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Quentin Falk, région de Poughkeepsie (État de New York), 10h05.
Depuis son réveil, Quentin n'avait qu'une idée en tête, se rendre auprès de sa mère. Suite à la mort de son père, elle avait décidé de quitter la vieille demeure familiale au milieu des bois pour rejoindre la principale ville du comté, Poughkeepsie. Aux dernières nouvelles, ce qui remontait à plus d'un an, sa petite sœur vivait avec elle. Il fallait environ deux heures pour faire le trajet de New-York mais, avec les évènements récents, Quentin avait mis plus d'une heure à quitter la ville. Assis au volant de sa corvette, il revoyait en boucle les images de son poing s'écrasant sur le visage de son frère, les yeux effarés de sa sœur, et ressentait encore la sensation de son coude broyant le nez de son père. Ses yeux le brûlaient, mais il n'avait plus de larmes à verser.
A peu près à mi-parcours, il revécut les instants qui avaient suivi l'annonce du décès de son père. Sa mère l'avait appelé à son domicile et bien qu'il y soit présent, il n'avait pas répondu, comme à son habitude. Dès les premiers mots sur son répondeur, il avait su que quelque chose de terrible venait d'arriver. La voix déchirante de sa mère, étouffée de sanglots, lui avait annoncé le décès de son père à travers une machine. Encore une chose qu'il ne parvenait pas à se pardonner aujourd'hui. Il était resté assis dans son fauteuil, les yeux rivés sur le répondeur. Il savait que son père se faisait vieux et qu'il ne serait pas immortel, mais il était loin de s'imaginer que cela pourrait arriver si vite. Lui qui avait juré de toujours veiller sur sa famille, il avait commis l'irréparable quelques années plus tôt et avait préféré s'enfuir plutôt que de tenter d'arranger les choses. Résultat, il avait perdu sa famille, avait failli à sa parole et le pire, n'avait pas pu profiter des dernières années que son père avait à lui offrir. Son père qui avait préféré cacher sa maladie à ses proches, tout en sachant que s'il le leur avait dit, peut-être que son garçon qui refusait de lui parler depuis près de dix ans aurait refait surface. Mais Dean Falk n'acceptait pas la pitié et ne voulait surtout pas que son fils se sente obligé de revenir. Il fallait que cela vienne de lui, Quentin le savait. Et il ne l'avait pas fait.
Tout aurait pu être différent. Mais Quentin, au lieu de prendre son courage à deux mains et de vouloir arranger les choses, avait opté pour la solution de facilité, la fuite. Il était tellement lâche et fier qu'il avait préféré se cacher derrière des excuses et la certitude que ce qu'il avait fait ne pourrait lui être pardonné. Il s'en était rendu compte ce jour-là, alors que sa mère lui annonçait que cette fois-ci, c'était bel et bien terminé, que plus rien ne pourrait être arrangé, que plus jamais il ne pourrait parler à son père, le prendre dans ses bras.
C'est alors qu'il comprit. Il comprit que ce n'était pas durant ce jour de Thanksgiving qu'il avait tout gâché. C'était son attitude, par la suite, qui avait été la pire des choses. Il aurait pu tout arranger, mais il avait fait les mauvais choix et laissé les choses aller. Quel idiot.
Il se rappelait de l'enterrement Il n'avait pas osé se rapprocher et était resté en retrait, derrière la foule. Il avait quitté le cimetière et le village aussitôt la cérémonie terminée, veillant à ne pas être aperçu. Il avait dû revenir quelques jours plus tard, afin de rencontrer le notaire pour les questions d'héritage. Là encore, il avait préféré éviter sa famille et s'y était rendu plusieurs jours après les autres. Le notaire lui annonça que son père lui avait laissé un peu d'argent provenant de son assurance-vie, ainsi que sa voiture, une ancienne Cadillac dont Quentin avait toujours été dingue. Puis il lui avait laissé une lettre, cachetée à la cire.
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Le compte à rebours
ParanormalPartout sur Terre, au même moment, de terribles explosions réduisent en cendres des lieux de forte importance politique, religieuse ou économique. Se pose alors la question de savoir qui en est l'auteur. Aux États-Unis, comme partout ailleurs, c'es...