Le serpent qui s'enroulait lentement autour de la nuque de Camille n'achevait de la faire suffoquer lorsqu'une main chaude vint chasser les anneaux froids de la bête du sommeil qui l'accablait.
-Debout petit, c'est l'heure !
L'heure, enfin ! Maintenant tout à fait réveillé, le garçon bondit bien haut sur ses deux jambes, l'œil alerte et le cœur léger. Ah ! Si vous pouviez sentir, rien qu'un cet instant la fabuleuse odeur de mystère et d'aventure qui embaumait alors le visage de l'enfant, un petit sourire au coin, un rictus, presque rien, mais la seule vision de ces lèvres courbées suffirait à faire bondir votre cœur de revoir un si beau jour cette enfance pure et innocente que nous quittons tous, chaque jour un peu plus. L'adolescent ne tenais déjà plus en place, il frétillait sur la roche tel un hareng sorti de l'eau comme pour le supplier de l'emmener aujourd'hui. Mais Karl ne dit toujours, rien. Non, le mystère fait homme paraissait alors plus impénétrable encore qu'en sa grise habitude, ne se contentant que de lui jeter un sac empli d'une auge et d'un paquet de viande séchée tandis que lui même s'armait d'un semblable et revêtait son habituel cape. Et tous deux s'élancèrent, l'un derrière l'autre, Karl devant et Camille après. L'inconnu courait si vite que l'on l'aurait cru glisser sur la brise. Ses pieds, agiles et bien faits touchaient à peine Terre, au rythme de ses mains, qui, des pans de son manteau, le faisait ressembler à un gigantesque oiseau prêt à prendre son envol. Camille, son élève, espérait-il, peinait à la cadence et observait impuissant l'aigle majestueux s'éloigner de sa mission. Enfin, il n'en puis plus, ses poumons lui brûlaient trop et sa gorge était sèche, il devait s'arrêter. À contrecœur, le garçon stoppa sa course folle, s'assis sur le premier rocher qui parvint à sa vue. Là, il se prit la tête entre les mains : venait-il vraiment de le perdre, encore ? Se retrouvait-il vraiment, un fois encore, seul en l'immensité du désert ? Comment arriverai-il à s'en sauver, cette fois ? Et Karl... Karl était loin, Karl l'avait abandonné. Et maintenant ce demeurait trop tard, le mal semblait irréparable tandis que ses paupières se fermait, doucement sur une plaine de sable qui dansait, encore et encore devant ses yeux comme pour lui dire : "Tu m'appartient désormais". BAM, BAM, BAM. C'était son cœur qui battait, ou devrais-je dire, ne palpitait presque plus. BAM, BAM, BAM. Et voilà, après tant d'efforts, l'adolescent mourrait ainsi, sous un soleil de blond en un monde inconnu... Bien cruel destin qui l'accable au zénith, qui nous accable tous, et nous accablera. Un destin si parfait, si inéluctable, qui rit de nos actions, de nos espoirs et nos passions. Un destin maléfique, mais au fond si bon qui dessine à chaque vie, chaque faute, son pardon. Le destin n'est pas ennemi, il est juste ciel le cercle, qui tourne et recommence en le bel infini. C'est destin qui le sauva, qui envoya au bon garçon, juste l'éclair-idée qui guida ses doigts durs en sa besace de toile jusqu'au nœud de sa gorge pour l'amener au ciel.

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La tâche blanche
HorrorLe mal... Il réside en chacun de nous, dans nos cœurs et dans nos gestes. Il nous possède, nous contrôle complètement et ronge, plus vicieux que la nuit, nos tendres sentiments. Prenez garde, vous qui croyez au bien, qui fausser dans l'espoir d'un s...