Quand les loups se mangent entre eux

Chapitre 81 (partie 2)

Après l'incident qui avait conduit à l'explosion du lit de Cassandre, Joshua avait saisi sa jeune épouse de nouveau endormie dans ses bras et l'avait portée jusqu'à sa chambre à présent quasiment vide, mais où heureusement aucun ouvrier ne travaillait. Il avait posté les chiens en sentinelles à l'extérieur et verrouillé les portes.

Les rayons du pâle soleil londonien perçaient au travers les lourds rideaux de velours que Joshua avait choisi quelques années plus tôt pour sa chambre, et qu'il les regardait d'un œil distrait

Cassandre levait les yeux au ciel en frissonnant d'horreur à chaque fois qu'elle les voyait. Ils avaient plu à son mari pourtant avec leurs motifs d'animaux et de feuillage mais aujourd'hui ils le faisaient seulement rire. Ils ressemblaient étrangement à l'affreux tableaux que sa femme avait acheté dans la boutique de Mr Mickaël, ils avaient sans doute été l'inspiration de ce désastreux achat ayant pour but avoué de se moquer de son goût déplorable en matière de décoration.

Visiblement il existait un groupe de personnes à l'esprit un peu dérangées qui créaient ce genre de motifs hallucinatoires et repoussants sous le prétexte de partager dans leur grande générosité leur délires esthétiques. Plus curieux encore cette communauté avait un public, Joshua inclus. Quelles conclusions tirer de ce constat ? Lord Blake était-il un être déviant ? Devait-on y voir un signe de démence ? Mais s'il était à présent conscient du problème, pouvait-on considérer qu'il était sur la voie de la guérison ? Le jeune homme se mit à rire du cheminement de ses pensées ce qui lui valut une tape sur la poitrine.

Il baissa les yeux et croisa le regard clair de Cassandre.

– T'ai-je réveillé ? Demanda-t-il en laissant paresseusement glisser sa main sur son dos. Le contact du sage coton de sa chemise de nuit l'attendrit. Son ravissant visage, sa joue posée sur son torse avec confiance, lui arracha un soupir ému.

– Que se passe-t-il sous ce nid d'oiseaux ? Elle tendit les doigts vers ses cheveux bouclés et les y enfouit.

– Je pensais aux rideaux et aux choses qui changent.

– À l'avenir ?

– À l'avenir aussi.

– Nous allons vaincre les Flambeaux, dit-elle comme un mantra.

– Tu sembles en être persuadée.

– Nous avons essuyé un échec. Un échec, dut à l'impatience, à la curiosité, à la colère. Mais nous finirons par les avoir. Ces vipères ont fait des erreurs en s'en prenant à nous. Je crois en notre force, en notre courage...

– Notre intelligence ?

– Eh bien...

Il rit à nouveau.

– Jusqu'à présent il serait excessif de prétendre que cela a été notre fort, je l'admets. Mais c'est que nous avons joué de malchance, ou le timing n'était pas bon, ou... Je n'étais pas prête. Je vais devenir plus forte, je ne nous laisserais pas tomber, je le promets et...

– Et nous sommes une équipe tu sais. Tu n'as pas à te charger de tout. Ni du danger, ni des responsabilités et encore moins de la culpabilité de nos derniers échecs. S'il y a une seule leçon que nous devons apprendre de ces ordures c'est bien celle-là. Ils attaquent par surprise les individus isolés et ils attaquent en bande. C'est pour cela que nous devons rester groupés. L'importance de la meute, tu la saisis mieux que quiconque.

Elle hocha pensivement la tête.

– Arcas devrait rentrer. Il a beaucoup appris en Crimée et visiblement c'est un lieu capital dans les plans des Flambeaux, mais si Valentin est ici en Angleterre et qu'il est bien la tête pensante, nous devrions peut-être nous concentrer sur lui. Nous tous.