Chapitre 6

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Washington D.C (États-Unis), Maison Blanche, 13h16.

             William étouffait. Il n'avait plus conscience de son corps, ne savait plus où il était. Lorsqu'il ouvrit les yeux, la première chose qu'il vit fut le pare-brise de sa voiture, en miettes. Prisonnier de son siège, la tête en bas, une épaisse fumée l'enveloppait, l'empêchant de voir au-dehors. Étrangement, aucun son ne parvenait à ses oreilles, comme s'il portait un casque. Sa ceinture de sécurité, qui lui avait permis de ne pas se rompre le cou, lui faisait horriblement mal maintenant. Il avait l'impression qu'elle lui rentrait dans la chair, lui enfonçant la cage thoracique.

             William rassembla ses esprits, refusant de céder à la panique. Il inspira profondément pendant cinq secondes malgré la douleur, puis bloqua sa respiration pendant quinze autres secondes, et expira tout l'air de ses poumons durant dix secondes. Il recommença six fois et se sentit immédiatement mieux, les idées plus claires. La douleur devenue plus supportable, il commençait à avoir conscience de la position de son corps dans l'habitacle. Il tenta de décrocher la ceinture sans y parvenir. Tant pis, il y avait un couteau suisse dans la boîte à gants, il devait pouvoir l'atteindre. William tendit le bras, mais ne parvint qu'à l'effleurer. Il tenta de gagner quelques centimètres en se remontant, de façon à avoir le bas du dos bien calé contre le siège. Puis il se plaqua contre la ceinture et tendit le bras au maximum. Cette fois, il put toucher la poignée, mais il lui manquait encore deux ou trois centimètres pour l'ouvrir. Il entreprit alors de se balancer légèrement d'avant en arrière et, au bout de quelques secondes, se projeta vers l'avant, tandis que la ceinture s'incrustait dans sa peau. Il se retint de crier, parvint finalement à agripper la poignée et, au prix d'un dernier effort, l'actionna. La boîte à gants s'ouvrit et son contenu se vida sur le plafond devenu plancher.

             Il y avait là deux cartes, une de Washington D.C et une du nord-est des États-Unis, quelques factures, une boîte de chewing-gums, et le couteau. William s'en empara et commença à couper sa ceinture juste au-dessus de l'accroche. Au fur et à mesure qu'il l'entamait, il se sentait glisser de son siège. Lorsque elle fut sur le point de lâcher, il arrêta de couper, protégea de ses deux bras sa tête et sa nuque, et recommença à se balancer, mais cette fois de haut en bas. Puis, il se projeta vers le sol avec tout ce qui lui restait de force, la ceinture lâcha, et il s'écrasa sur la tôle défoncée.

             Après avoir pris quelques secondes pour récupérer, il sortit de la voiture à quatre pattes, puis s'assit quelques mètres plus loin. Sa poitrine lui faisait horriblement mal. Il souleva son polo, une marque rouge vif d'environ huit centimètres de large s'étendait de l'épaule gauche au bas des côtes du flanc droit. La ceinture ne s'était enfoncée que d'un ou deux centimètres, mais cela avait brûlé William assez sérieusement.

             William observa autour de lui. Ce qu'il avait tout à l'heure pris pour de la fumée était, en fait, un épais brouillard enveloppant tout le site de l'explosion. Ce dernier donnait l'impression que l'on n'y voyait pas à cinq mètres mais en réalité, on distinguait les contours de chaque bâtiment, de chaque personne, de chaque voiture. Seuls avaient disparu les détails, les couleurs et les sons.

             William décida finalement de se diriger vers les gyrophares qu'il apercevait au loin. Ils étaient de plus en plus nombreux, ce qui devait signifier que l'explosion devait être récente. Petit à petit, le brouillard devenait de la brume, les sons revenaient, les couleurs se ravivaient. Lorsqu'il fut complètement sorti de cette poussière, William fut pris en charge par un médecin, qui l'invita à aller s'installer dans l'une des ambulances. William suivit le médecin mais, avant de monter dans le véhicule, se retourna pour se rendre compte de l'étendue des dégâts. Ce qu'il vit le terrifia, il eut un haut-le-cœur. A travers le brouillard, il put s'apercevoir que tout était détruit, qu'il ne restait rien de la Maison Blanche, ni de son magnifique parc. Tout autour, les voitures et les passants avaient été projetés à plusieurs mètres de là, le trottoir était défoncé, la chaussée éventrée. William sentit ses jambes le lâcher, mais le médecin, aidé par l'ambulancier, le rattrapa à temps.

Le compte à reboursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant