Lames d'Argent

31× Résurgence

Aerin

La douce chaleur d'un drap se fit sentir sous mes doigts ; ce fut la première chose que je remarquai lorsque je commençai à émerger. L'esprit encore engourdi, j'ouvris peu à peu les yeux, éblouie par la vive lumière du jour. J'avais mal au crâne...
Mon regard fit le tour des lieux avant que je ne me redresse en sursaut la seconde d'après. Quel était cet endroit ? Comment avais-je atterri ici ?

Je tentai de refréner les battements de mon cœur et préférai entreprendre une analyse détaillé de la pièce plutôt que de succomber tout de suite à la panique. À première vue, il s'agissait d'une spacieuse chambre luxueusement décorée de mille dorures. Dans le flou le plus total, je me remémorai mes derniers souvenirs... J'avais quitté la taverne et des hommes avaient tenté de m'agresser, je m'étais débarrassée d'eux puis... plus rien. Je posai une main sur ma tête et grimaçai. J'avais l'impression d'oublier quelque chose d'important, mais quoi ?

Je tirai les draps qui me recouvraient et sortis du lit dans lequel j'avais été installée avec précaution. Je commençai à déambuler lentement dans la vaste pièce, intimidée par tant de splendeur. La chambre était si majestueuse que je n'osai rien toucher de peur de ruiner le décor dressé pour ce que je supposai être une famille de la haute noblesse. Comment avais-je pu me réveiller dans un tel palace ?

Mon regard fut interpellé par un long miroir. Je m'en approchai et pus y contempler mon reflet étonné. Quelle était cette robe que je portais ? Elle ne m'appartenait pas ! La dite tenue aux bordures argentées était longue et blanche. Elle remontait jusqu'au cou et était dénudée aux épaules pour repartir en de longues et larges manches reliées au reste. Je dus l'admettre, elle était somptueuse. Je vérifiai mon front et soupirai de soulagement en y voyant toujours trôner mon inséparable bijou de tête en forme de goutte d'eau. Cependant cette certitude ne suffit pas à apaiser mon trouble. Je ferais mieux de filer en vitesse. Je ne savais pas qu'elle était la raison réelle de ma présence ici et préférais ne pas m'attarder plus longtemps en ces lieux inconnus.

Comme pour contredire ma décision, la porte se mit à grincer doucement pour me signaler la création d'une embrasure. Je tournai la tête vers le bruit dans un frisson d'appréhension et d'excitation. J'allais enfin découvrir l'auteur de tout ceci. Une foule de questions se pressait déjà dans mon esprit. Je crus presque voir son ouverture durait une éternité tant l'impatience courait mes veines. Qui était-ce ? Quelles étaient ces intentions ?

La porte finit par s'ouvrir en grand. Un pied franchit le pas vers l'intérieur de la pièce. Un plateau de nourriture dépassa d'abord, puis l'ombre d'un visage et d'une silhouette entière apparurent. Le corps d'un homme vêtu d'une sobre veste marron et d'une chemise blanche se découpa dans l'entrebâillement. Autour de son cou était accroché le pendentif d'une pierre en forme de goutte, identique à celle de mon bijou de tête à l'exception de sa taille plus imposante. Sa face sortit de l'ombre et je pus enfin voir à quoi le personnage ressemblait. Ce dernier me fixa avec intensité dans une expression indescriptible. Il posa son plateau sur un meuble à proximité pour se jeter sur moi en un instant. Le jeune homme me serrait dans ses bras de toutes ses forces, comme pour s'assurer de ma présence véritable.

- Tu m'as tellement manqué...

J'eus un moment d'absence, ahurie. Qui était cet inconnu qui m'étreignait comme si sa vie en dépendait ? Je me repris sans tarder et le repoussai violemment. Je reculai d'un bond à une distance de sécurité suffisante. Le cœur encore battant, je me positionnai en garde, sourcils froncés et poings en avant. J'examinai mon hôte avec méfiance afin de l'analyser plus en détails. À en voir sa mâchoire mature, je lui donnai aisément un âge environnant les vingt-huit ans. Ses cheveux, teintés du même bleu que les miens, étaient coiffés de mèches qui balayaient son front en travers. Ses yeux outremer en forme d'amande me fixaient de cette même expression incompréhensible, seulement il semblait cette fois aussi stupéfait et même un peu triste.