5.2 : Rôdeurs

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Le reste de la journée s'écoula de la même manière : alternance de siestes et conduite, échanges décousus sur fond de radio en sourdine. Malgré son envie d'en savoir plus, Éric n'évoqua plus Clara ; Nicolas n'aborda pas non plus le sujet. Leurs retrouvailles ne se feraient pas sans heurts et il les appréhendait sans doute.

Il faisait nuit noire quand Éric quitta l'autoroute, le dos en miettes et les yeux secs. Comme pour les dissuader d'avancer, la pluie continuait à se déverser sur la petite voiture. Guidé par Nicolas, il trouva rapidement la brasserie dans laquelle le rendez-vous avait été fixé. Éric attrapa son tout nouveau téléphone portable. Il avait bien tenté de prévenir Joan de son retard, mais le réseau, hasardeux sur la route, avait rendu toute communication impossible. Passées sept heures, il ne s'attendait de toute façon plus à le trouver à son bureau et avait abandonné.

Un peu déçu, Éric le rangea dans son sac quand il remarqua que la batterie était dans le rouge. Il avait beaucoup compté sur cet appareil de conception nouvelle, mais s'il s'avérait utile dans Clarme, il souffrait encore de quelques difficultés techniques hors des murs de la capitale et des grandes métropoles.

Éric rabattit sa capuche sur sa tête et trottina avec Nicolas jusqu'à l'enseigne lumineuse indiquant « Le Carrefour du Goût ». Un homme fumait sous le porche, son manteau serré sur lui, et correspondait à la description qu'il avait recueillie.

— Joan ? demanda Éric.

— Lui-même. Éric, si je ne me trompe pas ?

— C'est ça. Désolé du retard...

— Y'a pas de mal. Vu ce qui est tombé aujourd'hui, je m'attendais à ce que vous soyez coincés sur la route. Je suis plutôt surpris de vous voir presque à l'heure !

— Je n'étais pas tout seul, ça aide.

Éric sourit, puis indiqua son voisin.

— Je te présente Nicolas, il m'accompagne.

Le principal intéressé se contenta d'un hochement de tête.

— Du métier ? demanda le journaliste.

— Pas du tout.

— Envie de voir du pays ?

— Pas vraiment...

— Disons que nous avons tous les deux un intérêt à en apprendre plus sur cette « bonne samaritaine », intervint Éric.

— Je vois.

Joan jeta le reste de sa cigarette par terre, l'écrasa du talon et leur indiqua la porte.

— Entrons.

Il les guida jusqu'à sa table.

— Vous m'excuserez, j'ai pris un verre en vous attendant.

Un serveur les salua et leur tendit la carte.

— Aucun problème, répondit Éric. Un whisky pour moi, dit-il avant même d'ouvrir le menu.

— Une bière, lâcha Nicolas sans plus de formalité.

— Blonde ou brune ?

— Brune.

Le serveur parti, Éric se pencha vers Joan.

— Alors ? Tu as avancé depuis la dernière fois ? Tu l'as trouvée ?

Il rit.

— J'ai fait chou blanc.

— Mince.

— Pas le moindre fait divers impliquant une mystérieuse inconnue.

Il but une gorgée puis reposa son verre.

L'Héritage (L'Hybride, Livre 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant