Les souvenirs

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On était deux, il était un,
On était trois, on était bien...
Sur un radeau en matelas,
Nous on jouait aux matelots.
J'étais le p'tit, et dans les buts
Je plongeais sans peur de la chute.
On avait l'âge des invincibles
Où tous les rêves sont accessibles ;
Cosmonaute ou vétérinaire,
Ou bien président de la Terre !
Moi je voulais écrire des mots...
Et jouer au foot avec des pros.

Aventuriers dans la forêt
Juste adossée à not' quartier,
On inventait nos univers...
On fabriquait nos grands palais
Avec du bois et des grosses pierres.
Moi j'étais p'tit, moi j'regardais
Et j'ramassais quelques fougères
Qui parfois me coupaient les doigts.
Pourtant Maman me prévenait,
Elle me disait tous les dangers...
Quand on est grand comme une pomme,
Il est rapide de s'faire croquer !

On avait l'âge de nos disputes
Et les mots durs de nos amours.
Doigt sur une bouche qui dit "chhhhuuuut"
Quand on faisait trop de tambour.
On se disait des méchancetés
Avec des mots mal maîtrisés,
On ne savait pas trop leurs sens
On comprenait par évidence...
On oubliait très vite aussi
Le vrai sujet de nos discordes.
On s'détestait à l'infini...
Juste le temps d's'aimer plus fort...

On avait l'âge des demis ;
" J'ai pas 7 ans, 7 ans et d'mi ! ".
L'âge où le temps prend bien son temps...
Et l'on aura jamais vingt ans !
L'âge des Mamans à la rescousse ;
Est ce que cet âge s'éteint vraiment ?
L'âge des chocolats en mousses
Et des bonbons qui collent aux dents.
On avait l'âge des éternels ;
Quand chaque jour est une vie,
Quand chaque matin est un soleil...
Que l'on étale par appétit !

Roulé-boulé sur le talus
Presque aussi grand qu'une montagne,
J'y suis r'tourné, depuis, j'ai vu ;
Il a la taille d'un dos d'âne !
Quand on est p'tit, tout paraît grand,
Ça participe à la magie...
L'imaginaire de l'enfant,
C'est le plus beau cadeau d'une vie !
Certains préservent la magie
Malgré les rides qui les masquent.
Vous les verrez, les yeux qui brillent
Comme deux grosses billes qui les démasquent.

Plus je te vois, plus j'me souviens
Comment c'était, la vie, gamin.
Les essentiels, les émotions
Et la joie des récréations,
Pour un quart d'heure de liberté,
Pour un quart d'heure d'éternité !
Comme tout est neuf, tout est très fort,
Chaque douleur est une mort...
Qui dure seulement un court instant...
Et l'on renaît en rigolant...
On ne triche pas à cet âge là...
À cet âge là, on ne ment pas.

Je m'ennuyais, parfois, souvent...
Le sable tombait doucement...
Et je pensais, et je rêvais,
J'imaginais comment un jour
Je ne m'ennuierai plus jamais !
J'imaginais comment un jour
Je ferai tout c'que je voudrais !
J'imaginais ! Oui, tous les jours...
L'ennui précieux comme une pierre...
L'ennui nourrit les jeunes esprits.
Il fait pousser l'imaginaire...
Comme une fleur rouge de vie...

Les Rivières aux PoignetsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant