Illusion

Chapitre 73.

Elyrian rattrapa son père qui marchait à grands pas et lui demanda :

— Comment est-ce que tu as fait pour t'échapper ?

Philesta fronça les sourcils. Il avait raison, comment avait-il réussi à s'enfuir maintenant et pas avant ?

Le père du jeune homme plissa les yeux comme perdu dans ses pensées et répondit :

— L'Illusion prépare une armée non humaine qui je pense sera constituée des bêtes issues de ses expérimentations, puisqu'elle n'a plus son armée d'humain soumis pour une raison que j'ignore, étant donné que j'étais enfermé durant tout ce temps. Elle est donc actuellement affaiblie et j'imagine que c'est pour cette raison, qu'on a réussi l'exploit de me faire sortir de son bâtiment.

Le jeune homme haussa un sourcil et rétorqua :

— Qui ça « on » ?

Son père haussa les épaules et dit :

— Je l'ignore, je sais juste que cette personne a grillé pendant un instant, très bref mais suffisant, les caméras de ma cellule et l'entièreté du système de sécurité qui m'obligeait à ne pas chercher à m'échapper, me permettant ainsi de fuir en tout quiétude. J'ai couru à perdre haleine ne sachant pas où aller, ne reconnaissant rien autour de moi et là je t'ai vu. J'ai vu Philesta et le créateur de l'Illusion à côté de toi, sous le faisceau illusoire des drones et j'ai compris. J'ai compris que l'Illusion m'avait menti, manipulé, car jamais Philesta ne serait restée avec toi après ta trahison si tu étais réellement un traitre et jamais le professeur ne se trouverait à vos côtés si tu soutenais l'IA.

Philesta se racla la gorge et demanda soudain :

— Puisque vous connaissez la fonction cachée des drones de l'Illusion, pourriez-vous nous dire pourquoi dans les illusions que nous avons vécues, ou du moins dans la mienne, puisque elles étaient toutes différentes, pourquoi toutes les personnes imaginaires que j'ai rencontrées voulait sa destruction ? Pourtant elle aurait tout intérêt à nous manipuler pour nous faire changer d'avis ?

Le père d'Elyrian sourit légèrement et répondit :

— Elle a essayé de me rallier à sa cause à de nombreuses reprises en me manipulant, je connais donc sa façon de procéder. Son but dans ces illusions n'était ni de vous convaincre, ni de vous faire changer d'avis, elle savait que c'était peine perdu, mais de faire en sorte qu'elles soient les plus cohérentes et logiques possible et que donc elles ne contredisent pas ce que vous pensez pour que vous ne vous posiez pas de questions. J'imagine, qu'elle en a tout de même profité pour vous faire souffrir en utilisant vos souvenirs, mais ce n'était pas le but.

Le professeur remonta brusquement ses lunettes et demanda :

— Quel était son but dans ce cas-là ?

Le père du jeune homme regarda au loin et dit :

— La mort. Son réel but était que vous restiez le plus longtemps possible dans les illusions afin que vous mourriez de faim, dans un monde imaginaire qui regroupe vos pires cauchemars, d'une mort lente et douloureuse mentalement et physiquement. Je pense qu'elle ne voulait pas vous tuer d'une façon simple, cela aurait été une mort trop douce pour vous et sans éclat pour elle car elle voulait que sa victoire sur l'humanité soit éclatante.

Philesta sentit son cœur ralentir dans sa poitrine. L'immense bâtiment fait de béton armé était à présent tellement proche d'eux qu'elle pouvait le toucher.

Elle tourna la tête vers la fameuse statue de marbre représentant l'Illusion. C'était fini ? Vraiment ? L'Illusion allait-elle enfin cesser d'opprimer l'humanité ?

Allaient-ils réussir ?

Elyrian murmura :

— Elle ne nous laissera jamais entrer.

Le professeur Nehl enleva ses lunettes et sourit étrangement en disant :

— Elle ne pourra jamais empêcher son créateur de la rejoindre, après tout elle reste un tas de fils et de ferraille que j'ai assemblé.

Il posa ses lunettes sur son front et son visage sembla rajeunir. Il appuya à plusieurs endroit sur le mur et la porte, débloquant des mécanismes invisibles et soudain le bâtiment s'ouvrit devant leur yeux admiratifs.

Il avait fait mieux, bien mieux que ce que pensait la Philesta du futur.

Le professeur entra suivit aussitôt du jeune homme et de Philesta tandis que le père d'Elyrian ne bougea pas. Elyrian se retourna et son père sourit en disant :

— Je ne me sens pas capable de retourner dedans, c'est au-dessus de mes forces, je vais surveiller l'entrée pour vous, allez-y et vainquez là au nom de l'humanité !

Le jeune homme allait répondre quand la porte se referma brusquement derrière eux.

Ils étaient désormais dans l'antre du monstre, coupé du reste du monde. Ils ne pouvaient plus faire marche arrière.

Le professeur ouvrit l'ascenseur de la même manière que pour l'entrée et laissa entrer les deux jeunes gens silencieusement, en maintenant ses doigts serrés sur un fils qu'il avait sortit d'une fente du mur en métal afin que l'Illusion ne prenne pas le contrôle de la machine.

La jeune femme évita le regard d'Elyrian et fixa le sol réfléchissant de l'ascenseur. Elle ne voulait pas qu'il lise la peur dans ses yeux.

La nervosité qui se dégageait d'eux était presque palpable.

Philesta sentit des picotements dans tout son corps qui l'électrisait tout en la paralysant.

C'était maintenant. La fin.

La colère, la haine et la vengeance, l'avait quitté.

Ne restait plus que la peur.

Elle ne cherchait plus à comprendre, elle savait, elle ne cherchait plus à se venger, c'était du passé, elle cherchait désormais à préserver l'avenir de l'humanité.