Chapitre 71 - Sur le départ

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Dès le lendemain, Brogan mit en ordre ses affaires.

Il trouva deux billets pour le soir même au départ de Londres, sur un bateau à vapeur en partance pour Edimbourg. Ils dépasseraient Eyemouth, mais il serait plus simple depuis l'Athènes du Nord de trouver un transport pour rebrousser chemin vers le petit port écossais.

– Nous allons voyager incognito, déclara-t-il à Gaëlle alors qu'il faisait une pile avec tous les papiers qu'il devrait confier à son assistant Daniels. Crois-moi, c'est plus sage, nul n'a besoin de savoir qu'Aidan Brogan va en Écosse, cela éveillerait la curiosité. Dès que je fais quoique ce soit, certains pensent que je suis sur un bon coup, tu vois ? Et ils mettent leurs nez partout. Un jour, je suis entré dans la boutique d'un diamantaire. Je voulais offrir une broche à tantine pour son anniversaire. Une semaine plus tard la rumeur courait selon laquelle j'avais trouvé une mine de diamant exceptionnelle à Java. Les marchés se sont un peu emballés et des individus peu recommandables ont profité de l'aubaine pour abuser des gogos. Certains ont fait faillite. Et cela m'est retombé dessus.

– Mais c'est horrible. Tu n'étais pas responsable !

– Ce n'était pas l'avis de tout le monde.

– L'incognito est un bon choix alors. Sinon on va dire que tu investis dans une nouvelle compagnie maritime ou que tu as trouvé un gisement de je ne sais quoi en Ecosse.

Il eut un petit rire sardonique, en cette saison, il y avait de forte chance que les seules choses qu'ils trouvent là-bas ce soient des engelures.

– Tu devrais prendre tes vieux habits, mais les plus chauds, lui conseilla-t-il.

– Je ne comptais pas prendre mes vêtements neufs pour voyager sur un vapeur, je ne veux pas abimer le travail de Mrs Bailey, répondit-elle comme s'il s'agissait d'une évidence. Tu crois peut-être que je vais renouveler ma garde-robe tous les quatre matins. Je pâlis à chaque fois que je vois une de ses factures. Les prix sont à la limite de l'indécence.

– À défaut d'autre chose, marmonna-t-il.

– Qu'as-tu dit ?

– Ta pingrerie me rend morose, articula-t-il. Elle lui décocha un regard méfiant. Une chance pour lui que Gaëlle n'ait pas l'audition de Lady Blake. Il aurait certainement pris un de ses fameux coups de pieds au tibia. Il décida de prudemment en revenir au périple qui les attendait.

– Le plus simple sans doute, ce serait de nous faire passer pour frère et sœur, ajouta-t-il.

– Pfff ! Personne ne croira que nous sommes de la même famille ! On ne se ressemble pas du tout, ce sera plus louche qu'autre chose et je vais passer pour...

– Tu as une meilleure idée ! Peut-être voudrais-tu que nous prétendions que tu es mon épouse !

– Encore moins crédible, marmonna-t-elle.

– Ce serait une bonne idée pourtant. Au moins je pourrais veiller sur toi en permanence et nous ferions l'économie d'une chambre. Les prix des cabines sont à la limite de l'indécence, la singea-t-il.

Elle était horrifiée. Comment pouvait-il seulement l'envisager, même pour se moquer de sa prétendue avarice ?

Bon, il lui rendait service. Elle n'avait pas tant envie que cela de voyager complètement seule, mais si au moins Cassandre avait pu venir, ou même tante Honorine... seule avec lui durant plus de deux semaines... il allait venir à bout de sa santé mentale.

– Dans tous les cas, j'ai pris des billets au nom des Westcott. Nous en aurons pour un peu plus de quatre jours sauf tempête jusqu'à Edimbourg. Nous serons à l'étroit sur ce petit rafiot, mais tante Honorine à raison, il n'y a pas plus rapide, et c'est le moyen de transport le plus sûr. Cela nous évitera de devoir passer la nuit dans des auberges. On ne sait jamais qui l'on peut croiser dans ces endroits.

Quand les loups se mangent entre euxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant