Chapitre 35.

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Philesta vit la foule se rapprocher d'eux comme une fourmilière et les entourer pour leur souhaiter bon courage et leur faire leurs adieux.

Elle tordit ses mains nerveusement. Il était vrai que pour eux cette expédition était extraordinaire car ils pensaient ne s'être jamais aventuré au-delà de l'Ercona mais elle, elle ne devrait pas être autant anxieuse.

Elle vit soudain Elyrian, immobile au milieu de la foule assourdissante, la fixer avec inquiétude. Leurs regards se croisèrent et le jeune homme se rapprocha d'elle.

Philesta plongea son regard dans ses yeux bleu puis baissa les yeux troublée et resserra les lanières de son sac en se raclant la gorge.

Elyrian qui n'avait pas cessé de la fixer prit ses mains dans les siennes. La jeune femme leva la tête. Il déglutit et dit finalement :

— Sois prudente...

Philesta sentit les battements de son cœurs s'accélérer. Elle tourna les talons pour rejoindre le chef qui l'appelait mais, le jeune homme tira ses mains et l'attira à lui.

Leur regard se recroisèrent une fraction de seconde puis Elyrian pencha la tête et la jeune femme sentit le contact inattendu de ses lèvres sur les siennes.

Cela ne dura que quelques secondes mais elles lui parurent une éternité. Le temps s'arrêta. Elle n'entendait plus les appels du chef ni le brouhaha de la foule autour d'eux, seulement les battements assourdissants de son cœur qui bourdonnaient dans ses oreilles.

Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait, cela n'avait pas de sens, ce n'était pas logique, pourtant, elle sentait les battements désordonnés de son cœur à lui contre ses mains qu'il avait ramené contre lui et ses yeux bleu l'enrober comme si elle était ce qu'il avait de plus précieux.

Philesta ferma les yeux et quand elle les rouvrit le jeune homme n'était plus là. Il avait été emporté par la foule qui les entourait.

La jeune femme regarda autour d'elle pour recroiser ne serait-ce qu'une seconde de plus ses yeux bleu pour se prouver qu'elle n'avait pas rêvé mais elle ne vit que le regard courroucé du chef. Il s'approcha à grands pas d'elle, l'empoigna sans vergogne et la sortit de la ville.

L'immense porte des Gratsans se referma alors lourdement derrière eux faisant taire en même temps la foule.

Le chef des Gratsans lâcha le bras de Philesta et dit brusquement en regardant loin devant lui :

— Passe devant, tu me préviendras si une roche n'est pas solide.

Le jeune femme ne répondit rien encore abasourdis et s'attacha machinalement avec l'autre bout de corde que lui tendait le chef.

Un léger vent glacé la traversa soudain et lui fit reprendre brusquement contact avec la réalité.

Philesta regarda en bas de la montage et frissonna en voyant les épais nuages grisâtres qui cachaient le « monde moderne » à leurs yeux.

Elle prit une grande inspiration et entama la descente de l'Ercona aussitôt suivit par le chef des Gratsans.

A la fin de la journée ils parvinrent épuisés à une grande cavité dans la paroi de la montagne dans laquelle ils entrèrent pour y passer la nuit.

La jeune femme se laissa tomber sur la petite surface de sol, elle s'adossa sur la paroi rocheuse derrière elle et regarda le ciel désormais parsemés d'étoiles face à elle.

Le chef des Gratsans la regarda avec dédain et s'étendit pour dormir.

Philesta l'entendit bouger et se retourna. Elle soupira et ferma les yeux. Cette situation de tension était similaire à celle qu'elle avait vécue lors de sa première descente de l'Ercona avec Elyrian.

Elyrian.

Ses joues se colorèrent légèrement. Elle sentait encore le contact de ses lèvres sur les siennes.

Elle ouvrit brusquement les yeux. Qu'est-ce que ce baiser signifiait-il ? Elyrian éprouvait-il des sentiments pour elle ? Depuis quand ? Et pourquoi l'avait-il repoussée dans ce cas-là ?

La jeune femme sentit soudain une vague d'émotions la submerger. Se pourrait-il qu'il l'aimait aussi à ce moment là mais qu'il l'avait repoussé intentionnellement ?

Les souvenirs jaillissaient brusquement dans son cerveau et s'emboîtaient comme les pièces d'un puzzle.

Le jeune homme n'aurait pas accepté ses sentiments car il allait la trahir et il voulait qu'elle soit le moins blessé possible. Il comptait sans doute sur la rancœur qu'allait occasionner son rejet pour qu'elle ait moins de mal à accepter sa trahison car la vision qu'elle avait de lui aurait changée négativement mais elle n'avait pas changée et elle avait tout de même été profondément blessée.

Cela expliquerait aussi pourquoi Elyrian était honnête des fois avec elle mais avait été obligé d'être sec pour qu'elle ne s'attache pas à lui, c'est pour cette raison qu'il l'avait repoussé au moindre contact physique et qu'il avait littéralement changé de comportement dans le parc d'attraction, il était vraiment lui dans l'attraction mais une fois sortit il avait immédiatement revêtu son masque d'indifférence.

Si donc il l'aimait réellement cela signifiait qu'il n'avait pas mentit et que toute son histoire était vraie.

Philesta posa sa tête sur ses mains comme pour contenir le flot de souvenirs qui jaillissaient dans son cerveau.

La conversation que le jeune homme avait eut avec la femme séduisante dans le salon se rejoua dans sa tête et prit alors tout son sens. Elyrian parlait de sa mère et de ses sœurs captives de l'Illusion et recherchait réellement l'IA.

Elle se rappela également de son étonnement lorsqu'elle avait comprit que le voyage en péniche avait été inutile puisque le jeune homme connaissait déjà l'emplacement de l'Illusion. Il cherchait volontairement à rallonger le voyage pour ne pas la trahir tout de suite.

La jeune femme leva la tête. Elyrian l'aimait donc vraiment et n'avait pas mentit sur son histoire.

Il était donc digne de confiance...

Elle fixa les lumières dorées briller dans l'immensité ébène face à elle et sentit ses yeux s'embuer de larmes.

... mais elle avait été trahie tellement de fois, arriverait-elle à lui faire de nouveau confiance ?

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