Sur la pointe des pieds, Clothilde tourna la poignée et la porte s'ouvrit en grinçant. À l'intérieur, rien ne semblait bouger, le grands lit au draps brunâtres, défait, comme à son habitude montait et descendait au rythme de sa respiration. La lueur du nouveau jour filtrait à peine à travers les persiennes blanches à la peinture caillée. Ce mince rayon suffisait à peine à éclairer la chambre, un parquet négligé duquel dépassait ça et là quelques bouts de planche vermoulus, le grand lit, deux place qu'elle occupait maintenant toute seule la plupart des soirs et la grand malle de bois, bien rangée dans un coin de la pièce sur laquelle reposait une fine couche de poussière. La petite fille contourna le sommier se coucha près d'elle, Maman dormait encore. Les deux bras pliés au devant du visage, la fillette sentait tout juste son souffle contre les poils de sa nuque quand elle fermait les yeux. Cela sentait si bon, une douce odeur de savon de Marseille et de lavande fraîchement coupée, l'odeur qui l'avait vue grandir. Un courant d'air froid glissé de par la fenêtre entrouverte caressa soudain sa joue, redressant d'un coup les petits cheveux de sa nuque. Lentement, afin de ne pas la déranger, Clothilde tira délicatement la couverture repliée sous le ventre de sa mère avant de se blottir tendrement contre son sein. Une main caressa ses cheveux, Maman se réveillait enfin. Le regard encore tout embrumé de sommeil, la jeune femme bâilla, étira longuement avant de se rallonger aux côtés de sa fille. Les bienfaits de la nuit semblaient avoir effacé la fatigue du jour et la grosse marque bleue qui entachait la veille son visage ne transparaissait plus en ses traits délicats qu'en une estafilade jaune si discrète que la petite ne la remarqua point.
-Tu as bien dormi, mon ange ? chuchota la bonne femme.
-J'ai fait un joli rêve, répondit Clothilde, on était moi, toi, papa et Cassandra et on mangeait des glaces dans le parc !
-Ça devait être bien, assura Maman, j'espère qu'elle était au chocolat, j'adore les glaces au chocolat !
L'éclair qui traversa son regard acheva de chasser le brouillard de son âme tandis qu'une lueur inquiète faisait trembler la bordure de ses lèvres gercées.
-Qui est Cassandra ma chérie ?
Clothilde écarquilla yeux.
-Cassandra ! Tu sais, l'autre amoureuse de papa ! Celle qui a une statue avec son nom dessus !
À cet instant, tout parut s'effondrer dans le cœur de Jeannette, tout. Ce grand château qu'ils avaient mis tant de tant et tant d'amour à bâtir s'enflammait brusquement tandis qu'une à une, les pièce de la dure vérité s'assemblaient, inéluctablement. Maintenant elle comprenait ! Lui, celui qu'elle avait cru aimer, connaître et remporter, ils avaient rompus ensemble, partagé le plus intime secret et le plus beau des trésor et voilà qu'il la trahissait ! Le rouge qui montait à ses joues et les larmes à ses yeux dégoulinaient, il allait payer ! Oh ! Ce n'était plus de la rage que souffrait là Maman, ni même de chagrin, mis d'un mal plus vicieux, plus fourbe, le fléau qui arrache, qui détruit votre vie et déchire votre âme, le désir de punir, de venger son honneur.
-Qui ? De quelle statue tu parles ?
-Si, insista la fillette, à l'endroit ou il y en a plein, avec les anges et les croix, derrière l'église !
-Le cimetière ?
-Oui, le simetierre !
Maman se rassit, tout demeurait vide au fond de sa personne. Ainsi l'avait-on déjà vengée... Sans doute une d'entre eux, la première de tous ces morts soudainement tus. Mais quand ? Et comment cela était-il possible ? Et si cette chose frappait encore, qui dit qu'elle en réchapperait ?
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La tâche blanche
УжасыLe mal... Il réside en chacun de nous, dans nos cœurs et dans nos gestes. Il nous possède, nous contrôle complètement et ronge, plus vicieux que la nuit, nos tendres sentiments. Prenez garde, vous qui croyez au bien, qui fausser dans l'espoir d'un s...