirer de l'oxygène... c'était urgent...

Philesta leva le bras vers la lumière qui s'éloignait et ferma les yeux.

Elle ressentit un fort sentiment de bien être l'envelopper doucement la poussant à se relâcher... à respirer enfin...

Elle ouvrit brusquement les yeux. Elle ne voulait pas mourir.

La jeune femme regarda l'eau autour d'elle qui tentait de l'engloutir et bougea ses doigts en suivant son mouvement irrégulier.

Elle ne savait pas nager certes, mais elle était guérisseuse...

La mer autour d'elle suivit bientôt le mouvement de ses mains, puis de ses bras.

Elle s'ouvrit brusquement dans une colonne en mouvement attirant Philesta vers le haut, vers l'oxygène.

Au même instant la jeune femme vit Elyrian sauter dans l'eau, il arriva jusqu'à elle et attrapa sa main.

Ils se regardèrent en silence, le cœur battant, en apesanteur, entre ciel et mer puis la colonne les projeta sur le bateau et se referma derrière eux.

Elyrian tomba brusquement sur le dos et la jeune femme atterrit sur lui. Elle inspira emplissant d'air ses poumons brûlants et laissa échapper des larmes.

Il posa sa main glacée sur sa joue et dit avec émotion :

— Mon cœur s'est arrêté quand je ne t'ai plus vu derrière moi...

Elle se redressa en tremblant et le jeune homme la couvrit d'une couverture de survie.

Il murmura en regardant l'eau qui s'était calmé :

— Tu t'es sauvée toute seule, tu es incroyable...

Le manteau sombre qui couvrait le ciel se déchira lentement et laissa la place à un azur rassurant.

Les lèvres de Philesta bleuies par le froid de l'eau s'étirèrent dans un léger sourire et elle souffla en fixant un point à l'horizon :

— Terre en vue capitaine...

Elyrian tourna la tête brusquement et s'écria en riant :

— Nous avons réussi Philesta !

Dans son élan de joie il serra la jeune femme dans ses bras et dit :

— Nous voyons enfin la fin du tunnel, le règne de l'Illusion sera bientôt terminé.

Philesta se détacha doucement de son étreinte et regarda l'île qui grandissait à l'horizon en disant :

— Reste à convaincre le professeur.

Le jeune homme sourit avec confiance.

Quelques minutes plus tard, ils sautèrent sur le sable tiède de l'île et Elyrian s'exclama :

— Bienvenu à Taribati !

Philesta sourit et entra dans la forêt vierge qui recouvrait pratiquement toute l'île aussitôt suivie du jeune homme.

Le soleil qui était revenu brûlait de ses rayons, à travers les branches la peau de Philesta ce qui acheva de la réchauffer.

Elle regarda Elyrian qui avançait à grand pas en poussant les branches qui se trouvaient sur son passage.

Il tourna la tête et leur regards se croisèrent. Ils se sourirent les yeux brillants. Ils approchaient enfin du but. Après tout ce temps...

Soudain le jeune homme fronça les sourcils et fit signe à Philesta de s'arrêter.

Un long sifflement se faisait entendre assez proche. Ce n'était pas un oiseau. On aurait dit une sorte de signal.

La jeune femme murmura :

— Allons voir.

Elyrian acquiesça et ils reprirent leur marche dans la direction du son mais à peine avaient ils fait quelques pas qu'ils furent projetés en l'air.

Ils se stabilisèrent à cinq mètres du sol environ, enfermés dans un filet fait de lianes entrelacées.

Un homme à la peau basané et portant un simple tissu à la taille sortit alors des buissons et les pointa du doigt en criant quelque chose que les jeunes gens ne comprirent pas.

Elyrian déglutit et demanda à la jeune femme:

— C'est... le professeur ?

Philesta qui fixait l'homme en fronçant les sourcils depuis qu'il était arrivé, secoua lentement la tête et répondit :

— Il a sans doute changé durant son exil mais... pas autant. Ce n'est pas lui.

Le jeune homme rétorqua :

— Mais qui alors ? Le professeur ne devait-il pas être seul sur l'île?

D'autres hommes basanés sortirent soudain des arbres et les pointèrent avec des arcs prêts à tirer.

Le sifflement qui avait attiré les deux jeunes gens dans le piège se tut enfin et un homme au teint hâlé et aux cheveux blancs sortit de l'ombre.

Il avança lentement entre les hommes basanés et leva la tête vers le filet.

Philesta serra le bras d'Elyrian et souffla :

— C'est lui.

Il sourit étrangement et dit :

— Qui a dit que je serai seul ?

Les deux jeunes gens sursautèrent en même temps. Il les avait entendu... de si loin ?

Il remonta ses lunettes en métal sur son nez et ajouta calmement:

— Je savais que l'Illusion enverrait des gens pour me tuer mais..., il planta son regard dans les yeux des deux jeunes gens, à la place c'est vous que je tuerai et je lui enverrai vos corps en cadeau.

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