Chapitre 80 (Partie 1)

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Assis sur son tas de paille humide, Arcas serrait les poings à s'en faire blanchir les phalanges.

Comment ce sombre abruti de Darmain avait-il osé ? Il avait mis des mois à redonner à Diana, confiance en la gent masculine, et pourquoi ? Pour que cette raclure piétine cette foi toute neuve et fragile en oubliant qu'un officier était censé de se tenir de manière irréprochable dès qu'il était question d'une dame. Il avait suffisamment entendu ce genre de discours. Ou alors était-il le seul à qui on avait rabattu les oreilles sur le devoir de galanterie d'un gradé de l'armée française ?

Arcas avait bien d'autres devoirs. Il avait juré de chérir et de protéger sa femme.

Le colonel l'avait insulté et brimé bien des fois sans même qu'il ne se rebiffe. Son grand-père, le terrible Nyctimus avait pendu des hommes par leur tripes pour beaucoup moins que cela. Mais Arcas avait hérité de sa pauvre mère une patience inconnue de la plupart des Harispe. Elle avait toujours eu cette sorte d'endurance de martyre nécessaire lorsqu'on était l'épouse d'un homme tel que Phineus. Arcas, en digne fils de sa mère avait donc subi son chemin de croix sans broncher jusqu'aux dernières quarante-huit heures, où il lui avait accordé une pichenette sur le nez, ce petit homme ne valait tout simplement pas plus.

Mais aujourd'hui Darmain était allé trop loin. Cette pourriture n'allait pas s'en sortir à si bon compte, Arcas quitterait cette geôle et allait lui montrer à quel point un Harispe pouvait être impitoyable dès qu'on s'en prenait au sien.

Le plus difficile serait évidemment de ne pas se faire attraper, mais être enfermer dans cette geôle ne lui offrait-il pas le meilleur des alibis. Bien sûr la question technique était de pouvoir en sortir et d'y retourner sans éveiller les soupçons.

Il réfléchissait toujours à son plan machiavélique, quand il entendit une certaine agitation remuer le camp.

Les hauts gradés étaient de retour, ce qui expliquait sans doute pourquoi Darmain n'était pas encore venu cracher son venin sur lui pour se venger de l'humiliation que lui avait fait subir Diana.

Ménard, frappa sur les barreaux.

– Tenez votre altesse, j'espère que cette pitance sera à votre convenance.

Il lui tendit une assiette de soupe tiède dans laquelle il avait jugé bon de cracher alors qu'Arcas s'apprêtait à la prendre.

– Tu peux la garder. À force de lécher le fion de Darmain le goût doit vraiment être infâme.

Le garde-chiourme le regarda un instant sans comprendre. Mais quand il lui jeta l'assiette à la figure, le meneur de loups se dit qu'il y avait peut-être une cervelle entre ses deux oreilles. Il esquiva le projectile d'une pirouette.

Tant pis pour la soupe, il n'aurait rien eu contre un plat chaud. La dernière bouteille/bouillotte que Charlier lui avait donnée était froide depuis longtemps, mais heureusement il l'avait accompagné d'un pain. Ajouté au pâté en croûte que lui avait apporté Jimmy, il ne mourrait pas de faim aujourd'hui.

Il se contenta donc d'offrir à Ménard un doigt d'honneur, avant de retourner s'asseoir sur son grabat de fortune remâcher sa vengeance. Si ce type n'avait pas été un fichu crétin dont les seules occupations étaient de regarder les barreaux de cette prison rouiller et faire reluire les bottes de Darmain, le baron serait bien allé à la pêche aux informations. Il n'aura rien eu contre un petit compte-rendu sur ce qui se passait à l'extérieur, mais il craignait que sa bêtise crasse ne soit contagieuse.

Finalement, c'est le général Bosquet en personne qui fut le porteur des nouvelles lorsqu'il descendit les escaliers menant à sa geôle.

Arcas se releva d'un bond et se mit au garde à vous.

Quand les loups se mangent entre euxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant