Chapitre 88 - Underworld

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CHAPITRE 88

Lily gravit aussi vite que possible les escaliers qui n'en faisaient bien sûr qu'à leur tête. Atteindre le septième étage n'avait jamais été aussi long et laborieux. Elle ne s'autorisa néanmoins à reprendre son souffle qu'une fois à hauteur de la tapisserie de Barnabas. Ce dernier aurait pu l'aider s'il n'avait pas été aussi occupé à apprendre la valse à des trolls. La jolie rousse savait comment entrer dans la salle sur demande. Trois allers-retours et la porte apparaissait. Le problème était de savoir à quoi elle devait penser. Le principe de la salle sur demande était de penser à ce dont on a besoin. C'était simple en théorie... En théorie seulement. Voldemort avait dû penser à un endroit où cacher le diadème. Elle ne devait pas simplement penser au diadème... elle devait penser à ce qu'il avait pensé. C'était une tâche plus que complexe que de se mettre dans la peau d'un meurtrier raciste et multirécidiviste mais elle ne parviendrait pas à mettre la main sur le précieux artefact tant qu'elle ne penserait pas comme son sociopathe de propriétaire.

Dumbledore avait été flou sur bien des points mais pas sur l'histoire de Voldemort. Non. Pas Voldemort. Tom Jedusor. Il leur avait livré les souvenirs, les pièces du passé qui ne pouvaient tout expliquer mais qui pourtant l'éclairaient en cet instant. Elle avait été aimé. Ses parents s'étaient aimés. Même sa sœur Pétunia l'aimait sous toute cette haine et ce dégoût. Elle avait grandi avec l'absolue certitude que l'amour était quelque chose de réel. Elle l'avait donc trouvé chez Alice, Marlène... Mary. Les déceptions n'étaient que des exceptions. Elle n'avait jamais cessé de croire en ce mythe imparfaitement tangible. Aurait-elle tourné comme Jedusor si elle était née non désirée ? Si son père avait considéré son existence comme monstrueuse et que sa mère avait jugé que se battre pour une vie avec elle n'en valait pas la peine. Quelle personne serait-elle aujourd'hui si son enfance s'était résumée à la sévérité glaciale d'un orphelinat ? Elle se sentait suffoquer à l'idée. Poudlard aurait pu être une échappatoire mais il avait été envoyé à Serpentard... Non pas que cette maison soit moins bien que les autres mais disons que bien souvent les relations y étaient plus conditionnelles qu'ailleurs. Avec son statut de sang, il aurait dû être un paria. Il avait évité cela par le mensonge, usant de ses charmes pour se faire une place parmi l'élite... Et une fois de plus... une fois de trop... on ne l'avait pas aimé. Pas pour ce qu'il était réellement tout du moins.

Elle croisa les bras sur elle-même comme pour chercher un peu de réconfort dans ses sombres pensées. En avait-il fait de même enfant dans sa chambre à l'orphelinat ? S'était-il retrouvé ici avec cet état d'esprit ? Non. Il avait changé. Il avait déjà commis l'irréparable. Il n'était plus un adolescent à la recherche d'amour. Il était un homme qui voulait vouer sa vie à détruire l'amour des autres. Il le voyait comme une faiblesse. Une émotion irrationnelle. Un moyen plutôt qu'un but. Il était là pour quelque chose de plus grandiose, de plus concret. Il était là pour vaincre la mort. Cette peur... elle la comprenait. Elle la partageait. Il y a bien peu de chose dont elle ne serait pas capable pour rester en vie. Harry avait besoin d'elle. James avait besoin d'elle. Elle ferma les yeux se concentrant sur l'idée qu'il lui fallait cacher cet objet capable de la préserver de la mort. Elle entama les pas devant le mur, sous les yeux de Barnabas et ses amis trolls, l'idée dans son esprit se faisant de plus en concrète. Lorsqu'elle s'arrêta, une porte était apparue. Elle poussa les battants de celle-ci en priant pour que ce soit la bonne.

La salle sur demande ressemblait en cet instant à l'intérieur de ces veilles cathédrales construites au Moyen Âge. La pierre avait remplacé le bois et les arcs soutenaient une coupole dont les fresques n'étaient que davantage illuminées de lumière par les vitraux multicolores. Un bric-à-brac d'objets de toutes tailles et de tous genres qui s'entassaient à perte de vu et donnait une impression d'infinité à l'espace mais aussi au temps. Certaines de ces breloques dataient de Merlin lui-même. Elle avança comme si elle eut été sur la barque de Charon, voguant sur le fleuve Léthé constitué de tous les souvenirs que les âmes avaient abandonné pour rejoindre le pré de l'Asphodèle. Elle espérait ne pas avoir à faire le même sacrifice. Peut-être qu'elle n'aurait pas dû comparer la salle sur demande aux enfers d'Hadès. Les lieux n'étaient pas vraiment connus pour leurs nombreuses issues de secours mais plutôt pour le fait qu'il était plus simple d'y entrer que d'en sortir.

Elle déambula à la recherche du diadème. Elle l'aperçut au loin, posé sur la tête d'un buste qui représentait un sorcier qu'elle ne reconnut pas. Elle se précipita vers celui-ci mais se figea en voyant les jumeaux Carrow lui barrer la route, le même sourire plastronné aux lèvres. Alecto attrapa la tiare, l'agitant tout en riant comme une démente ou une hyène, Lily n'aurait su dire mais les deux comparaisons fonctionnaient.

– Pourquoi est-ce que tu veux cette vieille breloque ? lui demanda Amycus avec suspicion.
– Comment avez-vous réussi à entrer ? demanda-t-elle, essayant de gagner du temps et priant pour qu'Alecto ne pose pas le diadème sur sa tête de linotte et se retrouve soudain avec une intelligence surnaturelle.
– On t'a suivi ! s'exclama le mangemort avec bien trop d'enthousiasme et de fierté. Au début on suivait Snape mais on a oublié... ajouta-t-il avec un air suprêmement simplet.
– Severus est ici ?
– Pourquoi ça t'intéresse ? Tu t'es déjà lassée de Potter ? Je le veux bien s'il ne te plaît plus, lâcha Alecto en passant sa langue sur ses lèvres comme pour mimer la gourmandise ou une hyène, on ne pouvait jamais vraiment savoir avec elle.
– Maintenant dis-nous pourquoi tu voulais la couronne ! hurla son frère faisant vaciller presque imperceptiblement les colonnes de bric-à-brac.
– Quoi ? articula Lily comme si elle n'avait pas parfaitement entendu, et priant pour que son plan ne soit pas aussi absurde qu'irréaliste.
– Le diadème ! Pourquoi tu le veux ! cria Alecto mais ce ne fut toujours pas la bonne.
– Je suis vraiment désolée, l'acoustique est vraiment mauvaise ici, mentit-elle en espérant que la salle sur demande ne ressemblait pas seulement à une cathédrale mais en possédait tous les attributs.
– On a dit, reprirent les jumeaux en cœur, pourquoi est-ce que tu veux le diadème !

Leurs deux voix combinées aboutirent à l'objectif escompté et un peu plus encore. Elle avait lu que les cathédrales avaient été conçues selon le modèle des théâtres grecs, de manière à ce que les voix des acteurs et celles des prêtres résonnent aussi clairement aux spectateurs et fidèles du premier rang qu'à ceux du dernier. L'effet domino provoqué par la chute de l'une des colonnes les moins stables lui procura de précieuses minutes de diversion. Elle désarma Alecto et envoya valser Amycus contre une armoire. Elle plaqua au sol la mangemort qui se débattit férocement mais Lily la pétrifia et lui arracha l'horcruxe des mains. Elle se recula de justesse, une bibliothèque des vieux parchemins aussi anciens que lourds s'effondrant sur la jeune fille. Lily n'éprouva pas le moindre regret face à la mort de la jeune femme. La stupidité ne pouvait être un éternel prétexte à la haine et à la cruauté de certains. Amycus était toujours inconscient. Son sort lui importait peu. Nul doute qu'il finirait comme sa jumelle, enseveli.

Pour sa part, elle fonça vers la sortie en se disant qu'Hadès apprécierait qu'elle n'eût pas tenté de lui subtiliser une âme mais seulement un petit objet de son palais. Et puis la règle n'était-elle pas de ne pas se retourner ? 

Holding a Heart - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant