Chapitre 22 - Damian

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-Que désirez-vous durant cette séance ?

Je reçois une nouvelle cliente, elle doit avoir la trentaine et est couverte de tatouage.

-Alors moi j'ai un truc pour la praise et le dirty talk, j'attends donc de toi que tu me traite comme une princesse tout en me dénigrant.

Je tente de ne pas laisser voir mon étonnement. Je n'ai rien contre le fantasme des louanges et du traitement de princesse, j'avoue apprécier le donner, cela met en avant la beauté et la reconnaissance que les femmes devrait avoir selon moi mais c'est la première fois qu'on me le demande au boulot... et je ne suis pas sûre de vouloir le faire à quelqu'un que je ne connais pas, quant au dirty talk, il demande de la communication au préalable pour savoir où est la limite, et si on peut utiliser des gros mots ou pas, mais il est déjà plus facile à utiliser vu qu'on l'entend souvent dans le porno.

-Je ne sais pas si vous avez lu le catalogue mais moi je fais plutôt du soft. Je peux vous rediriger vers un collègue qui est spécialisé dans le jeu de rôle et de domination.

Elle me coupe presque la parole et me dit :

-Non. Je te veux toi. Je suis prête à offrir plus d'argent.

-Madame je n'ai pas besoin de plus d'argent, et je souhaite vous offrir la prestation que vous désirez et cela n'est malheureusement pas avec moi.

Elle parait outrée.

-Je ne suis pas sûre que ton patron serait ravi d'apprendre que tu refuses de l'argent...

Elle a l'air d'être le genre de personne à coller des procès aussi facilement que les américains.

Je ne sais pas si je devrais accepter alors que ce n'est pas ma spécialisation et que je n'ai, par ailleurs, pas envie de faire cet effort.

Elle ne me laisse pas le temps de finir ma réflexion qu'elle part de la chambre.

Je suis perplexe mais me dis qu'elle a certainement compris que je n'étais pas le bon professionnel pour cela.

Sauf que j'entends toquer à ma porte cinq minutes plus tard.

-Éric ? qu'est-ce qu'il y a ?

Il entre et ferme la porte derrière lui, il parait frustré.

-écoute bonhomme, Luciana la femme avec qui tu avais rendez-vous, est venu se plaindre que tu l'a recalée.

-Je ne l'ai pas recalée, je lui ai proposer d'aller chez un collègue spécialiser dans le praise kink... d'aller plutôt chez Quentin, tu sais que je ne fais pas ça normalement.

Il lâche un soupir et continue.

-Je sais mais dans certaines situations il faut savoir revenir sur ses positions. Cette femme propose une grosse somme d'argent qu'on ne peut pas refuser surtout avec deux collègues en moins. Et elle soutient l'entreprise depuis plusieurs années, c'est déplacé de lui refuser ce qu'elle souhaite.

Deux de mes collègues mâles ont arrêtés, l'un à cause d'une maladie sexuelle curable et l'autre partait à la retraite. Nous ne sommes donc plus que 3 hommes alors qu'il y a plus d'une dizaine de prostituée femme. Cette situation me gêne énormément. Je sais que je suis censée m'adapter à mes clientes mais jusqu'à maintenant j'ai toujours pu faire respecter mes limites et définir ce que j'acceptais de faire ou pas.

-j'ai pas le choix c'est ça que tu dis ?

Je ne peux m'empêcher de penser à Téa, c'est avec cette nouvelle fille que j'ai envie de faire ça, de complimenter son corps, de lui montrer à quel point j'aime la baiser.

Mes amis m'ont souvent posé la question de ce qui différenciait un rapport professionnel et un rapport dans ma vie privée.

J'ai toujours répondu l'intimité et la vulnérabilité.

Ce n'est qu'avec mes flirts ou mes relations que je vais complimenter leur corps, être vraiment moi-même et dire ce que je ressens durant et après le sexe. Il y a une certaine douceur et attention en plus, que je ne donne pas à mes clientes car il me faut pouvoir séparer les deux et vivre deux expériences différentes, sinon mes émotions se mêlerait à mon travail ou alors l'inverse et je serais distant avec la personne que j'apprécie.

-Fait pas cette tête Dam. C'est juste histoire de quelques fois.

Je croise les bras et m'appuie contre la table sur laquelle j'avais touché le corps de Téa pour la première fois.

Je considère Éric comme ma famille mais parfois j'oublie que c'est mon patron.

-ça fera pour les deux nuits non payées. Luciana revient mercredi.

Je secoue la tête tout en la baissant. Je ne pensais pas qu'il apprendrait que Téa est restée deux nuits sans payer, il y a tellement de chambres et de gens qui défilent que j'imaginais que ça ne soit pas visible. Il s'apprête à sortir de ma chambre mais revient sur ses pas.

-Damian, tu sais que je n'ai jamais voulu que tu finisses ici... ton père non plus aurait pas souhaiter que tu travailles dans ce milieu. Donc ne me donne pas de raisons de plus pour te virer et te faire faire autre chose.

Désormais il sort de la chambre me laissant seule avec la pensée de mon père mort et le fait qu'il ne serait certainement pas fière de moi.

Je tape fort contre la table avec le plat de ma main et regarde par la fenêtre, blessé.

De l'autre côté de la honteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant