— « Les créatures chéries, dans la nature qui m'est précieuse » évoque de façon très métaphorique les motifs animaliers de la robe, puis le mille fleur cerné de perles, commence à m'expliquer Ambroise. « Sont les maîtres du trésor enfoui » parle clairement...
— Du fait qu'ils donnent la clé pour trouver le trésor, je le coupe. Vous allez me faire une analyse de texte ? Je sais bien que j'aurais échoué à découvrir tout cela, mais puisque vous me l'avez mis sous le nez, je vois bien le rapport avec la carte que vous avez dessinée.
Monteiro ne se formalise pas de mon impatience.
— Dans ce cas, que peuvent bien désigner les « regards brillants », si ce ne sont les yeux de chaque animal cernés de perle ?
Je regarde son tracé. Plusieurs points de perles ont été notés sur les contours des regards. En tout, il y a six yeux. Ceux du singe, ceux de la licorne et du chien. Pour les pattes, dix éléments sont reliés, et pour les fleurs, cinq, représentant ainsi deux zones clairement définies une fois les différents points reliés, en formes d'étoiles. Mais les lignes tirées entre chaque œil, elles, forment deux zones triangulaires distinctes, recoupant toutes les deux le petit coin commun entre la zone « fleurs » et la zone « pattes ». Elles ne servent donc pas du tout à affiner la zone géographique de l'emplacement des diamants.
— Comment avez vous deviné qu'il fallait relier chaque élément de cette manière ? C'est exécuté de façon arbitraire ?
— Chaque élément est numéroté.
— Comment ça ?
Il me montre la photo de la robe sur son téléphone. L'écran a beau être bien plus grand que nécessaire, c'est difficile d'obtenir un gros plan suffisamment précis. Mais, peu à peu, je distingue ce détail étrange et me demande comme ça a pu m'échapper avant ! Chaque animal a un nombre différent de doigts, de sabots et de griffes. Chaque œil possède un nombre différent de cils, et chaque fleur un nombre différent de pétales. Ce qui leur donne cet aspect difforme et biscornu qui nous met tous mal à l'aise depuis le début. Il n'y a jamais eu de petit apprenti exécutant médiocrement le dessin original. Le carton était volontairement réalisé ainsi, avec toutes ces étrangetés.
— Vous avez un œil aguerri, je constate avec stupéfaction.
Monteiro me regarde comme s'il commençait à me mettre dans sa poche. Je ne peux nier être particulièrement impressionnée. Je me demande s'il avait remarqué cela avant de voir la robe dans ma chambre d'hôte. Si ce n'est pas le cas, cela force l'admiration.
— Ça fait partie des détails qui me manquaient, reprend-il comme pour répondre à ma question restée sur le bord de mes lèvres. Malheureusement, la robe prise en photo dans la nuit, dans le jardin de Colette n'était pas suffisamment éclairée.
La curiosité me pique soudain.
— Pourquoi ne pas être revenu chez Colette pour récupérer ce qui vous manquait ?
— Tout était sensé être replacé dans la tombe. Et nul ne devait jamais être au courant de tout cela. Comme je vous l'ai dit, je ne suis pas moi-même allé effectuer cette besogne.
— Trop basse pour vous, peut-être ?
— Pourquoi se priver d'un service lorsqu'on peut le payer ? En tout cas j'ignorais que la robe avait été abandonnée dans le jardin, ainsi que le corps de Zélie Kashinsky. Sinon je me serais tout de suite lancé à leur recherche. J'en ai eu mainte fois l'occasion, puisque j'ai revu Colette après ça.
— J'aurais parié que vous l'aviez laissée tomber comme une vieille chaussette une fois votre méfait accompli.
— Je sais me rendre agréable à ceux qui me rendent service. Même s'ils l'ignorent eux même.
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La Licorne était borgne
Mystery / ThrillerAprès la découverte d'un squelette dans le jardin de sa grand-mère, Angèle se lance à la poursuite du mystère qui hante sa famille, sur la piste de perles précieuses, d'une veuve noire et d'une licorne biscornue. Cette histoire est terminée. Une sui...