63× L'Exil

103 13 44
                                    


Alexandre

Incapable de bouger, je demeurais allongé sur le sol de la chapelle en construction dans laquelle mon combat contre Nyx s'était soldé par une cuisante défaite. J'avais désormais compris pourquoi je demeurais encore là, vivant, gisant au sol. Si la puissante chef des Xilliens m'avait épargné, c'était en sachant que jamais personne ne me retrouverait. J'étais isolé des autres Lames d'Argent et ainsi blessé, j'étais devenu inapte à marcher jusqu'à la sortie. Néanmoins, le laps de temps qui s'écoulerait avant que je ne succombe à mes maux me laissait tout de même le temps de ressasser mon passé. C'était sans doute ce dont elle avait voulu. Elle chérissait le besoin de me faire ressentir un désagréable sentiment de regret avant une mort certaine.

Nyx, tu avais bien changé...

* * *

Ma famille et moi vivions paisiblement dans un village éloigné de toutes villes. J'étais un enfant jusqu'alors ordinaire, résidant au Royaume de Xeltos. À cette époque le pays n'était pas encore l'empire qu'il devint par la suite.

J'avais toujours adoré me promener dans les bois qui entouraient mon village. Dans ces moments là, j'étais toujours accompagné de ma meilleure amie, Nyx Xanthia. C'était mon "amoureuse" comme aimaient l'affirmer les autres enfants.

Alors que nous gambadions joyeusement entre les arbres, je me baissai soudain pour cueillir l'une des pâquerettes qui jonchait le chemin. Je me tournai vers la brune et la lui tendis dans un grand sourire :

- Tiens ! C'est pour toi !

Ses yeux marron pétillèrent d'émerveillement et elle s'exclama, comme sincèrement touchée :

- Merci Alex !

- Dit Nyx... Quand on sera plus grands, tu voudras bien m'épouser ?

Elle plongea ses yeux en amande dans les miens en rougissant et répondit d'emblée :

- Bien sûr !

Nous continuâmes à marcher avec bonne humeur jusqu'au moment où j'aperçus des oiseaux perchés à un arbre. Je m'éloignai un instant d'elle pour m'élancer joyeusement vers eux.

- Eh, Nyx ! Regarde ! Il y a des...

Je m'interrompis brusquement, horrifié par la scène qui se jouait désormais sous mes yeux. Deux hommes étaient en train d'agresser mon amie. La fillette n'avait pas même eu le temps de se plaindre qu'ils lui avaient passé un bandeau autour de la bouche pour la faire taire. Malgré tout, ses yeux suppliants et apeurés parvenaient tout de même à retransmettre ses émotions. Étaient-ils là depuis longtemps ? Aucun de nous deux n'avions senti leurs présences jusque là.

- Qu'est-ce que vous faites ? Lâchez-là tout de suite !

Alors que l'un la maintenait fermement immobile, l'autre s'approcha de moi à pas de loup pour m'intimer :

- Ne crie pas si fort. Nous voulons seulement vous vendre comme esclaves. Allez, laisse-toi faire, ce ne sera pas douloureux !

Instinctivement, je reculai d'un pas, effrayé. Mon corps commençait à trembler d'une peur irraisonnée que je ne parvenais plus à contrôler. Qu'allait-il nous arriver ? Je jetai un œil au second homme qui retenait Nyx prisonnière. Les yeux de cette dernière brillaient de larmes. Je serrai les dents. Je le haïssais plus que tout. Comment cet individu osait-il s'en prendre à elle ?

Que ce misérable soit emporté par les tréfonds impénétrables de la terre !

À cet instant, le sol se déroba sous ses pieds. L'agresseur commençait à s'enfoncer dans des sables mouvants qui n'étaient pas là auparavant. Sous le coup de la surprise, il lâcha prise sur Nyx qui s'écarta sur-le-champ. L'homme poussa un cri de panique avant d'hurler :

Lames d'ArgentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant