➵ Chapitre 59

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Simon m'avait aidée – ou plutôt supportée – à chanter Show must go on tous les soirs des vacances. « Freddy Mercury n'aura qu'à bien se tenir ! Tu vas tout déchirer ! » s'était-il exclamé en me frottant le dos à plusieurs reprises.

  Maintenant, j'étais de retour à Sainte-Cécile. Seule dans ma chambre, ou plutôt notre chambre, je patientais jusqu'à l'arrivée de mes amis. J'avais d'abord pensé à aller dans la salle commune, mais une fois arrivée dans le studio, je n'avais pu redescendre. J'avais vidé ma valise puis m'étais effondrée sur mon lit, épuisée par le voyage.

   Je me mordis la lèvre en pensant à l'oral blanc de français qui arrivait dans deux semaines. Je me levai d'un bond. Non ! J'allais me noyer dans ma propre peur de bégayer si je restais seule ici.

   Je descendis les escaliers, saluant au passage quelques élèves qui montaient dans leur chambre. Je risquai un coup d'œil dans la salle commune et y aperçus Lise, installée dans un fauteuil avec un livre. De là où j'étais je ne pouvais voir le titre. Et puis, hors de question que je remonte dans le studio !

   Je m'avançai donc vers elle à pas feutrés. Le titre en lettres argentées m'apparut : Jane Eyre.

— Il est bien ? interrogeai-je, plantée devant elle

Elle sursauta et poussa un petit cri de surprise.

— Emmy ! Tu m'as fait peur ! protesta-t-elle, la main sur son coeur

— Désolée, m'excusai-je, platement

— Ce n'est rien. J'adore les entrées fracassantes, répondit-elle, tout sourire.

Elle désigna le fauteuil en face du sien.

— Assieds-toi.

J'obtempérai.

— Pour répondre à ta question, oui il est bien. J'étais tellement absorbée que je ne t'ai pas vue arriver ! Il est très entêtant... Dommage que Mme Bucarest refuse que nous citions de la littérature étrangère en dissertation !

— Tu l'as dit, confirmai-je, les yeux fixés sur le tableau accroché au mur derrière Lise

Lise suivit mon regard et se retourna :

Theresa Stark, 1852. C'était une violoniste hors-paire, il me semble.

— Au vu du violon qu'elle porte dans ses bras, je pense que oui, répondis-je. Tu connais son histoire ?

— Non, soupira Lise. Sainte-Cécile regorge de tellement de mystères !

— Tu penses qu'elle était élève ici ? continuai-je, piquée par la curiosité

— Sans doute. Je ne suis pas un livre d'histoires, tu sais, dit-elle en haussant les épaules avec désinvolture

— Malheureusement, rétorquai-je, entrant sans son jeu

— Peut-être qu'il y a plus d'infos dans la salle d'éloges, suggéra-t-elle. Oh, tiens, voilà Solange et Rachelle !

Lise leur fit de grands signes et je fis de même, ravie.

— Salut, vous deux ! claironnèrent-elles

Rachelle raconta en détails la semaine de vacances qu'elle avait passée dans le sud de la France, Solange décrivit ses révisions de français au bord de la piscine (elle était toute bronzée), Lise lista tous les livres qu'elle avait lus dans son jardin, en Alsace, et lorsqu'Alice arriva, je narrai les déboires amoureux de mon frère. Je n'omis aucun détails. Surtout la liste de crush.

Tout pour la musique (2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant