L'Héritage (L'Hybride, Livre 3)

11.2 : Librairie

Lorsqu'elle poussa la porte, celle-ci s'ouvrit sans la moindre difficulté. Derrière elle, la poussière gardait la trace de ses pas.

Elle entreprit de rechercher des grimoires ou des livres traitant des malédictions. Dans l'ancienne boutique, Clara ne pensait pas trouver son bonheur. Cette partie avait été accessible au public ; si Aimé avait possédé ce genre d'ouvrage, elle doutait qu'il l'eût offert à la vue de n'importe quel quidam. Elle dépassa le comptoir, puis s'engagea dans un petit couloir au milieu des craquellements du vieux parquet. La porte grinça quand elle la poussa et souleva la poussière qui s'accumulait depuis plusieurs années. Par réflexe, elle chercha l'interrupteur sur le mur et l'actionna plusieurs fois sans résultat. L'électricité avait été coupée. À défaut, elle insuffla un peu de magie dans le plafonnier. Il s'illumina et révéla des livres empilés de manière encore plus impressionnante que dans la boutique. Certains formaient des tours instables plus hautes que sa propre tête. Quant à trouver le mobilier sur lequel ils étaient entreposés...

Au prix de multiples contorsions et éternuements, Clara dénicha deux ouvrages traitant des malédictions. Lorsqu'elle repensa à la plume qui avait rendu à Nicolas son humanité, elle se mit aussi en quête d'indices sur leur symbolique, mais n'en trouva aucun dédié. Elle remercia ses pouvoirs de lui épargner un temps infini pour les extraire des piles trop hautes, et les emmena avec elle jusqu'à l'ancien comptoir pour les consulter tranquillement.

Elle ouvrait le premier quand le spectre translucide d'Aimé se matérialisa devant elle. Son visage souriant, bienveillant, attestait de ses bonnes intentions. Dans son large boubou noir aux discrètes broderies, il se fondait presque dans la salle où la lumière du jour peinait à entrer. Néanmoins, sa vue lui provoqua une véritable vague de nostalgie. L'Ange était un grand sentimental.

— Je ne m'attendais pas à te revoir si vite, dit-il de sa voix d'outre-tombe.

— Et moi à te trouver là.

La dernière fois, prise dans son rêve, Aimé avait revêtu une apparence plus physique.

— Je hante ces lieux. Il est naturel de m'y trouver, pour peu qu'on soit réceptif à la magie. Et j'aime cette vieille librairie.

— Au fait... merci, pour la dernière fois.

— Ne me remercie pas. Je ne t'ai accordé qu'un répit temporaire.

Hélas, la quête de Tatiana attestait qu'il disait vrai. Clara soupira. Aimé en profita pour lorgner sur les ouvrages qu'elle avait pris.

— Une bien étrange lecture.

— Je cherchais surtout à en savoir plus sur les malédictions.

— J'ai bien compris. J'imagine que l'Ange ne souhaite maudire personne. Alors qui espères-tu sauver ?

Elle soupira, tant de lassitude que de fatigue.

— Je peux peut-être t'aider à trouver les réponses à tes questions.

Elle referma son ouvrage et choisit de l'interroger directement sur les sujets qui l'intriguaient, à savoir la malédiction dont était probablement victime Nicolas, et la plume qui lui avait permis de retrouver son humanité. Aimé avait vécu de nombreuses vies, il aurait probablement des réponses à lui apporter.

— Que sais-tu sur les plumes ?

Il parut surpris par sa question, puis embêté.

— Peu de choses. Les plumes ont une symbolique bien particulière, qui connaît beaucoup de variantes selon l'endroit où l'on se trouve. La seule constante est le lien avec Dieu, ou des Instances Supérieures. Souhaites-tu savoir quelque chose en particulier ?