63. Quelle ironie

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-23 décembre 2006-
Neuf ans plus tôt...

J'ai laissé un soupir de soulagement dès que les portes de l'ascenseur se sont fermées derrière moi. Ça faisait vraiment du bien de rentrer chez soi après une longue journée de travail. Je savais qu'être modèle photo n'était vraiment pas le plus horrible aspect de mon travail, mais les directives à suivre, les lumières et les ventilateurs géants en plein visage, sans parler des couches de maquillages s'avéraient être bien fatiguant parfois.

J'était donc bien heureuse de rentrer chez moi et assez tôt pour changer. Les photoshoots en studio étaient généralement bien plus long qu'en extérieur à cause du temps qui change mais aujourd'hui, tout s'était passé en quatrième vitesse. À mon plus grand bonheur, comme à celui de Jesse.

Il ne sait pas que je rentre déjà et je pense que ça lui fera plaisir. Les choses sont un peu étrange entre lui et depuis quelque temps. Il me reproche d'être trop investie dans mon travail et c'est quelque chose que je n'arrive pas à comprendre. Il devrait être heureux pour moi que les choses se passent aussi bien... Je sais qu'on passe moins de temps ensemble à cause de ça mais il devrait comprendre mieux que quiconque que je ne peux pas louper les opportunités qui s'offrent à moi surtout en ce moment.

Mais bon, j'espère que mon retour tôt à la maison de ce soir lui fera plaisir. J'ai tourné la poignée de la porte tout doucement avant de la refermer derrière moi avec la même délicatesse, ne voulant pas faire de bruit pour lui faire la surprise. Je le suis mordue la lèvre inférieure en avançant dans l'appartement sur la pointe des pieds. Je sentais déjà mon rire remonter le long de ma gorge juste en imaginant sa tête après m'être jetée sur lui pour le surprendre.

Mais mon sourire s'est vite dissipé. Mon rire n'a finalement pas averti ma présence. Et pourtant, je venais bel et bien de surprendre Jesse.

Il ne s'est pas aperçu que j'étais là, comme la femme nue allongée sur lui d'ailleurs, avant que le bruit de mon sac à main qui venait de glisser de mon épaule ne les fasse se tourner vers moi. Je suis restée paralysée une dizaine de seconde à les regarder, à le regarder, en sentant la nausée monter.

Jesse a repoussé la femme sur lui juste après avoir écarquillé les yeux. Elle est presque tombée par terre et bien que dans d'autres circonstances j'aurais éclaté de rire, la voir se servir des coussins de mon canapé pour se couvrir après avoir repris l'équilibre ne me faisait qu'éprouver encore plus de souffrance.

« Jennifer. »

Mon prénom m'a brutalement redonné toute ma mobilité, et en m'effondrant au sol j'ai récupéré mon sac avant de me relever aussitôt. Je n'allais certainement pas me montrer aussi fragile, surtout pas dans un moment comme celui là. Je suis sortie de l'appartement sans même me retourner. Cet endroit n'était définitivement plus mon appartement. J'ai claqué la porte en partant, pour le ralentir dans ma poursuite autant que pour ne pas entendre ses suppliques ou encore le voir se rhabiller.

J'ai martelé le bouton de l'ascenseur comme si ça pouvait le faire venir plus vite tout en le maudissant de prendre autant de temps. J'ai baissé les yeux vers mon sac à main en me concentrant sur mes clés de voiture plus que sur le son de sa respiration essoufflée.

« Jennifer, bébé, je t'en pris, je peux tout t'expliquer ! »

Clés de voiture. Clés de voiture. Clés de voiture.

« Jennifer s'il te plait—»

« NE ME TOUCHE PAS ! », ai-je hurlé en levant en l'air la main qu'il venait d'essayer de prendre.

« Jennifer—»

«Tais-toi ! »

Je me suis ravancée vers le bouton de l'ascenseur ne sachant pas quoi faire d'autre puisque je ne trouvais pas mes foutues clés de voiture.

Un Flocon d'AmourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant