L'Oracle d'Or

Chapitre 6

            Après avoir essayé d'ouvrir la porte par tous les moyens, Izèl n'avait pas pu fermer l'œil tant les événements qui se déroulaient à l'étage inférieur avaient encore lieu. Il s'était rhabillé et assoupi quelques heures lorsque le calme était revenu dans le château. A son réveil, il vérifia que personne ne se trouvait dans la grande salle en contrebas. Il attacha les uns aux autres tous les draps, serviettes et rideaux qu'il trouva. Il renoua l'écharpe autour de son cou et inspira profondément en lançant la corde improvisée par-dessus le balcon. Elle arrivait jusqu'au sol et était bien coincée sous un meuble de la pièce. Le jeune homme descendit alors prudemment, jusqu'à ce que ses pieds touchent le sol.

-Izèl ! S'exclama soudain une voix.

Le jeune homme se retourna et vit Treck accourir vers lui.

-Qu'est-ce que tu fais ma parole ? Continua le médecin en détaillant le cordage d'un œil étonné. Je ne t'ai pas trouvé dans ta chambre après trois jours de coma, et en plus la vitre de ta fenêtre était brisée ! Par les dieux, tu es inconscient !

-Treck ! Tu es rentré chez toi ? Demanda le jeune Oracle avec empressement.

-De quoi tu parles ? Se méfia le médecin.

-Est-ce que ta...

Treck lança un regard noir au jeune homme et lui fit signe de se taire.

-Qu'as-tu à la main ? L'interrogea l'homme en voyant que l'Oracle l'avait entourée de tissue. Viens dans mes appartements !

Sans lui demander son avis, le médecin prit Izèl par le bras et l'emmena dans une des ailes du château où il n'était jamais allé. Sans rien dire, il le fit asseoir sur un fauteuil moelleux et lui retira son bandage de fortune. Treck eut la présence d'esprit de ne pas demander d'où lui venait cette blessure. Il se contenta de la nettoyer et il n'eut pas besoin de mettre de pansement.

-C'était bien toi avec Elie alors..., souffla le médecin.

-Elie ? Répéta Izèl.

-Ma nièce est arrivée en pleur chez moi cette nuit, expliqua Treck. Elle nous a tout raconté, alors ma femme et elles sont allées chez mes beaux-parents, dans une autre région. Je n'arrivais pas à croire que celui qui l'avait sauvé te ressemblait. « Des yeux de deux couleurs » a-t-elle dit. Ils ne sont pas commun les gens avec cette particularité ! Je suis revenu ici en panique et mes soupçons se sont confirmés comme tu n'étais, en effet, plus dans ta chambre !

-Désolé de t'avoir causé du souci, fit le jeune Oracle. Tu peux me faire sortir d'ici maintenant que ta famille est loin ?

-Ça risque d'être difficile, avoua le médecin. Tu ne te rends vraiment pas compte de l'influence du Duc Usa... Et puis que voudrais-tu faire ? Si c'est le Maître des Oracles qui t'a vendu, il te fera tuer en apprenant ton retour à la capitale d'Or.

-Ce sera mon problème à ce moment-là. Je comprends que tu ne puisses peut-être pas m'aider tout de suite, mais pourrais-tu faire livrer des lettres pour moi en attendant ? C'est vraiment important.

-Des lettres ? S'étonna le médecin en fixant les yeux vairons du jeune homme. Ça pourrait être possible, mais il ne faut absolument pas que les nobles s'en aperçoivent, tu penses pouvoir en écrire sans te faire voir ?

-Oui, affirma Izèl. Et de ton côté, tu peux...

-Je vais trouver un moyen, fit Treck. Tu te souviens de Falèn, le cousin du Duc ? Il n'apprécie pas ce que fait Akiran, il va également essayer de nous aider.

-Ça risque d'être difficile s'il rentre à la ville bleue, soupira le jeune homme.

-Pourquoi dis-tu cela ?

Izèl expliqua la vision qu'il avait vu et ce que lui avait dit le Duc Usa à ce sujet. C'était d'ailleurs pour cela qu'il était parti du château depuis quelques heures. Treck décida immédiatement d'en faire part à Falèn.

-Tu as la clé de la chambre que j'occupais ? Demanda le jeune homme avant que le médecin ne s'en aille.

-Oui bien sûr...tiens. Évite de te faire voir... je présume que tu étais enfermé quelque part au vu de ta cascade pour descendre depuis ce balcon... Je prendrai tes lettres dès que tu les auras...

-Merci Treck !

-Merci à toi pour Elie...Tu aurais pût la laisser tomber...

Sur ces mots, le médecin s'enfonça dans un couloir. Izèl rebroussa le chemin qu'il avait pris, et se retrouva près de la grande salle. Il y vit un grand escalier et espéra que ce dernier amène à l'entrée du château, seul endroit d'où il arrivait à se retrouver. Il s'y engagea et descendit les marches rapidement. Il arriva enfin devant une grande porte en bois gravée. Il reconnut directement cette dernière. C'est par là qu'il était entré la première fois. Étrangement, personne ne semblait garder cette entrée.
Izèl s'en approcha et tourna la poignée. A son plus grand étonnement, la porte s'ouvrit simplement. Il écarquilla les yeux en revoyant le long chemin qu'il avait emprunté à l'allée, dans la calèche. Il avança de quelques pas, toujours rien. Il se rappela alors qu'il était censé être enfermé dans la petite pièce au balcon. Il n'y avait donc personne pour le surveiller. Il n'avait plus à réfléchir : il courut. Aussi vite qu'il pouvait. Au bout de quelques minutes, la grande demeure n'était plus visible derrière lui. Cependant, il était encore trop à découvert sur ce grand chemin fréquenté. Il quitta la route pour s'enfoncer dans une petite forêt. Là, il continua à suivre le chemin, à l'abri derrière les arbres. Durant plus de quatre heures, il marcha, sans s'arrêter.

-J'ai faim ! Soupira-t-il en s'asseyant près d'un grand conifère.

Le jeune Oracle ferma les yeux quelques minutes, juste le temps de reprendre son souffle pour repartir. La tête blottit dans son écharpe en coton, il finit par s'endormir.