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Quelque part dans les rues de New-York City, 11h16.
Quentin était sorti du temple depuis plusieurs heures maintenant. Alors qu'il s'attendait, comme cela avait été le cas avec les gens qu'il avait rencontré ou vu à la télévision, à ne plus se souvenir de son entretien avec l'étrange homme, il se rappelait de tout. La question était que faire désormais.
Il avait encore le temps de se rendre chez sa mère, il pourrait alors leur expliquer que Robert allait bien et qu'ils s'étaient réconciliés. D'un autre côté, il savait pertinemment qu'Amélie lui en voulait encore et il n'avait le cœur à leur imposer à tous les deux un nouvel et cruel affrontement. Il ne pouvait plus se comporter en égoïste avec elles, comme il l'avait toujours fait. Elles méritaient de terminer leur vie en paix, toutes les deux, dans l'amour et la sérénité, sans qu'il vienne troubler cette harmonie.
Depuis sa sortie, Quentin marchait au hasard dans les rues de Manhattan. Elles étaient quasiment désertes, en dehors de quelques pauvres bougres errant sans but, attendant la mort, tout comme lui. La plupart des gens s'étaient réfugiés dans les campagnes alentours, ou alors calfeutrés dans leurs appartements. Ils avaient pour la plupart rejoint les gens qu'ils aimaient, attendant ce qui allait se passer.
En revanche, pendant la nuit ainsi qu'au petit matin, les rues étaient de véritables coupe-gorges. Et même si c'était à la mi-journée que l'on avait le moins de risques de faire de mauvaises rencontres, le danger était toujours présent. Mais il n'en avait que faire. Cela ne changerait rien. Il n'avait plus peur, et ce depuis un bon moment. Il s'était résigné à mourir, la seule chose qu'il ressentait à l'heure actuelle, ce n'était plus de la peur, mais cet incroyable sentiment de gâchis. Tandis qu'il errait dans les rues dévastées, il n'avait de cesse de penser à sa famille, aux bons comme aux mauvais moments. Il marchait les poings serrés, les yeux brûlants, frottant ses mâchoires l'une sur l'autre.
Tout à coup, un cri strident le fit revenir à lui. Il provenait d'une petite ruelle sur sa droite. Quentin se saisit d'un énorme tesson de verre provenant de la vitrine cassée d'un magasin de meubles et s'engouffra sans hésitation dans le sombre passage.
- Au secours ! Pitié ! Aidez-moi !
Il y était presque, les cris étaient de plus en plus proches.
- Ne faites pas ça ! Je vous en prie ! Pitié ! Pas ça !
Un homme d'une trentaine d'années avait plaqué une jeune femme au sol, tentant de lui arracher son jean. Lorsque Quentin arriva sur les lieux, l'homme frappa la jeune femme au visage. Sa tête fut projetée en arrière et heurta violemment le bitume. Elle ne se débattait plus, du sang commença à s'écouler.
- Arrêtez ça tout de suite !
Quentin menaçait le jeune homme avec l'impressionnante lame de verre. Ce dernier ne sembla pas du tout impressionné et sortit à son tour un énorme couteau de chasse de sa ceinture.
- Dégage de là, blondinet. T'as rien à faire ici. Va plutôt profiter de tes dernières heures. Fais comme moi, offre-toi du bon temps !
Quentin se rendit compte qu'il était mort de peur. Il s'était préparé à mourir, pourtant la panique le gagnait alors qu'il risquait sa vie. Mais il ne pouvait pas abandonner la jeune femme, il ne pouvait pas se comporter comme un lâche une nouvelle fois.
- Hors de question ! Tu la lâches immédiatement ou t'en payes les conséquences !
Le jeune homme prit un ton plus sec, cette fois-ci.
- Écoute-moi bien. J'ai l'intention de tirer le plus de coups possible avant ce soir et c'est pas un minable comme toi qui va m'en empêcher ! Alors mate si ça peut te faire plaisir, je te laisserai même ce qui reste, si ça te dit. Mais là maintenant, tu fermes ta gueule !
Le cœur de Quentin battait à toute vitesse. Il avait la gorge sèche et son corps était parcouru de tremblements. C'est alors que le regard de la jeune femme à moitié assommée croisa le sien. Ses yeux le suppliaient d'intervenir, de ne pas la laisser là. Décidé, il se rua sur le jeune homme. Il lui décocha un violent coup de pied dans la tête et le jeune homme fut projeté un peu plus loin. Il ne lui laissa pas le temps de se relever et lui asséna d'autres coups de pied dans les côtes. Au sol, se protégeant la tête de ses mains, le jeune homme hurlait de rage et de douleur. Puis, après une terrible rafale de coups de pied, il cessa de bouger.
Quentin se retourna immédiatement pour voir comment la jeune femme se portait, ce qu'il n'aurait jamais dû faire. Tournant le dos à son adversaire, ce dernier lui planta son couteau dans le mollet droit et tourna plusieurs fois la lame dans la chair. Quentin hurla et s'effondra sur le sol. Le jeune homme rampa à toute vitesse vers lui et lui planta l'énorme couteau dans le ventre, à trois reprises. La douleur était atroce. Quentin sentait la lame pénétrer dans ses organes et les déchirer, déversant leur contenu brûlant dans tout son abdomen, qui n'était plus qu'un immense brasier. Alors qu'il sentait la vie l'abandonner, il concentra le peu de force qui lui restait et porta un coup éclair de la gauche vers la droite en direction du visage de son agresseur. Ce dernier porta immédiatement ses mains vers sa gorge, secoué de spasmes. Quentin lui avait tranché la gorge. Le jeune homme s'effondra, dans un horrible gargouillement. Quelques secondes plus tard, c'en était terminé.
Quentin lâcha le tesson de verre et sa tête vint heurter violemment le sol. Il n'avait plus la force de la retenir. Il allait mourir, il le savait, et même s'il était terrifié à cette idée, il avait hâte, tant il avait mal.
La jeune femme se précipita vers lui.
- Monsieur ! Monsieur ! Est-ce que ça va ?
Mais sa voix se faisait de plus en plus lointaine. La douleur s'atténuait peu à peu et, pour la première fois depuis bien longtemps, il avait froid. Il sentait son corps tout entier s'engourdir et son esprit partir. Loin, très loin.
- ... Monsieur... Monsieur... Répondez-moi... Ouvrez les yeux...
Quentin s'éteignait, paisiblement. Il n'avait plus peur. Il avait sauvé cette jeune femme. Il pouvait partir en paix, avec le sentiment d'avoir fait quelque chose de bien. Il repensa à sa famille et le terrible sentiment de gâchis laissait progressivement la place à de l'amour, tout cet amour qui les liait, de l'amour pur.
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Le compte à rebours
ParanormalPartout sur Terre, au même moment, de terribles explosions réduisent en cendres des lieux de forte importance politique, religieuse ou économique. Se pose alors la question de savoir qui en est l'auteur. Aux États-Unis, comme partout ailleurs, c'es...