Peu avant que le procès ne débute, Alexander avait reçu un message de la part de son meilleur ami et il avait donc accouru, même si l'idée de laisser seule sa protégée l'ennuyait passablement. Sans compter qu'il avait fui toute la matinée Lila Loch qui s'invitait de plus en plus chez lui, et ne passant pas par la porte d'entrée, sa présence éveillerait les soupçons de Lorelei. Débraillé de sa nuit en boîte et mal à l'aise de ne pas être à ses côtés, alors qu'il s'agissait d'une affaire importante et délicate, il atteignit la maison de Dervis en se promettant qu'il ne resterait qu'une demi-heure pour la rejoindre rapidement.
La maison, ou plutôt la villa, du richissime Dervis Stranza attirait l'attention de loin. En plein centre, parmi les remparts de l'ancienne cité médiévale qui encerclait les quartiers chics, un bâtiment blanc, moderne et au jardin rempli d'arbres aux feuillages verdoyants tout au long de l'année s'élevait sur deux étages avec un toit habitable et ouvert sur le ciel où étaient entreposés du matériel de sport, des transats et un agréable espace dédié au barbecue pour les étés entre amis. Les rumeurs ne tarissaient jamais sur cet endroit et certains affirmaient qu'il ne pleuvait pas là-bas, que la pluie elle-même redoutait le propriétaire et qu'elle ne se risquait pas à l'ennuyer.
Alexander se posta au pied du portail couleur argile et il sonna à l'interphone. Comme si le Vieux l'attendait devant sa porte, il ouvrit immédiatement. Il eut à peine le temps de parcourir l'allée de pierres le menant à la maison que Dervis s'exclamait déjà de son ton exagéré :
— Tu es grandement en retard, Crapule ! Outrageusement en retard, si je puis dire !
— Tu ne peux pas dire, rétorqua mollement Alexander. Qu'est-ce que tu me veux encore ? Je te préviens, si tu avais seulement besoin d'une compagnie pour regarder tes émissions ridicules, je m'en vais tout de suite ! Je suis un homme très occupé, le Vieux, ne l'oublie pas !
— Premièrement, nous sommes chez moi et j'agis à mon bon vouloir ! Deuxièmement, mes émissions n'ont rien de ridicule ! Elles sont divertissantes, égayantes et plus drôles que tu ne le seras jamais ! Troisièmement, tu sais combien il est peu amusant de rire sans personne. Il vaut mieux rire à plusieurs et, en cela, tu m'es utile ! Quatrièmement et dernièrement, je suis mille fois plus occupé que toi, Crapule ! Que fais-tu, toi ? Hormis suivre tel un bon chien-chien ta protégée. Trouve-toi un travail !
Le plus jeune planta ses talons dans la terre du jardin, ce qui eut le don d'agacer son aîné qui ne pipa mot, serrant les dents. Il piétina l'herbe pour le narguer davantage, puis il marmonna :
— Dépêche-toi de m'expliquer la raison de ton message pressé ! Je crains que l'ange démoniaque qui me sert de groupie me retrouve ici !
— A ce propos...
Dervis ne put continuer sa phrase, puisqu'ils entrèrent chez lui, arrivèrent dans l'immense salon aux baies vitrées donnant sur la piscine et ils croisèrent tous deux le regard illuminé de Lila Loch, a.k.a l'ange démoniaque. Celle-ci, qui heureusement n'avait rien entendu, se leva dans un bond adorablement mignon et se jeta sur Alexander qui la retint de justesse. Toute petite qu'elle était, il parvint aisément à la soulever et la porter jusqu'au sofa où il la réinstalla. Aussitôt, il distingua le froncement de ses sourcils, son sourire crispé et la moue qui ne tarda pas, ce qui signifiait qu'il s'apprêtait à passer un mauvais quart d'heure.
— Monsieur Drukhän ! aboya-t-elle. Je suis descendue de là-haut par bonté envers toi et tu oses m'ignorer !
— Quelle bonté ? pouffa-t-il dans sa barbe.
— Oui, très cher, de la bonté ! Je te signale que c'est toi qui me courtisais et j'ai cédé à tes avances par gentillesse d'âme ! Maintenant que tu as obtenu ce que tu souhaitais, tu me délaisses. Or, je ne suis pas ce genre de femme que tu utilises et que tu balances sur le côté pour t'en débarasser ! Je suis pire qu'une sang-sue, tu l'apprendras bientôt !
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Lui qui veille sur elle
ParanormalQui ne rêve pas qu'un homme fort, beau et dévoué veille sur soi, à tout instant ? Pour Lorelei, il s'agit bel et bien d'un rêve éveillé. Depuis ses dix-huit ans, à son retour d'un coma, un homme la suit et la protège. Après plus d'une décennie ave...