Les Rivières aux Poignets

L'autre bout de mon monde

J'ai voyagé jusqu'à l'autre bout de mon monde
À l'endroit de ces vers, à l'envers de l'endroit
Quand je tombais d'amour à chaque chaise blonde
Quand je sciais les pieds de mes lettres sans voix

Si j'ai les yeux fermés, c'est que j'unis les vers
Comme on relie les points des lumières éteintes
Pour donner à la nuit quelques formes d'hier
Pour embrasser nos vies, aux voeux de nos mains jointes

J'ai voyagé jusqu'à l'autre bout de mon monde
Quand le coeur est moitié à ne battre que d'un
Quand les mois, les années, ne sont que des secondes
À comprendre le temps tant qu'il en reste plein

Si j'ai des rimes folles, je ne suis plus fou
J'ai crié le silence pour taire à jamais
Les mots et les violences, les cris et les coups
Et si mon ciel est bleu, il frappe mes pensées

J'ai voyagé jusqu'à l'autre bout de mon monde
Quand je n'étais pas né, ou alors loin d'ici
On vient tous d'un ventre ou peut-être d'une tombe
La vie d'après la mort, la mort d'avant la vie

Si je m'égare autant sur les rails du passé
Je crois que sans hiver, il n y a pas d'été
Si je vole d'en bas c'est que j'ai peur du vide
Et si je parle tant, c'est que je suis timide

J'ai voyagé jusqu'à l'autre bout de mon monde
Quand le temps clignotait au travers des barreaux
De mon lit en hauteur, de mes rêves qui grondent
Inondant à mon cœur quelques perles de mots

Si je laissais ma porte entre ouverte d'un rien
Et les croissants de lune danser une ronde
Au bas de mon rideau, dans le creux de ma main
Je gardais deux issues ; la maison, ou le monde...

J'ai voyagé jusqu'à l'autre bout de mon monde
Jusqu'à ces continents que l'on a désertés
Soufflés par les tempêtes des envies profondes
Quand le sable est mouvant, on n'peut que s'enfoncer

Si ma vie est heureuse, je voudrais tourner
Parfois le monde entier, juste pour naviguer
Sous ces nuits allumées et ces soleils éteints
Me raconter l'amour, et que tout ira bien...