L'Héritage (L'Hybride, Livre 3)

2.3 : Aides

Onze heures approchaient quand il se présenta à l'adresse de Nicolas et jeta un dernier regard à sa Mini. Avec ses claquements et ses freins à changer, elle devrait tout de même faire un tour chez le garagiste dans les prochains jours.

Mais pas aujourd'hui.

Intrigué, il observa les belles maisons alignées de chaque côté de l'avenue principale, qui conduisait en droite ligne au centre-ville. Le quartier, ancien et coté, attirait encore du beau monde. Au souvenir de la mine patibulaire de Nicolas, il avait peine à croire que ce garçon avait grandi là. Il n'en avait pas le profil.

Au détour d'une conversation, Éric avait appris qu'il retapait la maison dont il avait hérité de sa mère. Il se trouvait juste devant le bâtiment en question.

Éric vérifia plusieurs fois le numéro sur le muret qui entourait la propriété. Il n'en croyait pas ses yeux. La maison était un véritable vestige des temps où des seigneurs vivaient là, et avait probablement été construite par l'un d'eux. Avec ses grosses pierres de taille, ses hautes fenêtres et le terrain inhabituellement grand qui l'entourait, Éric garda pour plus tard l'idée d'enquêter davantage sur les Collin de Clarme. Avec un peu de chance, il déterrerait de croustillantes histoires de famille. Hélas, si les murs révélaient l'importance de ses premiers propriétaires, ils n'avaient pas résisté aux aléas du temps. Par manque de soins, la maison tombait en décrépitude et une végétation folle poussait autour.

Éric surmonta sa surprise et ouvrit le portail, tenta de voir au-delà de la forêt vierge qui tenait lieu de jardin, puis s'engagea sur l'allée de gravier qui menait aux deux marches du palier – fendues. Il frappa.

Après avoir lourdement insisté et attendu, il estima qu'il n'y avait personne. Un coup d'œil à sa montre lui indiquait qu'il aurait à peine eu le temps de s'entretenir avec lui s'il voulait être à l'heure au journal et prendre une collation pour midi. Il sauta à bas des marches pour rejoindre son véhicule. Il avait presque atteint la rue quand la porte s'ouvrit dans un cliquetis métallique.

S'il n'avait pas déjà eu affaire à des gens bizarres dans le cadre de son métier, il aurait reculé d'un bond face à l'expression sombre et sauvage de l'homme qui venait d'apparaître. Nicolas était méconnaissable, et dans ce qu'il appelait un « sale état ».

— Quoi ? demanda-t-il d'une voix peu engageante.

— Ni... Nicolas ?

Après une vague hésitation, son instinct peut-être, il retourna sur ses pas pour lui faire face.

— C'est... C'est Éric. Le frère de Clara, jugea-t-il bon de préciser.

Nicolas plissa ses yeux légèrement bridés.

— Qu'est-ce que tu veux ?

Éric attarda un regard à l'intérieur, mais il manquait de lumière pour y voir vraiment. À peine distinguait-il des encadrements de portes et des ébauches de meubles.

— Est-ce que tu as des nouvelles d'elle ? Je viens d'apprendre qu'elle a disparu depuis une semaine...

— Clara... ?

Il parut ébranlé par la nouvelle, et manifestement pas au courant de son escapade. Éric voulut enchaîner et vérifier s'il en connaissait la cause, mais Nicolas porta aussitôt la main à son front et vacilla comme s'il allait tomber à la renverse.

— Oh !

Éric bondit en avant et voulut le rattraper mais le grand gaillard s'était déjà ressaisi. Physiquement, du moins. Son regard trahissait à quel point il était bouleversé.