Peur de l'inconnu

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M Y L A

-Je te déteste ! ai-je hurlé, les points serrés.

-Mais non, as-tu ricané.

-SI ! T'avais pas le droit de me laisser toute seule dans le supermarché ! T'avais pas le droit et j'te déteste pour ça ! Je te déteste, te déteste, te déteste. Je. Te. Déteste.

-T'as trop peur de ce que tu connais pas, pauvre andouille.

-MÊME PAS !

-Même que si, riais-tu en faisant rouler tes yeux dans leur orbite.

-Je vais le dire à maman !

J'étais furieuse, en larme pour cette terreur qui s'était forgée au creux de mon estomac. Je revoyais cette foule d'inconnus prêt à me dévorer. Je ressentais toujours cette panique broyant ma petite tête de neuf ans. Celle de ne jamais retrouver ma mère et la main de ma sœur que je devais formellement tenir et que pourtant j'avais fini par perdre.

-Tu m'as lâché la main exprès je suis sûre, éclatais-je en sanglot, accrochée cette fois au caddie.

-Non, c'est toi qui m'a lâché mais t'es tellement poule mouillée que tu veux pas l'avouer !

Maman est arrivée, un paquet de céréale dans les mains.

-Les filles, arrêtez de vous disputer bon sang !

D'une même voix nous nous sommes écriées, le doigt pointé vers l'autre :

-C'est elle qu'a commencé !

Maman nous a lancé un regard terrifiant en posant dans le caddie la boîte de céréales.

-Vous me faites honte, tenez-vous correctement !

Tu t'es redressée dans une allure fière pour ton âge. Tu ne voulais pas céder face à maman. Tu ne voulais pas avoir peur d'elle, ni de quiconque dans ce monde. À dix ans, tu ne voulais déjà pas te soumettre à cette vie.

J'ai plaqué mes petites mains contre mes yeux et je me suis à nouveau mise à pleurer. Tu as levé les yeux au ciel en tapant du pied face à ma faiblesse.

-J'ai cru que je m'étais perdue dans le magasin, ai-je couiné. Je pensais que j'allais plus jamais vous revoir !

Tu m'as regardé, dans une grimace d'incompréhension. Tu voulais avoir raison. Tu ne voulais pas admettre que c'était moi qui avait toutes les vérités en mains.

-OH ! Mais PARDON, Myla ! as-tu théâtralement époumonné en claquant dans tes mains d'enfant. Je ne pensais pas qu'il fallait avoir peur de l'inconnu. Je pensais que tu pourrais te battre contre cette peur comme une grande personne !

L'être de l'AubeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant