Philesta serra ses mains glacées entre elles et s'approcha à pas de loup de la tombe d'Elyrian.
Elle s'accroupit et à la force de ses mains déterra motte de terre par motte de terre la bière du jeune homme.
La jeune femme serra les dents et l'ouvrit fébrilement laissant apparaître un corps emmailloté d'un drap blanc.
Elle le souleva et vit le visage paisible d'Elyrian. Elle resta un instant sans bouger impressionnée par la pâleur de ses traits mais elle se ressaisit rapidement et posa ses mains sur son ventre.
Philesta ferma les yeux et concentra toute son attention dans ses mains afin de manipuler l'eau de son corps et ranimer le jeune homme.
Au bout de quelques secondes à peine Elyrian ouvrit les yeux et se redressa.
Il regarda autour de lui en frissonnant et se leva péniblement.
La jeune femme referma la bière et la remit en terre rapidement sous le regard encore embrumé du jeune homme puis les deux jeunes gens se dirigèrent discrètement vers l'entrée de la ville.
Un immense gratsans attendait devant ses yeux jaunes luisant dans l'obscurité de la nuit.
Philesta déglutit et recula instinctivement. Elyrian la regarda faire un sourire moqueur plaqué sur son visage puis il avança devant l'impressionnante bête et en la regardant dans les yeux dit :
— Laisse-nous passer.
Aussitôt, l'animal détourna le regard et partit d'un pas lourd.
Le cœur de la jeune femme s'accéléra et elle courut plus qu'elle ne marchait vers la lourde porte d'entrée. Elle appuya de tout son poids sur la poignée et parvint tant bien que mal à l'ouvrir.
Elyrian termina de la pousser et la referma soigneusement lorsqu'ils furent tous les deux de l'autre côté.
Ils se mirent à courir à perdre haleine le plus loin possible du peuple des Gratsans puis Philesta se laissa tomber épuisée dans l'herbe givrée.
La neige se mit alors à tomber et recouvrit petit à petit de sa blancheur immaculée chaque parcelle de terre qui les entourait.
La jeune femme plongea ses mains dedans en souriant et dit finalement dans un souffle :
— Nous sommes libres.
Le jeune homme fronça les sourcils et rectifia :
— Je suis libre. Je t'ai aidé à sortir c'était ma part du marché mais je n'ai jamais promis de te rendre ta liberté.
Philesta se leva brusquement et rétorqua :
— Que comptez-vous faire ? Allez-vous me garder à vos côtés toute votre vie afin de ne pas avoir de remords envers votre peuple ? C'est absurde ! Ne cherchiez-vous pas à fuir également pour ne pas être avec moi ?
Elyrian attrapa brusquement le bras de la jeune femme et dit calmement la mâchoire crispée :
— Tu oses hausser le ton ? Je te dis que pour l'instant tu es ma prisonnière alors tu l'es.
Philesta déglutit et répondit sur le même ton :
— Ne devrions-nous pas plutôt nous allier ? De toute façon nous sommes seuls dans une immense montage enneigée à quoi cela sert-il qu'un de nous soit le prisonnier de l'autre ?
Le jeune homme regarda autour de lui et lâcha la jeune femme. Il dit finalement :
— Où allons-nous ?
Philesta regarda au loin le cœur palpitant. Le peuple des Katharos et celui des Gratsans avaient toujours vécus depuis la nuit des temps derrière l'immense montagne de l'Ercona et trop occupés à se faire la guerre aucun des deux peuples n'avaient jamais eu l'idée d'aller au-delà de la montagne.
Que se trouvait-il derrière l'Ercona ?
La jeune femme se redressa et répondit :
— Derrière l'Ercona.
Elyrian plissa les yeux et dit :
— J'espère qu'il y a des terres fertiles et moins de neige en bas de l'Ercona car nous n'avons aucun endroit où vivre.
Philesta serra sa cape épaisse sur son cou et se mit à marcher.
Bientôt on n'entendit plus que la neige craquer sous les chaussures des deux jeunes gens.
La jeune femme lança des regards à la dérobée à Elyrian qui marchait d'un pas ferme le regard fixé vers un point invisible devant lui.
Elle pensa que désormais comme elle, il était sans peuple. Seul au monde.
Le jeune homme se retourna brusquement et dit :
— Marche plus vite ! Des hommes de mon peuple patrouillent sans doute dans les environs pour te trouver, ils n'abandonneront les recherches, pour ne pas s'enfoncer trop profondément dans la montagne, que lorsque le soleil se lèvera, d'ici là nous sommes encore en danger.
Les deux jeunes gens accélèrent le pas et arrivèrent plusieurs heures plus tard, en même temps que le soleil s'élevait dans le ciel, face à la fin de la montagne.
Personne n'était allé au-delà.
Philesta se pencha mais ne vit rien. D'épais nuages blancs empêchaient d'apercevoir quoi que ce soit du sol.
Elyrian attrapa son épaule et dit :
— Nous n'avons pas le choix, il va falloir que nous descendions la montagne à la seule force de nos bras et de nos jambes, c'est le prix de notre liberté.
La jeune femme regarda de nouveau le vide et répondit d'une voix qu'elle voulait assurée mais qui ne l'était assurément pas.
— Je suis prête. Allons-y.
Le jeune homme sourit narquois et enleva sa longue ceinture qui faisait deux fois le tour de sa taille et en passa un bout à Philesta pendant qu'il attachait l'autre extrémité à sa taille.
La jeune femme l'imita et ils commencèrent prudemment à descendre.
Philesta serrait ses dents pour qu'elles ne s'entrechoquent pas entre elles tant elle avait froid et peur. La pierre était froide et glissante en conséquent le moindre faux pas conduirait irrémédiablement à la mort.
Elle s'agrippa de ses doigts bleuis de toutes ses forces à la roche en testant avec ses pieds la solidité de la pierre juste en dessous.
Plus d'une fois l'un des deux jeunes gens trébucha et l'autre dû de toutes ses forces tenter de maintenir sa position sur la roche.
A la fin de la journée ils parvinrent à une grande cavité dans la paroi de la montagne dans laquelle ils entrèrent et se reposèrent pour la nuit puis ils repartirent à l'aube le ventre vide.
Les nuages s'espaçaient de plus en plus et les deux jeunes gens purent voir avec étonnement des multitudes de lumières de toutes les couleurs scintiller depuis le sol.
La curiosité leur donna le courage de poursuivre leur descente qui se continua sans pause la montagne ne comportant malheureusement plus de cavités.
Philesta sentit ses bras trembler nerveusement de plus en plus, elle mit donc plus de poids sur ses jambes et ne put plus vérifier la solidité de la paroi avant d'y mettre les pieds.
C'est ainsi qu'arriva ce qui devait arriver, une pierre se déroba soudain sous ses pieds et la jeune femme tomba emportant dans sa chute Elyrian à bout de force.
VOUS LISEZ
Illusion
ParanormalDepuis des siècles, deux peuples, les Katharos, détenteurs du pouvoir de guérison, et le puissant peuple des Gratsans se déchirent dans une guerre sanglante. Suite à de terribles circonstances, Philesta, une jeune guérisseuse Katharos, est capturée...